Près d’un mois après la révocation de l’arrêt Roe vs. Wade qui garantissait le droit à l’avortement aux États-Unis, le Sénat majoritairement Républicain de Caroline du Sud est en cours d’examen d’une proposition loi qui interdirait toute aide apportée à une personne qui chercherait à recourir à un avortement, et qui censurerait notamment le partage d’informations sur internet.
Un projet de loi pour bloquer l’information autour de l’IVG
Le projet de loi S. 1373 ne rendrait pas seulement illégal le fait d’avorter, mais aussi celui d‘offrir des informations sur la manière d’accéder à un avortement, sur internet ou par téléphone. Il deviendrait contraire à la loi d’héberger un site web ou de « proposer tout service sur internet » mettant à disposition des informations qui pourraient « raisonnablement être susceptibles d’être utilisées pour un avortement » à destination des personnes enceintes dans l’État.
Selon le Washington Post, de nombreux universitaires prennent cette proposition de loi comme un présage d’autres mesures qui viseraient à restreindre la communication et l’expression autour de l’IVG. Cette proposition de loi serait par ailleurs basée sur un modèle créé par un groupe anti-avortement (National Right to Life Comitee), et faite pour être reproduite par les législateurs partout à travers le pays sans difficulté.
Lieu d’échange et de transmission d’informations à grande échelle, la liberté et la protection des données privées sur internet sont un enjeu d’ampleur face au recul du droit à l’avortement aux États-Unis. Alors que d’un État à l’autre, les droits des femmes à disposer de leur corps varient, l’accès à des indications fiables sur la marche à suivre en cas de grossesse non désirée peut sauver des vies.
La question de la liberté d’expression sur Internet
Interrogée par le Washington Post, la directrice du centre de biotechnologie et de politique de santé globale de l’école de droit Irvine, Michele Goodwin, souligne que ce projet de loi est anticonstitutionnel. Mais face à l’inertie de certains tribunaux sur la question du droit à l’avortement, y compris avant la révocation de Roe vs. Wade, elle avertit qu’il n’est pas possible de prévoir la réaction des instances légales en charge. Cette incertitude joue en la faveur des censeurs, puisque la peur d’entrer dans l’illégalité pourrait amener des sites web et des entreprises à retirer des informations concernent l’avortement avant même que la loi ne soit officialisée.
Par ailleurs, c’est la question même de la liberté d’expression sur internet qui se pose avec cette proposition de loi. Au pays du premier amendement, le vote d’une telle mesure amènerait avec lui de nombreuses autres questions, comme celle de la responsabilité des entreprises de tech dans le partage de ces informations, la collecte d’historiques de conversations et de données privées dans le cadre d’enquêtes, et les sanctions auxquelles s’exposeraient les individus qui transmettraient des informations sur des IVG désormais illégales.
Si la mesure n’a pas encore été soumise au vote, le National Right to Life Comitee, qui a établi le modèle de ce projet de loi, a fait savoir que la limitation de la communication autour de l’avortement faisait partie de leur bataille pour renforcer les interdictions et restrictions déjà en œuvre sur le territoire américain.
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Crédit photo : Gayatri Malhotra / Unsplash
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