Ils ont été condamnés pour harcèlement envers leur ex-compagne, sont accusés d’avoir drogué une élue à son insu dans l’espoir d’avoir des relations sexuelles avec elle, ou bien d’avoir frappé leur épouse (mais « juste une fois, alors ça va »).
Ils défendent aussi leur copain parce que voyez-vous, ils sont convaincus qu’il est incapable de faire du mal à une femme. Ils sont aussi les champions des blagues misogynes, mais ont juste la réputation d’être des types un peu lourdingues et pas bien méchants. Ils accusent ces « sales féministes » de vouloir nuire à leur carrière politique, ils banalisent ou minimisent les paroles de celles qui osent parler…
« Ils », ce sont des hommes politiques et certains d’entre eux vont peut-être recevoir une prestigieuse distinction. C’est tout l’objectif de la soirée Ça va bien se passer* qui doit se tenir ce vendredi 25 novembre, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, et qui va récompenser les hommes politiques qui se sont illustrés cette année dans le domaine des violences sexistes et sexuelles.
Dénoncer les violences en politique autrement
À l’origine de cette remise de prix, on trouve l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique, instance créée par Alice Coffin, Madeline da Silva, Hélène Goutany, Fiona Texeire et Mathilde Viot. Cette dernière, militante féministe, instigatrice du MeToo Politique et co-fondatrice de Chair collaboratrice a justement répondu à nos questions sur cette soirée qui s’annonce hautement caustique et féministe :
« Ça fait un an que l’Observatoire existe, un an qu’on dénonce des hommes, qu’on arrive dans les médias avec un air sévère, qu’on rentre dans la catégorie très attendue des féministes vénères, pas drôles… nous, on a aussi envie de se marrer ! »
Pour donner le ton, cette cérémonie a été baptisée en référence à la petite phrase de Gérald Darmanin face à Apolline de Malherbe, prononcée sur la matinale de RMC dégoulinante de condescendance et de mépris et surtout inspirée par un meme masculiniste.
Ce sera l’occasion de récompenser tous ceux qui se sont distingués dans le domaine des violences faites aux femmes :
- un Prix « Toutes des hystériques » pour saluer « le sexisme ordinaire des hommes politiques »,
- un Prix « Petit ange parti trop tôt » pour récompenser « les hommes politiques dont le talent n’a pu pleinement se déployer du fait de cabales néoféministes »,
- un Prix « Carrière brisée » pour ceux « dont la brillante carrière a été violemment brisée par des accusations mensongères de violences sexuelles »,
- un Prix « du Parrain » pour honorer « les grands hommes qui ont vaillamment protégé leurs potes, leurs ministres, leurs bros »,
- un Prix « Liberté d’importuner » pour décorer « les théoriciens de la pensée des hommes – les vrais -, les défenseurs de la liberté d’expression, de la galanterie à la française »,
- un Prix « J’accuse » pour couronner « les hommes qui ont le panache de mettre à nu les complots visant à entacher leur honneur ou l’honneur de leurs frères d’armes »,
- et enfin un Prix « Meilleur espoir » décerné à ceux qui « ont su déjouer les pièges tendus par des féministes acharnées ».
Le nom des nommés — et ceux des lauréats — seront dévoilés au cours de la cérémonie.
Ces prix sont une façon de distinguer chacun de leurs comportements, explique Mathilde Viot, de voir « le spectre qui va de la complicité et du soutien apporté à des hommes accusés, à une agression grave, mais aussi jusqu’à une utilisation de la justice ou des médias pour assurer sa défense » :
« On a voulu insister sur la créativité, sur les différents outils qu’ils maîtrisent parfaitement pour se sortir de ces situations. Ça a aussi une vertu un peu pédagogique de montrer de façon très tangible ce qu’ils mettent en œuvre pour lutter contre l’avancée des droits des femmes. »
Reprendre l’humour comme outil militant
Puisant dans les modes d’action du collectif La Barbe ou encore dans l’esprit de la cérémonie des OUT d’or, les créatrices de la soirée Ça va bien se passer* revendiquent le maniement de l’ironie. Mathilde Viot en est convaincue, l’humour est justement un outil à reprendre en tant que féministe, car trop souvent accaparé par les hommes : « Quand je travaillais à l’Assemblée, j’ai remarqué qu’il y avait toujours un humour — qui était nul — à destination des femmes pour les diminuer, pour les discréditer. Je pense que c’est un champ hyper vaste à récupérer, qui nous permet d’être hyper créatives. »
Animée par l’élue écologiste de Schaerbeek Sihame Haddioui et l’adjointe à la Maire de Paris Audrey Pulvar, la soirée sera aussi rythmée par un panel de remettantes, journalistes, artistes, écrivaines et militantes engagées :
Et pour ne pas en rater une miette, la soirée, qui se tiendra à la Mairie du 12ème arrondissement de Paris à partir de 19h le vendredi 25 novembre, sera aussi retransmise en ligne.
À lire aussi : Qui veut faire taire le mouvement #MeTooPolitique ?
Crédit photo : Nicolas Hulot (Cvallantindulac, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons), Damien Abad (Jean-Luc Hauser, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons), Gérald Darmanin (Jacques Paquier, CC BY 2.0, via Wikimedia Commons), Benoit Simian (Jbrozier, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons), Adrien Quatennens (Jean-Luc Hauser, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons)
Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :
- Le 3919 et le site gouvernemental Arrêtons les violences
- Notre article pratique Mon copain m’a frappée : comment réagir, que faire quand on est victime de violences dans son couple ?
- L’association En avant toute(s) et son tchat d’aide disponible sur Comment on s’aime ?
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