Mieux vaut tard que jamais. Après avoir invisibilisé les réalisatrices pendant d’interminables décennies, les académies des Oscars, de Cannes et de la Mostra de Venise — entre autres — récompensent enfin leur talent.
Audrey Diwan remporte le Lion d’or à la Mostra de Venise pour L’événement
Le 11 septembre, le glamour et renommé festival de la Mostra de Venise a rendu son palmarès. À sa tête, la franco-libanaise Audrey Diwan a remporté le prix le prestigieux Lion d’or pour son film sur l’avortement : L’événement.
Audrey Diwan — dont on connaissait surtout le travail de scénariste, notamment sur les films Mafiosa, La French et BAC Nord — s’est lancée dans la réalisation en 2019 avec le terrible Mais vous êtes fou, et s’offre aujourd’hui, seulement deux ans après, un succès étincelant pour cet essai féministe et bouleversant révélant la jeune actrice franco-roumaine Anamaria Vartolomei.
S’il fait si bon voir une femme, qui plus est une Française, remporter un prix si prestigieux, c’est qu’elles ont longtemps été trop rares, ces réalisatrices à être sacrées pour leur talent.
Les académies régissant les grandes compétitions internationales étant peuplées de vieux croulants bien décidés à rester entre eux, le cercle des femmes couronnées pour leur travail de réalisatrice a donc longtemps été très fermé.
Tristement ironique quand on sait que ce sont précisément les femmes qui ont été les pionnières de Hollywood dans les années 1910, comme l’explique Julia Kuperberg, réalisatrice de Et la femme créa Hollywood, dans une interview donnée à Télérama :
« Nous avons alors découvert que Hollywood a été construit en grande partie par les femmes. Dans les années 1910 et 1920, elles étaient monteuses, productrices, réalisatrices, scénaristes et même, pour certaines, patronnes de studio !
À l’époque, ces femmes étaient extrêmement puissantes. »
Julia Kuperberg
Entre temps, le patriarcat est passé par là, et s’est empressé de tirer la couverture à lui. Mais c’était sans compter sur les mouvements féministes — notamment après #MeToo, né dans le milieu du cinéma — qui, à force de pédagogie, de révoltes et d’entraide, ont su éveiller les consciences et faire bouger les lignes.
Ainsi, 2021 porte plus que jamais les marques de cette lutte pour davantage de parité et de considération. En témoigne la rafle par des femmes des trophées les plus prestigieux dans les festivals d’ici et d’ailleurs.
La Mostra, Cannes et les Oscars : faites place aux femmes
Ça aura pris 28 ans.
28 ans pour qu’une réalisatrice remporte de nouveau la Palme d’Or cannoise, jusque-là seulement attribuée à Jane Campion pour le superbe La leçon de piano, en 1993. Entre-temps, des hommes, tant d’hommes se sont succédés sur les marches du festival, accaparant nominations et statuettes tant convoitées.
Mais cette année, c’est bien une femme, la réalisatrice Julia Ducournau, qui a remporté la Palme d’or pour son film turbulent et fantastique Titane.
Par ailleurs, outre-Atlantique, c’est le superbe Nomadland, de Chloé Zhao, qui a remporté l’Oscar du meilleur film. Succédant à Kathryn Bigelow en 2010, Chloé Zhao est donc la deuxième femme seulement à remporter l’Oscar de la meilleure réalisatrice en 93 ans.
Avant la cérémonie de cette année, seulement cinq femmes avaient été nominées dans cette catégorie : Lina Wertmüller, Jane Campion, Sofia Coppola et Greta Gerwing.
Chloé Zhao est également la première femme racisée et la première femme chinoise à recevoir cette récompense. Elle est aussi la seconde femme de l’histoire sacrée dans la catégorie meilleur réalisateur aux BAFTA et aux DGA.
Il est ahurissant de conclure, en 2021, un article par une phrase telle que « Elle est aussi la seconde femme de l’histoire sacrée dans la catégorie… », mais ainsi va notre monde, et l’important est aujourd’hui de le faire évoluer.
L’année a donc beau n’avoir pas été beaucoup plus clémente avec nous que la précédente, elle demeure toutefois une année charnière pour les réalisatrices et mérite, pour cela, d’être marquée d’une pierre blanche.
Vous finirez bien avec une photo qui met du baume au cœur ? Celle-ci, réunissant Chloé Zhao, Jane Campion, et Audrey Diwan, par exemple ?
On peut le dire, le futur est en marche.
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