En partenariat avec KANA (notre Manifeste)
À l’occasion du partenariat entre Rockie et KANA pour la sortie des cinq tomes du manga Just Not Married, nous vous avons demandé, à vous qui êtes en couple et qui avez décidé de ne pas vous marier, de nous raconter votre histoire.
Selon l’INSEE, le nombre de mariages en France n’a jamais été aussi bas. En 2019, 227 000 mariages ont été célébrés, à 36,1 ans en moyenne pour les femmes et 38,6 ans pour les hommes.
L’union libre est plus largement la norme, puisque plus de 550 000 couples se forment chaque année sans contractualiser la relation, c’est-à-dire sans se marier ou se pacser.
En toute logique, la pression sociale et familiale régresse également, mais comme nous avons pu le lire dans les témoignages que vous nous avez envoyés, elle peut rester toujours présente et vous peser.
Ne pas se marier malgré la pression sociale : un choix
Ritsuko et Shûichi sont les personnages principaux du manga Just Not Married par Higurashi Kinoko. Ils sont ensemble depuis qu’ils sont au lycée, ce qui équivaut pour eux à dix ans de couple et huit ans de vie commune.
Régulièrement, les gens leur posent la question :
Et vous êtes mariés ?
À l’approche de la trentaine, les questions en apparence banales prennent la forme d’une pression récurrente et désagréable.
N’étant pas pressés de faire évoluer leur couple au chapitre des enfants et du mariage, Ritsuko et Shûichi prennent leur temps et décident d’ignorer les remarques implicites ou explicites de leurs proches en menant la barque de leur couple comme ils l’entendent.
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La vie de couple sans mariage, et sans pression familiale
D’après les témoignages que nous avons reçus, un certain nombre de lectrices n’ont pas ressenti de pression de la part de leur famille ou de leurs proches quand elles ont annoncé ne pas vouloir se marier.
Pour Claire, en union libre avec Mathieu depuis environ neuf ans, la notion de non-mariage était une évidence depuis son plus jeune âge. Son père étant « catholique intégriste », le mariage n’était pas une option. Mais c’est après avoir réalisé qu’elle n’était pas croyante que le mariage a perdu tout son sens.
« Malgré cela, personne dans notre entourage ne nous a jamais mis la pression, mais on se sent quand même à contre-courant. »
Pour cette Rockie de 30 ans, en couple depuis quatre année et pacsée, pas de pression non plus du côté de sa famille :
« À part une question posée une fois à un repas dans la famille de mon compagnon au détour de la conversation, à laquelle j’ai répondu que non, je n’avais pas envie de me marier, on n’a jamais dû faire face à une pression ou des remarques par rapport au mariage. Et pas de pression religieuse non plus. Et j’ai beaucoup de raisons de ne pas être intéressée par le mariage en tant que fête, ni en tant qu’institution. »
Pour une autre de nos lectrices, en couple depuis onze ans avec le père de son fils de 4 ans, ne pas se marier n’est pas non plus aller à contre-courant :
« Mes grands-parents ou des amis nous demandent de temps en temps pourquoi on ne se marie pas. En général, nous retournons la question : « Pourquoi devrions-nous nous marier ? » Leurs réponses ne nous donnent pas du tout envie. Pour l’héritage ? On n’a pas de tunes ! Pour faire la fête ? Pas besoin de mariage pour faire la fête. Pour prouver notre amour ? Notre petit garçon est notre plus belle preuve d’amour.
Nous n’avons pas le sentiment d’aller à contre-courant dans notre famille. Les parents de mon compagnon n’ont jamais été mariés, et les miens se sont mariés en tout petit comité pour profiter des baisses d’impôts ! Mais souvent, lorsque nous rencontrons de nouvelles personnes la question revient. »
Pour Aurélie, en couple depuis vingt-trois ans et mère de deux enfants, aborder le sujet du mariage avec son compagnon ou sa famille est plus de l’ordre de la plaisanterie :
« Je pense qu’autour de nous tout le monde a toujours su que nous ne voulions pas nous marier. Parfois sur le ton de la blague, on a pu avoir une petite remarque, mais c’était plus dans le sens « On a envie d’une fête, mariez-vous. »
Il nous a toujours paru inconcevable de dépenser des fortunes juste pour une journée qui promettait beaucoup de contraintes. Parfois, on évoque le mariage en se disant que si nous devions un jour le faire, ce serait sur une île paradisiaque, au bout du monde, accompagnés de quelques amis et de nos enfants.
