« Les ultimatum ne sont vraiment pas un bon moyen d’obtenir ce que vous souhaitez ». Voilà les prémisses de The Ultimatum, dernier dating-show américain à succès de Netflix, qui en porte pourtant le nom. « Ils permettent, cependant, d’avoir les réponses aux questions que vous vous posez. »
En cliquant sur la télé-réalité qui trônait dans le top 10 France, un dimanche, je ne m’attendais pas à grand chose de plus qu’un divertissement un peu honteux de gueule de bois. Grossière erreur : les 10 épisodes d’une cinquantaine de minutes m’ont fait l’impression d’avoir avalé un kilo de sable au ralenti. Sexisme, glorification de schémas toxiques et relations dysfonctionnelles, le programme ne nous épargne rien.
Que se passe-t-il dans The Ultimatum sur Netflix
En cause derrière ce terrifiant concept, Nick et Vanessa Lachey, le couple de présentateurs biens connus de Love is blind.
Le principe est aussi simple que cruel : on nous présente, dès l’introduction, six couples qu’un désaccord profond empêche d’avancer. Cinq couples ne trouvent pas de solution sur la question du mariage, un autre sur celle des enfants.
Régler ça avec une saine communication, des compromis, une thérapie ? Que nenni. Selon l’émission, la vérité est ailleurs. Leur méthode : celles et ceux qui souhaitent ce que leur partenaire ne veut pas leur offrir doivent lui poser un ultimatum — Marry or move on (se marier ou passer à autre chose, en français), est d’ailleurs le sous-titre du programme.
Épouse-moi/accepte de faire des enfants avec moi, ou je te quitte, en somme. Si cela vous semble lunaire, accrochez-vous bien, ce n’est que le début.
Pour savoir quelle réponse offrir à leur moitié, les couples seront testés pendant 6 semaines par le processus suivant. Première étape, la séparation. Vous pensiez avoir la solution pour vous faire passer la bague au doigt ? Vous voici célibataire.
Après cette rupture forcée, les six couples hétéros devront choisir au sein des autres participants un ou une autre partenaire, avec qui ils devront vivre « comme un couple marié » pendant les trois semaines suivantes. Lors d’une journée aux allures d’apocalypse en bordure de piscine, les douze âmes en peine se matent et se datent pour trouver la personne qui sera leur amour de remplacement… avec qui ils auront aussi la possibilité de quitter l’aventure.
Le tout, évidemment, sous les regards jaloux de leurs exs, car tout ce beau monde est réuni au même endroit et flirte à découvert.
Après ces trois semaines de découverte, chacun retournera aux côtés de son ou de sa partenaire initiale pour essayer de recoller les morceaux, et décider de si oui ou non, ils quitteront l’aventure ensemble (et fiancés), ou séparément, voire avec leur +1 de substitution.
The Ultimatum, sexiste et cringe
Poser un ultimatum quelconque pour obtenir ce que l’on souhaite de quelqu’un n’est pas seulement une très mauvaise manière d’arriver à ses fins, cela peut aussi être une forme de manipulation. Car il y a une différence claire entre dire : « Voici mes projets de vie, je ne peux pas y renoncer et si tu ne peux pas les partager avec moi, nos envies seront irréconciliables et nous devrons nous séparer » et dire, (a fortiori devant une caméra, comme dans The Ultimatum) : «Tu n’es pas prêt à te décider, mais je veux que tu le sois. Fiançons-nous, ou je te quitte. »
C’est peut-être la remise en question DE cette évidence qui rend le programme sensationnel. Malheureusement, la liste des choses qui le rendent insupportable à regarder ne s’arrête pas là.
On le sait, la télé-réalité valorise un modèle de couple : hétérosexuel, et toxique. The Ultimatum n’échappe pas à la règle. Dans la majorité des cas, ce sont les femmes qui ont envie de se marier et parlent de leur envie de devenir des épouses, parfois avec des justifications qui transpirent la misogynie :
« Je fais du sport, j’ai un diplôme, je cuisine, je fais le ménage, et je sais comment baiser. Il ne trouvera pas ça chez une autre »
Un discours que les hommes se gardent bien de tenir en public (aucun d’entre eux n’ose exiger à voix haute que sa partenaire soit une fée du logis ou qu’elle passe son temps à la salle de sport). Chez les participants, le sexisme s’exprime en d’autres termes qu’on reconnaît tout aussi bien :
« [Ma partenaire actuelle] parle sans arrêt, elle a un avis sur tout, elle est trop émotive. J’attends de ma future femme qu’elle sache mieux écouter »
The Ultimatum n’est pas un divertissement
La suite de ce que le programme appelle une expérience sociale additionne sexisme, couples dysfonctionnels et torture émotionnelle. Jalousie, mensonges, chantage affectif, il n’y a absolument rien de divertissant dans le fait de voir autant de gens s’utiliser les uns et les autres pour tenter de réparer des relations qui ne fonctionnaient pas en arrivant.
Dans une scène particulièrement difficile, on observe un des participants rentrer ivre auprès de sa partenaire bien décidée à quitter l’appartement et tenter de la contraindre physiquement à rester où elle se trouve en l’attrapant par les bras ou par la taille de manière répétée pendant qu’elle lui demande de la lâcher. Sans aucune autre explication ou mention de la réalité de cette violence, le montage de l’épisode se coupe sur une musique à suspens, et passe à autre chose, comme si de rien n’était.
Les schémas destructeurs proposés par la production s’accumulent, toujours en promettant aux participants et participantes de trouver leur happy ending. On vous en épargnera la liste, mais notre conseil reste le même : on vous déconseille fortement de vous infliger cette horreur. Merci pour rien, Netflix.
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Crédit photo : The Ultimatum, Trailer / Capture d’écran Youtube
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