Sophie Pointurier est enseignante-chercheuse en traductologie, spécialisée en interprétation en langue des signes française, mais aussi l’autrice de La Femme périphérique (Harper Collins, 2022). Dans ce premier roman brillamment narré, qui se lit comme un policier, elle décrit la réalité d’un monde de l’art qui a longtemps effacé les femmes. De Berlin à New-York, le roman ancre son récit autour de deux figures principales : Peter et Petra, un couple d’artistes allemands en vue dans les années 1990. Derrière ce tableau qui met en lumière l’invisibilisation des femmes artistes à l’époque, l’intrigue se dessine, au fil d’une disparition, puis d’un meurtre. Une lecture à ne pas manquer et une plongée inédite dans le monde de l’art (frissons garantis).
Madmoizelle. Quel est votre rapport à l’écriture ?
Sophie Pointurier. Simple, c’est une nécessité. Depuis que j’ai su que j’aimais lire, je n’ai jamais arrêté d’écrire.
Madmoizelle. Quand avez-vous commencé à écrire ?
Sophie Pointurier. Assez jeune, vers l’âge de 8 ou 9 ans. Je venais de lire Les quatre filles du docteur March, et j’avais trouvé ça tellement bien que j’ai copié-collé l’histoire à ma vie rêvée en la réécrivant. C’était un plagiat manifeste ! Par cet acte, j’ai compris comment marchait un roman, mais j’ai surtout compris que c’est ce que j’aimais faire.
Madmoizelle. À quel moment de la journée préférez-vous écrire ?
Sophie Pointurier. J’écris le soir, en général vers 22h, ça peut durer une bonne partie de la nuit parce que je suis insomniaque. J’aime aussi écrire le matin. Je suis moins efficace durant la journée, et puis j’ai un travail, ce qui m’empêche matériellement d’écrire, même si en réalité, j’y pense tout le temps.
L’inspiration n’est pas continue, et il faut se laisser parfois un peu de temps pour enclencher le processus. C’est une sorte de gymnastique.
Sophie Pointurier
Madmoizelle. Avez-vous un lieu de prédilection ?
Sophie Pointurier. Mon lit ou mon canapé. J’aime être confortablement installée, j’ai un plateau de lit que je trimballe dans mon appartement et qui est devenu mon bureau. En vacances, j’utilise n’importe quel plateau, pourvu que l’ordinateur ne glisse pas.
Madmoizelle. Comment gérez-vous la page blanche lorsque cela arrive ?
Sophie Pointurier. J’ai appris à l’accueillir. L’inspiration n’est pas continue, et il faut se laisser parfois un peu de temps pour enclencher le processus. C’est une sorte de gymnastique. Je ne m’inquiète plus si ça ne vient pas, parce que parfois, rien ne vient, et au bout d’une heure, je fais autre chose. En revanche, je n’abandonne jamais et je m’y remets le lendemain.
Madmoizelle. Quel est le livre qui a changé votre façon d’écrire ?
Sophie Pointurier. Il y a les livres qui me parlent, ceux qui me construisent, mais ce ne sont pas forcément ceux qui ont un impact sur ma façon d’écrire. La conjuration des imbéciles, de John Kennedy Toole est peut-être le premier livre qui a changé ma façon d’écrire. Je l’ai trouvé drôle et tragique, j’ai beaucoup ri en le lisant et ce texte est une source infinie d’inspiration. En littérature française, je me souviens très bien me dire, avec La petite communiste qui ne souriait jamais, de Lola Lafon, « mais oui, tu peux faire dialoguer qui tu veux, tu es libre de convoquer qui tu veux ». En la lisant, elle m’a donné une leçon d’écriture. J’aime énormément cette écrivaine, elle est d’une justesse et d’une liberté qui me touchent particulièrement.
Madmoizelle. Qu’est-ce que cela vous procure, d’écrire ?
Sophie Pointurier. Je ne suis pas une spécialiste des relations sociales… écrire me permet de me recentrer, d’être dans une sorte d’état d’esprit méditatif, je peux passer plusieurs heures d’affilées à écrire sans m’en rendre compte. C’est en écrivant que je me sens dans mon élément.
Écrivez le livre que vous avez toujours rêvé de lire, avec les sujets qui vous touchent et que vous maitrisez.
Sophie Pointurier
Madmoizelle. Comment écrivez-vous ? Vous êtes plutôt machine à écrire, papier ou ordinateur ?
Sophie Pointurier. Ordinateur. Je perds tous mes carnets, je n’ai jamais de stylo quand il faut, alors je m’envoie des sms longs comme le bras et une fois sur deux, je n’y comprends plus rien.
Madmoizelle. Un conseil pour les lectrices de Madmoizelle qui aimeraient profiter de l’été pour commencer à écrire ?
Sophie Pointurier. Ne vous autocensurez surtout pas. Si vous voulez écrire un roman, analysez les livres qui vous plaisent ou les films que vous aimez, et regardez comment l’histoire avance et se construit. Écrivez le livre que vous avez toujours rêvé de lire, avec les sujets qui vous touchent et que vous maitrisez. Je ne sais pas s’il y a des recettes miracle pour réussir un roman, je n’y crois pas trop. Personnellement, je ne suis jamais mon plan, mais j’imagine les personnages comme s’ils étaient des souvenirs.
Portrait de Sophie Pointurier en Une : Melania Avanzato
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