Mais ça reste toujours sur le ton de la plaisanterie, car même si on allait sur une île paradisiaque, on ne prendrait surement pas le temps de faire ça. »
Mais ce n’est pas le même ressenti pour toutes, malheureusement.
La vie de couple sans mariage, une incompréhension pour le cercle familial
Si les proches peuvent parfaitement s’accommoder d’un non-désir d’union, pour d’autres, la tradition peut être difficile à lâcher. C’est le cas de cette Rockie, pour qui la pression de sa famille est pesante :
« À la question « Et vous ? C’est pour quand ? », notre réponse est sereine mais a souvent mis mal à l’aise des gens qui voulaient essayer de nous convaincre que se marier était indispensable. Certains ont même été assez agressifs, comme si notre choix de ne pas nous marier remettait en cause leurs propres choix. » »
Pour cette lectrice de bientôt 30 ans, pacsée également, la pression du mariage de la part de ses proches est difficile à supporter :
« Nous nous sommes pacsés après le confinement, et ils ont tous considérés et c’était le signe d’un pré-mariage. Ils se sont étonnés que nous n’ayons pas fait de fête spécifique pour cela ! Nous avons déjà subi beaucoup de pression de la part de la société sur le fait de trouver un emploi en CDI, ce que nous avons fait, acheter un bien immobilier, ce que nous essayons de faire tant bien que mal, que nous ne supporterons pas de pression supplémentaire pour le mariage ou le bébé.
Lorsque mes parents sont avec des amis, ils disent souvent « Oh, de toute façon les enfants ne se marieront jamais, ils préfèrent dépenser leur argent dans les voyages. » Cette phrase sonne comme un reproche. »
Enfin pour Aude, en couple depuis treize ans, pacsée et mère de deux enfants, le fait de ne pas être mariée lui donne l’impression que son histoire d’amour n’est pas prise au sérieux par ses proches :
« Notre entourage nous parle souvent du fait qu’on ne soit pas marié, et oui on ressent une pression, mais finalement ce qui me fait le plus souffrir aujourd’hui, ce sont les remarques sur le fait que mon couple ne soit pas un « vrai » couple vu qu’on n’est pas mariés.
Pourtant, je n’ai pas l’impression qu’on aille à contre-courant vu que de plus en plus de couples ne se marient pas, même s’ils ont des enfants. Idéalement, j’aimerais même une fusion entre le Pacs et le mariage avec des options à prendre à la carte, pour construire l’union qui nous va le mieux et donc le contrat qui nous correspond. »
La vie de couple sans mariage, une évidence pour certaines
Nous vous avions également demandé, lors de notre appel à témoignages, si le fait d’être en couple sans envisager de vous marier était une décision prise dès le départ de votre relation, ou si c’était une idée qui s’était imposée d’elle-même.
Pour certaines d’entre vous, dès le départ, le mariage ne faisait pas partie de l’équation, comme nous le raconte cette Rockie de 27 ans, en couple depuis deux ans :
« Pourquoi nous ne nous marions pas ? Car nous tenons à notre couple. Nous observons le changement du mariage au sein des couples qui nous entourent. Un peu superstitieux, nous avons peur que cela perturbe notre harmonie. Nous aimons notre fonctionnement, nous ne voulons pas de petit papier entre nous. »
Pour Aurélie, en couple depuis 23 ans, le mariage n’a jamais vraiment été envisagé :
« Je pense que dès le début de notre histoire et au fil de nos nombreuses discussions, aucun de nous n’a jamais envisagé le mariage comme un but en soi. Je ne me souviens pas étant petite avoir rêvé de mariage, de longue robe blanche.
Souvent, les personnes se marient et puis achètent une maison et puis font des enfants. Nous avons sauté l’étape mariage. Ma famille et ma vie me conviennent telles qu’elles sont et je ne pense pas devoir me marier pour prouver les liens qui nous unissent ou la valeur de notre amour. »
La non-envie de mariage est également une évidence pour cette Rockie de 38 ans, en couple depuis 18 ans avec son compagnon :
« Je n’ai jamais voulu me marier. Petite, je ne me suis jamais imaginée en robe blanche. Il faut dire aussi que mes parents, qui se sont rencontrés dans les années 70, sont restés amoureux trente ans, « jusqu’à ce que la mort les sépare », sans jamais de bagues aux doigts des mains. Même ado, j’étais sûre de moi : ma chanson d’amour préférée c’était « La non demande en mariage » de Brassens et je rêvais d’un « Éternel fiancé »… »
Pour cette Rockie de 32 ans, en couple depuis onze années, le mariage n’est pas du tout d’actualité. Le Pacs a eu plus de succès, et surtout d’un point de vue fiscal :
« La question du mariage a toujours été très claire pour nous deux. Aucun de nous ne souhaite se marier. En effet, ni l’un ni l’autre ne croyons que le mariage soit une preuve d’amour ou de fidélité. Pour nous, le mariage n’est qu’un contrat entre deux personnes. Nous ne nous marierons que si nous y sommes obligés pour des raisons pratiques. Nous nous sommes pacsés en 2015 : pour payer moins d’impôts !
