Est-ce qu’Emmanuel Macron est sérieusement en train d’envisager de faire passer les jeunes à 45 heures de travail par semaine ?
Je vous pose la question, car cette semaine justement, c’est la rumeur qui a circulé un peu partout.
C’est vrai, après tout : oui, les lycéens et les étudiants ont vu leur scolarité complètement bouleversée par une crise sanitaire, sans parler de leur vie sociale, et donc, le meilleur moyen de leur remonter le moral et de leur redonner foi en l’avenir, c’est certainement de leur faire miroiter un futur radieux où ils pourront essentiellement travailler… et dormir.
Anxieux comme on est toutes et tous en ce moment, je ne sais même pas si dormir est encore une option envisageable.
Mais revenons à cette rumeur :
L’info vient du site de Marianne où l’on peut lire ces propos rapportés :
« On peut accepter de travailler 45 heures par semaine quand on a 25 ans, puis réduire son temps de travail quand on a des enfants ou quand on est senior. »
Première chose, la phrase ne vient pas de Macron lui-même, mais d’un cadre LREM cité par l’hebdomadaire.
Personnellement j’approche des 35 ans, et ça m’embêterait bien que sous prétexte de ne pas avoir de gosses, je sacrifie mon temps libre et mon énergie à mon travail.
J’aime beaucoup mon travail, mais c’est juste un travail, et donc pas le centre de ma vie !
Enfin, plus j’y réfléchis, plus je me dis que ce n’est peut-être pas si saugrenu cette histoire de bosser plus à 25 ans. Bah oui, quoi de mieux qu’un burn-out dans la vingtaine pour être bien rodé pour l’avenir, pour bien comprendre comment le monde du travail peut vous rétamer la tronche et broyer tout votre amour propre ?
Comment on dit déjà ? Ah oui : ce qui ne tue pas rend plus fort.
Limite, on devrait pouvoir mettre qu’on a fait un burn out dans son CV, dans Expériences professionnelles, ou même dans Compétences.
Trêve de plaisanterie sur le burn out. Il est quand même incroyable qu’à l’heure où l’on songe de plus en plus à repenser la manière dont on travaille – merci la pandémie, merci ses confinements et couvre-feux successifs, merci les grandeurs et misères du télétravail – on arrive à remettre sur le tapis l’idée de… travailler davantage.
Histoire d’en rajouter une couche après la fameuse citation du cadre LREM, Twitter nous a ressorti des archives la vidéo où l’on entend Emmanuel Macron himself en train d’en discuter avec Daniel Cohn Bendit.
Rappelons quand même que cette séquence qui a beaucoup tourné sur Twitter n’est pas récente, elle date de 2016, et est extraite du docu Emmanuel Macron – les coulisses d’une victoire.
Évidemment, avec ces propos rapportés d’un proche du président dans Marianne, puis avec cette courte vidéo exhumée, on se dit que l’idée d’un passage aux 45h pour les jeunes actifs pourrait très bien sortir du chapeau d’Emmanuel Macron.
Est-ce qu’il veut réellement nous faire bosser plus ? Pour le moment, Macron n’est pas encore candidat à sa propre succession, et n’a donc rien dévoilé de ce qui pourrait être son programme.
Mais évidemment certains s’en sont inquiétés, ou au contraire ont trouvé l’idée très séduisante. Je soupçonne ces derniers d’être des hommes qui n’assurent pas un cachou en termes de travail domestique et qui n’ont rien contre passer plus de temps devant leur ordinateur. Mais c’est une appréciation toute personnelle.
Je ne sais pas pour vous, mais personnellement, plus le temps passe, plus je me dis qu’on gagnerait collectivement à envisager de bosser moins. Et qu’on aurait tort de mettre la variable d’ajustement à l’âge ou au fait d’avoir des enfants.
Selon un sondage réalisé dans plusieurs pays européens en 2019, donc avant la pandémie, 60 % des salariés français sont favorables à un passage à la semaine de 4 jours, sans baisse de salaire.
Oui, oui : sans baisse de salaire.
« 1 million 600 000 emplois pourraient être créés sur le territoire, si toutes les entreprises françaises passaient en 4 jours travaillés », assure aussi un fervent défenseur de la semaine à 4 jours et candidat à la primaire populaire Pierre Larrouturou.
Des avantages individuels pour profiter d’un meilleur équilibre entre sa vie pro et sa vie perso, qui auraient des conséquences pour toute la société. Oui, sur le papier, la semaine de 4 jours, moi, ça me fait un peu rêver.
Certes, on est censé déborder d’énergie, quand on a 25 ans, mais est-ce qu’on a envie qu’elle soit toute entière absorbée par le travail ? Qu’est-ce qui nous reste quand on bosse 45h par semaine ?
Et puis tout le monde n’a pas envie de caler son rythme sur celui d’Emmanuel Macron, qui bosse, selon ses collaborateurs, jusqu’à 1h30 du matin pour se remettre au boulot vers 6h30.
Il serait temps d’ailleurs de se demander pourquoi on valorise autant l’idée de travailler le plus possible quitte à s’épuiser, comme si c’était synonyme de réussite. Pourquoi c’est si bien vu socialement de dire que l’on travaille beaucoup, que l’on est sous l’eau, qu’on croule sous les doss ?
Et si on valorisait plutôt l’idée de ne pas vouloir se tuer à la tâche, de ne pas se flinguer la santé avec des horaires délirants ?
Ce serait quand même une perspective d’avenir un peu moins anxiogène, et par les temps qui courent, franchement, je suis preneuse.
Un coup de pied dans les urnes est un podcast de Madmoizelle écrit et présenté par Maëlle Le Corre. Réalisation, musique et édition : Mathis Grosos. Rédaction en chef : Mymy Haegel. Direction de la rédaction : Mélanie Wanga. Direction générale : Marine Normand.
Crédit photo : TF1 (capture)
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Bah cette autorisation c'est juste une pauvre signature en fin de mois quand on nous donne notre décompte d'heures.
Donc on peut prendre des jours de compensation (oh jamais on ne nous les payera !) mais il n'empêche que je suis éreintée. Même si je commence à 8h et que je n'ai pas beaucoup de trajet je rentre vers 18h / 18h30 (les pauses de midi ne sont culturellement pas aussi longues qu'en France) et je suis juste HS. Je finis donc par passer mes soirées à comater devant la télé, puis je vais dormir, puis je retourne au travail.
Toujours est-il que je suis totalement contre 45 heures de travail par semaine. Désolée mais que ce soit sur une journée de 7, 8 ou 9 heures on n'est PAS efficaces 100 % du temps. Perso je suis convaincue qu'en 6 ou 7h je réussirais à faire la même quantité car pas de moments où on a besoin de faire une pause parce que le cerveau ne suit plus.
En tout cas cette société capitaliste va nous essorer au maximum jusqu'à qu'on n'ait plus que des générations anxieuses, dépressives et fatiguées. Je ne dis pas qu'avant c'était plus simple, mon grand-père était mécanicien et bossait parfois aussi 10h par jour. Mais avec les moyens informatiques, des informations partout et tout le temps... Bref je m'égare mais j'en ai gros sur la patate.