Sur 154 000 victimes par an*, on estime qu’environ 10 % des victimes de viol portent plainte, et seule une petite partie de ces plaintes aboutissent à une condamnation. Les raisons à cela sont nombreuses : peur de porter plainte, sentiment de culpabilité, pressions extérieures, difficulté à prouver les faits… Dans un premier temps, l’association Les Dé-chaînées souhaite en savoir plus sur l’accueil des victimes en commissariat ou gendarmerie.
*Source : Rapport 2012 de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales
Les victimes de viol et d’agressions sexuelles sont peu nombreuses à porter plainte. Les statistiques disponibles sur ces questions, qui sont déjà très élevées, apparaissent cruellement sous-estimées par rapport au nombre réel de victimes d’agressions ou de tentatives d’agressions, puisqu’on estime que seules 10% des victimes portent plainte.
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Les raisons qui retiennent les victimes d’aller porter plainte sont multiples. Il y a la peur de ne pas être prise au sérieux, qui va souvent de pair avec un sentiment de culpabilité. Et si c’était un peu de ma faute ? Et si « je l’avais cherché » ? Dans une société où l’on tend à culpabiliser les victimes d’agression, il ne faut pas s’étonner ensuite de constater que ces messages finissent par toucher les principales concernées…
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Il suffit d’aller lire les témoignages publiés en continu sur le Tumblr Je connais un violeur. Il suffit de (re)lire ceux partagés via le hashtag #JeNaiPasPortéPlainte.
Mais un autre facteur influe également sur la décision de se rendre au commissariat pour déposer une plainte : l’accueil réservé aux victimes par les fonctionnaires de police, un problème qu’a décidé de saisir l’association Les Dé-chaînées.
Des policiers qui ricanent lorsqu’une lycéenne dénonce l’exhibitionniste qui vient de lui montrer son sexe dans le parc à côté du poste.
Un agent d’accueil qui oblige une jeune femme à relater son viol dans la salle d’attente du commissariat, devant les autres personnes qui attendent.
Des policiers qui annoncent aux médias que les femmes mentent sur leurs agressions sexuelles sans aucune preuve ou statistiques.
Ces témoignages vous affligent ? Ils reflètent malheureusement une réalité méconnue : en France, l’accueil des victimes de violences sexuelles laisse encore trop souvent à désirer.
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Une enquête sur l’accueil des victimes
À l’occasion de la journée de lutte contre les violences faites aux femmes, Les Dé-chaînées réalisent une enquête sur les conditions d’accueil des victimes. Le questionnaire est totalement anonyme, et s’adresse à toutes les personnes victimes d’agression ou de tentative d’agression à caractère sexuel.
Grâce à cette enquête, nous pourrons étudier les éventuels manquements constatés lors de l’accueil, mais aussi mieux appréhender les attentes des victimes lors de ce moment particulièrement délicat.
Plus de 160 personnes ont déjà répondu à l’enquête. Plus les témoignages seront nombreux, et plus ils permettront d’avoir un état des lieux représentatif. Ensuite, Les Dé-chaînées comptent interpeller les ministères de l’Intérieur, des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, ainsi que de la Défense.
Vous pouvez répondre et relayer cette enquête autour de vous ! Souvenez-vous : 154 000 personnes ont été victimes de viol en France en 2012, seules 10% portent plainte. Il y a de fortes chances pour que certaines de ces victimes silencieuses fassent partie de votre entourage.
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La culpabilisation des victimes, encore à l’ordre du jour…
Et le sujet est loin d’être anecdotique ! Il est encore courant de faire peser sur les filles la responsabilité partielle de leur agression. Un triste exemple de cette réalité nous vient par exemple de Hongrie. La vidéo ci-dessous, relayée par dans The Guardian a été commandée par la police du comté de Baránya dans le cadre d’une opération de sensibilisation contre les agressions sexuelles.
On y voit essentiellement trois jeunes filles se préparer à sortir en boîte, s’habiller sexy, boire beaucoup, s’amuser, aguicher, emballer des mecs… Jusqu’à la sortie de boîte, où l’une d’entre elles croise le chemin d’un individu à capuche, adossé au mur en briques d’une allée sombre (qui a dit « cliché » ?).
https://youtu.be/qrhb_KXWXXo
Le slogan ? « Vous pouvez éviter ça ». Difficile de croire qu’il s’adresse aux auteurs des agressions, étant donné que la vidéo est intégralement focalisée sur les tenues et les attitudes des trois filles. Alors non, pour celles et ceux qui auraient encore des doutes : je pourrais bien vivre en jogging baggy que je serais toujours susceptible d’être victime de viol. Le problème, c’est l’impunité des agresseurs, pas le comportement des femmes dans l’espace public.
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J’ose espérer qu’en France, nous n’en sommes plus là, mais le spectre du slut-shaming n’est jamais bien loin, lorsqu’on interroge la pertinence des choix vestimentaires d’une victime… Souvenez-vous de Jack Parker et du quadra-bien-comme-il-faut dans le métro : c’était en France, en 2014. (lire ci-dessous).
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Les Commentaires
Malheureusement on en est toujours là, j'ai eu un débat avec un groupe et une fille soutenais que c'était la victime qui était responsable si elle avait porté une jupe trop courte ou un décolleté trop plongeant ... je trouve ce genre de pensés absolument monstrueuse .. moi je vais pas violé un type qui passe sous prétexte qu'il est torse nu ou que son slim est trop moulant ... Enfin bon c'est vraiment malheureux ce genre d'idée mais malheureusement elles sont toujours présente en France de nos jours.