Le véritable engagement, la preuve de notre amour, est bien plus réel qu’un contrat. Notre fils a quatre ans et il est pour nous le témoignage de ce qui nous lie depuis onze ans. »
La vie de couple sans mariage, en écho à la relation de nos parents ?
Dans tous les témoignages que nous avons pu recevoir, on peut y lire et y comprendre que les parents et le schéma familial jouent un grand rôle dans la décision des lectrices de se marier ou non.
Entre traditions, imitation ou au contraire, éloignement total des schémas éducatifs et parentaux, on peut constater que l’influence et la pression parentale déterminent la vision du couple des lecrices interrrogées.
Pour cette Rokie de 28 ans, l’exemple du mariage de ses parents l’a complètement refroidie quant à l’idée de se marier avec son compagnon, même après huit ans de relation.
« Je crois que le fait de ne pas se marier s’est imposé de fait. Les parents de mon compagnon sont mariés et s’aiment encore après 30 ans de mariage ; les miens c’est bien plus compliqué : après 25 ans de mariage, pas un jour ne passe sans qu’ils ne se disputent et se plaignent auprès de leurs enfants du comportement de l’autre.
C’est fatiguant et cela a repoussé progressivement mon envie de mariage. Malgré le fait que j’ai toujours voulu me marier avant d’avoir des enfants et respecter le « schéma classique », j’ai vu mes parents et mes beaux-parents espérer si fort notre mariage que cela m’en a tout simplement dégoûté. »
Pour une autre lectrice, c’est également le même genre de schéma : la vision du mariage dans son cercle familiale a contribué à son dégoût de l’institution :
« Mes parents se sont mariés parce que dans leur famille catholique c’était comme ça, et pas autrement. Ma mère est restée dépendante de mon père financièrement toute sa vie de femme mariée, ou presque. Elle m’a déjà dit qu’elle ne partait pas à cause de l’argent.
Quand mon oncle a voulu divorcer, ça a pris des années tellement ils se déchiraient sur tout. Ça été une expérience profondément destructrice, pour eux, bien sûr, mais aussi pour le reste de la famille. Je n’avais que onze ans quand ça a commencé, mais je m’en souviens encore. Alors, très jeune, je me disais déjà « Mouais, bof, non merci. » »
Etre en couple sans se marier, pour lutter contre une institution mysogyne
Enfin, pour certaines lectrices, ne pas se marier permet de ne pas contribuer à une tradition qui ne respecte pas la femme. Pour cette Rockie de trente ans, refuser de se marier est presque un acte militant :
« Le mariage n’est pas, à mon sens, un engagement plus grand ou plus fort envers la personne qu’on épouse. C’est simplement la reconnaissance légale, sociale et familiale d’une union. Reconnaissance dont on peut maintenant se passer, parce que, c’est merveilleux : on peut vivre ensemble, avoir une vie sexuelle, construire un projet de vie ensemble, avoir des enfants ensemble sans passer par la case mariage.
Les traditions encore suivies aujourd’hui lors des mariages sont là pour prouver que les vieux relents misogynes sont toujours bien en place. Pourquoi seule la femme aurait une bague de fiançailles pour montrer qu’elle est déjà « réservée » et pas l’homme ? Pourquoi quand une femme se marie, elle devrait changer d’identité ?
Pourquoi lorsqu’il se marie, l’homme devient « mari », mais la femme, elle, reste… « femme » ? Parce que sa condition de femme est définie par sa fonction de future épouse, puis de mère ? Pourquoi faudrait-il qu’elle soit vierge, même si aujourd’hui c’est juste symbolique avec la fameuse robe blanche, et pas son cher et tendre ?
Pourquoi faut-il qu’elle soit menée à l’autel par son père, comme pour acter le changement de « propriétaire » ? Pourquoi le futur devrait aller demander « sa main » à son père ? Tout le monde ne le fait pas, mais ça arrive encore « pour la tradition ». Et ainsi de suite. Moi, les traditions, surtout des traditions de ce genre, je n’en suis pas très fan. »
Un grand merci à toutes les lectrices qui ont bien voulu aborder ce sujet personnel et intime avec nous !
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