— Publié le 29 janvier 2015
Parmi les nouvelles séries de ce début 2015, Empire était l’un des shows qui me tentaient le plus. Du gros drame familial, des histoires de succession et de secrets, le tout dans le milieu du hip-hop ? Je dis, car j’ai soixante-trois ans, banco la caravane.
Voici mon avis sur Empire après trois épisodes de dévorés visionnés !
https://youtu.be/dBzu_jKLJek
Héritages, engueulades et mystères
Le pitch d’Empire est simple et diablement efficace. Lucious Lyon, ancien gamin des rues, puis voyou, est sorti de la misère et des trafics en tous genres grâce à son succès dans le monde du rap. Il a bâti brique après brique Empire Records, un label maintenant solidement reconnu qui engrange des millions de dollars.
Quand il annonce son nouveau projet, l’entrée de son label en Bourse, il apprend souffrir de Sclérose Latérale Amyotrophique, la fameuse « ALS », maladie incurable contre laquelle a été mené cet été le Ice Bucket Challenge. Il lui reste trois ans à vivre, peut-être moins.
Lucious décide donc de choisir, parmi ses trois fils, lequel lui succèdera à la tête de l’empire familial… et ne prend pas de gants pour le leur annoncer. Qui, d’Andre, l’aîné, sérieux businessman sans grand sens artistique, de Jamal, musicien talentueux mais confidentiel et homosexuel, ou de Hakeem, rappeur confirmé mais glandeur, deviendra le nouveau PDG d’Empire Records ?
Cerise sur l’embrouille : la sortie de prison de Cookie, la femme de Lucious (et mère des trois fils), après 17 ans de taule pour trafic de drogues. Ce sont les 400 000$ qu’elle a gagnés en dealant qui ont lancé Empire Records, et elle est bien décidée à réclamer la moitié de ce qu’elle considère comme son entreprise.
La réunion de ces personnages à fort caractère motivés par un enjeu essentiel et des rivalités anciennes donne une tension permanente, un jeu de dupes et de mensonges dans lequel on ne sait jamais trop pour qui prendre parti.
L’univers du rap, qui cumule gros sous, imagerie souvent basée sur des clichés bien macho (grosses voitures, chaîne en or qui brille, et meufs en bikini) et opinion publique encore trop souvent biaisée, est le terreau parfait pour une succession de drames savoureux. Lucious tient à ce que ses fils, et les artistes qu’il produit, donnent une bonne image de son entreprise, car le hip-hop souffre encore de bien des idées reçues… mais lui-même est loin d’être un enfant de chœur.
Une série coup-de-poing qui fait du bien
Empire n’hésite pas à aborder de front des sujets douloureux, en premier lieu l’homophobie toujours bien présente dans le milieu du rap. Jamal, un des trois fils de Lucious (qui fait pas mal penser à Frank Ocean, un rappeur qui a annoncé sa bisexualité il y a quelques années), est homosexuel. S’il n’a pas fait son coming-out « officiel », il vit avec son compagnon et ne se cache pas particulièrement.
Son père ne l’a jamais toléré et refuse de lancer sa carrière tant qu’il ne « choisira » pas une sexualité « normale », alors que sa mère Cookie n’a aucun souci avec son orientation et la voit même comme une force de frappe médiatique.
La série traite aussi de la place des Afro-Américain•e•s dans la société, et des dynamiques de pouvoir qui se construisent autour de la couleur de peau
(Cookie, par exemple, n’est pas ravie que son fils aîné ait épousé une femme blanche). Les disparités sociales sont largement évoquées via des flash-backs montrant la jeunesse difficile de Lucious et son parcours, du trafic de drogues à l’entrée en Bourse.
Enfin, fait assez rare pour être souligné, l’un des personnages principaux est bipolaire (je ne vous dis pas lequel, car on ne l’apprend que dans l’épisode 2). Sa maladie semble traitée d’une façon assez réaliste, bien loin des clichés qu’on voit trop souvent, notamment dans les séries policières.
Pas « bankable », un casting non-blanc ? Tseuh !
Empire est la preuve, s’il en fallait, qu’une série dont 99% des personnages sont Noirs peut marcher à la télévision : le show rencontre un beau succès et a été renouvelé pour une saison 2 dès la diffusion de son deuxième épisode.
Vous voyez toutes ces séries, tous ces films avec un casting très majoritairement blanc dans lequel on met un Afro-Américain en personnage secondaire « histoire de » ? Eh bah Empire, c’est l’inverse ! La seule Blanche-WASP (White Anglo Saxons Protestants, le groupe dominant aux États-Unis) est donc la femme d’Andre, le fils aîné. Même le petit ami de Jamal est latino-américain : il est originaire du Mexique.
Et on s’en fout, en fait. Le public s’en fout. Bien sûr, il doit rester dans le monde quelques personnes bien étroites d’esprit qui seront rebutées par le casting d’Empire… Mais les chiffres prouvent qu’avec une bonne histoire, de bons acteurs et globalement une qualité constante, le public peut tout à fait se passionner et s’identifier à des personnages dont il ne partage pas forcément la couleur de peau.
Prends des notes, Hollywood.
Bordel, quand on rentre sur la piste
Mais c’est que j’ai failli boucler mon article sur Empire sans vous parler de la musique ! Quelle zozo je fais.
https://youtu.be/nPHKRcNU-UY
Derrière les sons puissants et les lyrics de ouf d’Empire, on trouve un p’tit jeune qui n’en veut, un certain Timbaland, JUSTE un des plus grands pontes du hip-hop outre-Atlantique. Du coup, quand les personnages de la série se produisent sur scène, improvisent ou enregistrent un morceau, c’est pas vraiment Amandine du 38 : ça envoie du très très lourd.
Dans une démarche très « mise en abîme », Timbaland a même collé dans Empire l’une des artistes signées sur son propre label, la talentueuse V. Bozeman qui a les honneurs d’ouvrir le pilote de la série. Sa voix vibrante et ses paroles émouvantes reviennent à plusieurs reprises, car la chanteuse est aussi actrice et devient un personnage à part entière au fil des épisodes.
Je vous laisse écouter son opening de l’épisode 1, et si ça ne vous donne pas envie de dévorer le reste, je ne m’appelle plus Mymy.
https://youtu.be/5v1DfH6AVPs
En résumé, si vous aimez les grands drames familiaux, le hip-hop et les séries de qualité portées par des acteurs et actrices bourrées de talent, ne manquez pas Empire !
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