Jeu, couche, et match ? Dans un long article pour le Elle américain publié le 4 avril 2022, la célèbre joueuse de tennis raconte sa grossesse et son accouchement en toute franchise, avec force détails. Peut-être participera t-elle prochainement à notre rubrique Poussez, Madmoizelle où des femmes racontent leur accouchement. Serena Williams, si vous nous lisez…
Une grossesse contrastée : un lien avec le bébé qui s’est créé avec le temps
La joueuse internationale a vécu cette première grossesse en 2017 de manière contrastée, adorant certains aspects mais pas tous. Elle s’exprime par exemple sur le premier trimestre, dans lequel les personnes qui ont vécu une grossesse se reconnaîtront sans doute :
« Le premier trimestre, j’ai eu des maux de tête et un goût métallique dans la bouche, mais dans l’ensemble, j’ai adoré être enceinte. Je fais partie de ces personnes qui aiment la grossesse et les attentions que les autres ont pour nous durant cette période. »
Mais elle révèle également un aspect dont on parle moins : le fait de ne sentir aucune connexion avec son bébé :
« J’étais nerveuse à propos de la rencontre avec le bébé. Pendant toute la grossesse, je n’ai pas ressenti de connexion avec ce bébé. Alors même que j’ai adoré être enceinte, il n’y a aucun moment où j’ai senti : Ô mon Dieu, c’est mon bébé. C’est quelque chose dont on ne parle pas, parce qu’on est censée aimer son bébé à chaque seconde. […]
J’attendais de ressentir quelque chose à propos de ce bébé pendant ma grossesse mais ça n’est jamais arrivé. Certaines amies de ma mère m’avaient dit qu’elles n’avaient pas non plus senti cette connexion, ce qui m’a fait me sentir mieux, mais j’attendais tout de même. »
La connexion est finalement arrivée lorsqu’elle a rencontré son bébé, lors de l’accouchement, qui ne s’est pas passé comme prévu. Elle a dû avoir une césarienne, alors qu’elle souhaitait accoucher par voie basse. La rencontre a déclenché quelque chose en elle, comme elle l’explique :
« Quand je l’ai finalement vue, je savais que ce serait une fille, je l’ai aimée. Ce n’était pas exactement instantané, mais c’était là, et cet amour n’a cessé de grandir ensuite. Je ne pouvais pas m’empêcher de la regarder, mon Olympia. »
Comme l’exprime avec beaucoup de sincérité Serena Williams, le lien avec le bébé ne débute pas forcément pendant la grossesse, il peut mettre du temps avant de s’installer.
L’instinct maternel, ce mythe
Pendant la grossesse et même après de l’accouchement, la vague d’amour tant décrite n’est pas forcément là, et c’est NORMAL. Le lien peut se développer avec le temps, alors que le bébé et les parents apprennent à se connaître.
Ma mère, comme d’une certaine manière les proches de Serena Williams, m’avait avertie que la rencontre avec le bébé n’était pas forcément une évidence. Après l’accouchement de mon frère, son premier enfant, elle avait senti un sentiment d’étrangeté à son égard les heures qui avaient suivi, avant finalement de ressentir de l’amour.
Pour l’accouchement de mes jumeaux, l’urgence et la prématurité ont malheureusement fait que je n’ai pas pu vraiment les voir après et que je ne me suis pas posé ce genre de questions.
Le mythe de l’instinct maternel est encore fort tenace et créé de la culpabilité chez de nombreuses parturientes qui ont besoin de temps avant de ressentir quelque chose pour leur bébé.
L’amour maternel existe, certes ; il peut survenir pendant la grossesse, à la naissance, mais aussi bien après, ou encore jamais… Le lien entre l’enfant et la mère n’est pas inné, mais il se construit. Comme l’énonçait la grande anthropologue Françoise Héritier à Psychologies :
« Le terme instinct, au sens strict, suppose que l’on soit conduit, malgré soi, à un certain type de comportements qui seraient liés à notre espèce.
Cela est valable pour les animaux, mais ne l’est pas pour l’espèce humaine. Parce que l’homme est doté d’une conscience, d’un libre-arbitre, de sentiments… Il s’agit donc de volontés, et non d’instincts. Des volontés qui peuvent d’ailleurs être absentes. »
Merci à Serena Williams de faire passer le message : n’ayez aucune culpabilité si vous ne ressentez pas de lien avec votre bébé pendant la grossesse, et même après ! Il y a les coups de foudre, mais aussi les relations qui mettent du temps à s’installer.
À lire aussi : Pression sur son utérus, carrière d’athlète : Serena Williams attend d’être plus détendue pour son second enfant
Image en une : © Capture d’écran compte Instagram/Serena Williams
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires