Petit à petit, la société réalise l’ampleur systémique du phénomène de violences sexuelles. Mais il existe encore trop de cercles où la loi du silence prime sur la dénonciation de ces violences.
Bientôt un an après #MeToo, les révélations d’affaires de harcèlements et agressions sexuelles continuent.
Après l’affaire du harcèlement sexuel aux Beaux-Arts, et de la misogynie au lycée militaire Saint-Cyr par exemple, c’est le microcosme de la musique classique qui est au centre d’une enquête par Mathilde Dumazet.
Elle brise brutalement le silence sur un milieu que beaucoup croyaient protégé.
« Il faudrait une enquête #MeToo dans chaque secteur de notre société »
Mathilde Dumazet vient de finir ses études de journalisme à Sciences Po.
Engagée dans les problématiques d’égalité entre les hommes et les femmes, elle choisit de faire une enquête sur l’ampleur du harcèlement et des agressions sexuelles dans les écoles de musique et les Conservatoires.
Elle a elle-même fréquenté pendant dix années la sphère prestigieuse de la musique classique, où le sujet des violences sexuelles lui semblait banalisé.
« Quand on côtoie un milieu, à force on entend des choses, on les intériorise, et on finit par les intégrer comme étant normales.
Après l’affaire #MeToo je m’attendais à ce que des petites voix s’élèvent dans le milieu, parce que quand on parle avec des musiciens et des musiciennes, tout le monde a une histoire à raconter.
Sur les 30 personnes que j’ai interrogées officiellement, et toutes celles de mon entourage que j’ai interrogées officieusement, tout le monde savait que ça arrivait régulièrement. Mais personne n’a parlé. »
Comme dans beaucoup de milieux où il y a une dynamique d’autorité, des relations de maître à disciple, avec des enjeux de carrière, le harcèlement et les agressions sexuelles deviennent presque un rite de passage.
« C’est quelque chose qui est totalement caché, voire complètement toléré.
Les gens savent que ce sont des pratiques qui ont été courantes à une certaine époque, mon travail a été de faire comprendre que cette époque n’est pas révolue.
Il faudrait faire une enquête #MeToo dans chaque secteur, chaque microcosme, chaque micro-société.
Tant qu’il n’y a pas une dénonciation un peu médiatisée, les gens pensent que ca n’arrive pas dans leur milieu, alors que ça arrive partout. »
« Avec lui, il faut passer sous le piano »
L’enquête publiée par L’Obs est disponible avec un abonnement ou en payant 1€.
Elle repose principalement sur des témoignages, qui révèlent l’aspect systématique et non pas anecdotique des cas d’agressions sexuelles aux Conservatoires et dans les écoles de musique.
C’est un milieu artistique, élitiste, prestigieux, dans lequel les étudiants et les étudiantes sont passionnées et rêvent d’intégrer un orchestre ou de pouvoir vivre de leur passion.
Et où les professeurs sont parfois réputés pour leurs débordements… sans pour autant être dénoncés.
L’enquête montre aussi les failles juridiques sur la question des violences sexuelles.
On y lit l’histoire de Léa, 16 ans à l’époque des faits, qui s’est retrouvée prisonnière de l’emprise et du chantage sexuel de son professeur de flûte au Conservatoire. Il menaçait de lui faire rater son concours si elle n’obtempérait pas.
Extrait de l’enquête disponible sur L’Obs :
« En 2016, le musicien a été condamné à quatre mois de prison avec sursis pour atteinte sexuelle « sans violence, ni contrainte, ni menace, ni surprise » par une personne abusant de l’autorité de sa fonction.
Il n’a pas été inscrit au fichier des auteurs d’infractions »
Le travail de recherche de témoignages fait par Mathilde Dumazet a permis un début de prise de conscience au sein même du milieu.
Tout au long de son enquête, elle a pu voir par elle-même que les chartes éthiques des deux Conservatoires Nationaux Supérieurs de Musique, les plus prestigieux de France, donnaient désormais un peu plus de place au sujet des violences sexuelles.
Espérons que briser l’omerta permettra une meilleure protection des élèves, et des sanctions plus efficaces contre les coupables.
À lire aussi : Les abus sexuels à l’UNEF révélés dans une enquête de Libération
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Les Commentaires
Enfin voilà, j'ai fini par prendre des cours particuliers avec l'autre professeur qui était plus "normal" (aucun délire chelou en mode "j'suis un artiste les gens me comprennent pas" et qui faisait rien que son travail sans avoir besoin de dire des trucs déplacés.
Mais outre les agressions sexuelles il y aussi un vrai pb de misogynie, ça arrivait à mon prof de péter un câble pcq il y avait qqch dans sa journée qui s'était mal passé et il passait sa colère sur toutes les élèves qu'il croisait (j'ai connu des garçons qui travaillaient avec lui, ils ont jamais eu aucun pb). Même chose avec un prof de violon, qui était connu pour insulter ses élèves filles. J'ai connu deux filles qui travaillaient avec lui et qui ont du arrêter le conservatoire pcq il les avait traumatisées et deux garçons qui trouvaient que ce prof était juste génial... Sans parler non plus de la direction et des gens de l'accueil qui nous parlaient comme si on avait quatre ans et le directeur qui disait à peine bonjour et montrait clairement qu'il se faisait chier pendant mes examens.
Enfin bref, désolée pour le roman mais cet article m'a juste rappelé des mauvais souvenirs et je pensais que ce serait bien des les partager...