Publié initialement le 2 décembre 2011
Ça y est, nous sommes entrées dans décembre. C’est cool parce qu’on peut dire adieu pour près d’un an au mois de novembre, souvent considéré comme le petit pestiféré du calendrier tant on le passe à moisir de déprime. C’est cool aussi, parce que c’est le mois de Noël.
Je sais pas pour toi, mais à l’approche de décembre, j’ai encore cette vieille habitude de m’émoustiller à l’idée que c’est bientôt Noël. Pourtant, très vite, la raison me rattrape : j’ai 22 ans, et je n’ai plus aucune raison de m’enflammer pour une fête faite pour ne rendre heureux que les petits et leurs parents tout émus de voir des étoiles dans les yeux de leur progéniture.
Personnellement, je suis dans cette période de l’entre-deux où je suis à la fois trop vieille pour rêver du père Noël, de ses rennes, de sa hotte et de son traîneau, et trop jeune (ou plutôt trop en plein milieu de mes études) pour être en état de procréer et de faire découvrir la magie de la fête la plus consumériste de l’année à mon mouflet. Du coup tu peux comprendre que, pour moi, Noël sent des pieds comme les miens en été quand je mets des ballerines en plastique sans petites soquettes.
Ca ne me fait rien ça ne me fait rien çanemefaitriendutout.
Pour tempérer un peu mon propos, je dois avant tout vous confier quelque chose en avant-propos : si j’éprouve tant de rancoeur face aux petits nain-nains, c’est tout simplement que je n’ai pas fait le deuil de mon enfance à moi. Envoyez-moi un psy qu’on en finisse. Voilà, maintenant que c’est fait, voici 5 bonnes raisons d’envier les enfants à Noël : enfilez vos plus beaux habits de cyniques !
L’émerveillement
Pendant la période de Noël, il n’est pas rare de voir les enfants s’émerveiller de tout. Non, en fait, je rectifie : dans la vie en général, les enfants s’émerveillent de tout. C’est excessivement énervant quand on ne peut s’empêcher de faire preuve de scepticisme pour tout et n’importe quoi.
Si pour eux, Noël est la fête de l’année (celle où un gros monsieur inconnu au bataillon en habit rouge qui passe le reste du temps en Laponie entre ses rennes et ses lutins leur apporte des cadeaux) nous ne pouvons nous empêcher pendant le réveillon, nous, cyniques, de voir le côté consumériste de la chose.
Au même instant, de leur côté, les enfants sont aux aguets pour déceler les petits bruits suspects trahissant la présence du gros bonhomme titulaire du permis T (le permis Traîneau). C’est à ce moment là qu’avec un petit coup dans le nez, j’ai très envie de leur dire « héééé, mais il existe pas le Père Noël bande de morveux ». Mais je me retiens parce que je préfère encore voir un enfant heureux que l’entendre pleurer en partant dans les aigus. C’est dire.
Les vacances de Noël
Je pense que si les enfants sont tellement émerveillés au moment de Noël, c’est qu’ils ont tout le temps d’y penser puisqu’ils sont en vacances.
Qui travaille dans le commerce (interdisant donc la prise de congés à ce moment de l’année) ou a un job étudiant sait de quoi je parle : il est difficile de se mettre dans le move quand on est au boulot en pleine période de Noël. Difficile de passer un bon réveillon quand tu es restée jusqu’à 18h à travailler en caisse, par exemple. Surtout quand un client à qui tu as souhaité un bon réveillon t’a répondu : « Oh, vous savez, j’ai pas de famille alors je le passe tout seul, comme tous les ans » (Bruit de coeur qui se brise en 12 milliards de morceaux). Honnêtement, je pense qu’il est plus facile de se mettre dans l’ambiance quand on a des vacances scolaires et qu’on peut alors regarder tout à loisir les téléfilms de l’après-midi sur les miracles de Noël sur TF1.
Je pense encore avec nostalgie au dernier jour d’école avant les vacances de Noël, quand j’étais au collège ; on y regardait des films, on mangeait des chocolats, on chantait des cantiques en anglais, en allemand ou en espagnol. Quelle ne fut pas ma déception lorsque je me suis rendue compte que l’habitude se perdait au lycée. Ça m’a tout niqué ma magie des festivités.
INDIGNEZ-VOUS : cet enfant nous nargue.
