La mort fait partie intégrante du jeu vidéo. Même s’il existe des œuvres dans lesquelles on ne peut pas décéder, il est courant de mourir, recommencer, remourir, rerecommencer, comme l’illustre le message devenu culte des jeux appartenant à la saga SoulsBorne (Dark Souls, Bloodborne) : « VOUS ÊTES MORT. »
Certains jeux, cependant, vont plus loin : la mort n’est pas qu’une simple mécanique, et l’œuvre propose une vraie réflexion sur le deuil. C’est le cas de What Comes After, I Am Dead, ou encore Spiritfarer, une merveille qui risque bien de vous tirer quelques larmes.
Spiritfarer, la poésie faite jeu vidéo
Troisième jeu seulement de l’ambitieux studio montréalais Thunder Lotus Games, Spiritfarer saute immédiatement aux yeux grâce à sa direction artistique. On croirait plonger dans un véritable dessin animé aux faux airs de Miyazaki, peuplé d’animaux anthropomorphes d’une beauté à tomber par terre et coiffé d’un ciel dont les tendres couleurs donnent envie de vivre dans une éternelle aube estivale.
Dans Spiritfarer
, vous incarnerez Stella, fraîchement devenue passeuse d’âmes sur un bateau après que Charon, légendaire marin du fleuve des morts, a pris une retraite bien méritée. À vous d’assumer son rôle et d’accompagner vers leur dernier voyage celles et ceux qui ont du mal à lâcher prise.
Comment vous êtes-vous retrouvée à ce poste ? Ce sera à vous de le découvrir, en discutant avec les êtres qui croiseront votre route et vous révéleront peu à peu des détails concernant votre vie antérieure, mais aussi la leur. Très joliment traduit en français, le jeu offre des dialogues poétiques, mais pas seulement : drôles, grincheux, réservés… vos compagnons de route (maritime) ont tous leur personnalité propre !
Alors discutez avec eux encore et encore, pour comprendre ce qui les empêche de franchir l’ultime frontière et les aider à surmonter ces vécus inachevés.
Venez pour la gestion…
Spiritfarer est, par essence, un jeu de gestion : vos tâches principales seront certes d’explorer les eaux en allant d’île en île pour y trouver de nouvelles âmes à prendre à bord, mais aussi et surtout d’agrandir et d’organiser votre embarcation pour y loger tout ce petit monde et répondre aux divers besoins de vos atypiques colocataires.
Construction de champs, de vergers, de logements, culture et récolte d’aliments, cuisine, transformation de ressources, pêche, gestion du bonheur de vos passagers… vous n’aurez pas le temps de vous ennuyer sur votre navire ! Sans compter les diverses visites à des marchands et constructeurs pour engranger des devises et agrandir votre pont afin d’accueillir plus de monde.
Rassurez-vous cependant si vous êtes du genre à angoisser devant une to-do list trop remplie : il n’est pas possible de perdre à Spiritfarer. Vous n’arrosez pas vos laitues ? Ce n’est pas grave, elles ne pourriront pas. Vous avez oublié que tel voisin déteste le café et vous lui en avez servi une grande tasse ? Il ne va pas sauter à l’eau pour autant. Vous avez envie de faire une pause ? Lancez votre bateau vers une lointaine destination, installez-vous en hauteur et profitez des superbes graphismes du jeu, un bijou visuel.
Vous n’en pâtirez pas, car Spiritfarer n’est pas là pour vous punir. Vous aussi, comme vos âmes en peine, vous avez le droit de prendre votre temps.
Ancré dans une certaine idée du slow gaming, une pratique du jeu vidéo à vitesse raisonnable qui met l’accent sur la tranquillité, Spiritfarer vous encourage à avancer à votre rythme et à, parfois, prendre le temps de vous poser, de lancer votre canne à pêche et de vous autoriser à dériver.
Notez qu’il y a une petite composante « jeu de plateforme » : bondissant de haut en bas, de gauche à droite et inversement, vous sautillerez en permanence, que ce soit sur votre navire ou sur les îles où vous accosterez. Mais là encore, pas d’inquiétude — si vous tombez, vous n’aurez aucune pénalité, il vous suffira de recommencer.
…restez pour les émotions
Mais si c’est cette multitude de tâches qui vous gardera accrochée à votre manette ou votre clavier jusqu’à des heures beaucoup trop tardives (les adeptes des jeux de gestion sauront), ce n’est pas là que se trouve le vrai sel du jeu.
Sans grande surprise au vu de son thème, Spiritfarer vous emmène avec délicatesse dans des réflexions profondes sur le deuil, la vie qu’on a menée, la trace qu’on laisse après notre passage sur Terre, et l’acceptation de notre propre mortalité. Accompagner des passagers jusqu’à l’étape finale de leur existence peut s’avérer un crève-cœur, au point que personne ne vous en voudra si vous traînez un peu à faire avancer l’intrigue de vos préférés.
Après tout, c’est bien la question que pose Spiritfarer : quand est-ce qu’on est prête à accepter la mort ? À vous d’y trouver votre propre réponse.
Spiritfarer est disponible pour 24,99€ sur Nintendo Switch, PlayStation 4, Xbox One, Windows, Mac et Linux.
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