Plaisir d’offrir
Souvenons-nous : quand nous étions petites, les cadeaux à offrir à nos familles ne nous coûtaient rien, nada, que dalle, que t’chi walou. Il suffisait de faire un peu de travaux manuels. Autre avantage d’offrir quand on est petits : on a beau donner quelque chose au potentiel esthétique EN-DESSOUS du néant (c’est possible) et dépourvu de sens commun (un collier-cendrier, par exemple), personne ne te le fera remarquer, et j’irai même jusqu’à dire que tout le monde trouvera ça formidable.
Je vais te donner un exemple concret : quand j’étais petite, j’ai voulu offrir à tout le monde des figurines en pâte-à-sel. Comme je n’étais pas assez douée pour créer un renne ou une tête de lutin, j’ai décidé de faire simple : j’ai donc sculpté des champignons en pâte-à-sel, pour tout le monde. Et chaque membre de la famille était aussi ravi qu’attendri. Un peu goguenard, aussi.
Et puis un jour, je suis retombée sur l’un de ces champignons. Il était composé d’une longue tige surmontée d’un chapeau légèrement replié sur lui-même au milieu. Je vous fais un dessin où tout le monde a compris que j’avais offert des pénis à tout le monde ?
Tout ça pour dire qu’on se fout une pression monstre une fois adulte en matière de cadeaux, alors qu’il suffirait de revenir 15 ans en arrière pour faire plaisir en offrant quelque chose d’ignoble, de salace et de gratuit. Injustice.
Le repas de famille
Quand on était petites, on n’avait pas réellement besoin de participer au repas de famille : même avant l’ouverture des cadeaux, nos parents avaient déjà prévu d’apporter une malette contenant tous nos jouets (du petit train qui fait de la fumée aux cow-boys en Lego, en passant par les Barbies et la Game Boy Color). Du coup, on n’avait pas le temps de s’ennuyer : on passait un peu à table pour implorer notre mamie de nous faire goûter au vin-qui-pique, on mangeait un petit four et on repartait jouer en attendant nos nouveaux cadeaux au pied du sapin pour s’amuser encore plus avec un Action Man tout neuf.
Passés 16 ans, la réalité est toute autre : va t’amuser avec un chèque, toi. A la limite, tu peux faire de l’origami avec, mais ça ne t’occupera pas plus de 5 minutes (allez… 10 si tu te lances dans une autruche).
Du coup, en tant que jeune adulte, te voilà contrainte de participer aux conversations (c’est un deal : soit tu te fais encore considérer comme une enfant et tu restes au Champomy, soit tu es adulte, tu bois autant de vin que tu veux, mais tu dois causer politique*. Quel dilemme). Le problème si tu choisis cette deuxième option, c’est que lorsque la conversation dérive sur des sujets sérieux, te voilà fort dépourvue de ne pouvoir te cacher derrière ta Nintendo DS. Extrait :
– Et sinon, tu as suivi les primaires du PS ? – Bah je, non, je pouvais pas, je faisais un article sur l’accouchement de Carla Bruni.
Et BIM : déshéritée direct.
(*En même temps je dis ça, mais j’aime bien parler de tout et n’importe quoi avec ma famille. Je croise les doigts pour qu’il en soit de même pour vous toutes.)
L’absence de notion de l’expression « garder la ligne »
L’enfant, l’apparence, il s’en tape. Il vient à table manger trois petits pois et il retourne à ses chocolats pour la soirée. Il s’en fout, le gosse : il a pas choisi de mettre une petite robe près du corps et une veste de tailleur cintrée.
Alors que toi, entre temps, tu as appris à aimer la bonne bouffe et accessoirement, peut-être, le bon vin. Du coup tu prends un peu de tout, si bien qu’à 22h, le bouton de ta veste se détache violemment et vient percuter l’oeil de Tata Jacqueline. Te voilà bien : elle est maintenant borgne et bien décidée à te détester jusqu’à la fin de ses jours. Et en plus, elle pratique les rites vaudou. C’est bien ta veine.
Si tu es comme moi et que tu n’arrives pas à faire le deuil de la magie du Noël de ton enfance, suis mon exemple : regarde Love Actually en boucle, jusqu’à l’overdose, fais-toi une playlist de Noël avec White Christmas, All I want for Christmas et toutes les chansons que tu trouveras en tapant christmas sur Deezer et Spotify. Gave-toi de bons sentiments, porte une guirlande en guise d’écharpe, bref, force-toi : à force de persévérance, tu parviendras à renouer ne serait-ce qu’un tout petit peu avec cette période de l’année. S’agirait pas de te troller ton réveillon, quand même.
(Pour compléter ce papier, pensez à aller lire ou relire l’article Noël vu par les enfants de Stellou. Oldie, mais toujours goodie.)
— Illustration Timtimsia
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