Récemment, la Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes s’est exprimée au sujet de l’éducation sexuelle à l’école.
Contrairement à ce que certains médias ont annoncé, elle n’a pas « fait entrer le sujet au programme », non : Marlène Schiappa a simplement réaffirmé la loi qui existe déjà, et prévoit 3 séances par an, au collège et au lycée.
Ces moments d’information et de dialogue seront gérés par des associations agréées pour l’intervention en milieu scolaire, donc ce ne sera pas aux profs de SVT de suivre une formation spécifique.
Comme à chaque fois que le sujet vient sur le tapis, de nombreuses personnes expriment leur désaccord, estimant que ce n’est pas à l’Éducation Nationale de parler sexualité.
Je suis SI PEU D’ACCORD.
L’éducation sexuelle à l’école est nécessaire
La sexualité ne commence pas, magiquement, à l’heure où on se sent « adulte », mature.
Le dossier d’Esther portant sur les agressions sexuelles entre enfants est un douloureux rappel que le corps doit être un sujet de discussion, et ce dès le plus jeune âge.
L’école forme des citoyen·nes, enseigne le vivre-ensemble, apprend à grandir en société, entouré·e de pairs qu’il faut respecter.
Au nom de quel puritanisme refuserait-on de laisser l’école parler de sexualité, alors même qu’entre ses murs, des enfants et ados sont victimes de violences sexuelles ?
Les ados parlent déjà de sexualité, autant libérer leur parole
Vous êtes, ou vous avez été au collège et au lycée. Moi aussi. Je ne pense pas que nos expériences sont différentes.
Des bites gravées sur les tables au slut-shaming ambiant, des fantasmes issus du porno à la méconnaissance totale des moyens de contraception, la sexualité était DÉJÀ un sujet.
Mais elle l’était entre élèves de 14 ans qui n’en savaient pas plus que leur voisin·e, avec aucun·e adulte pour les éclairer. Ah, si, un cousin ou une cousine plus âgée, qui a déjà couché…
Plus on approchait du bac, plus nombreuses étaient les filles ayant déjà été chez le gynéco et ayant parfois osé poser des questions. Leurs réponses, pour les autres adolescentes, étaient précieuses.
Ça changeait du Dico des Filles.
Heureusement maintenant il y a la Boîte à Q de QueenCamille
Chez les garçons, point d’urologue annuel : aucun médecin ne leur a enseigné la façon dont fonctionnait leur pénis. Et ce n’est pas l’arrivée de YouPorn qui les a éduqués…
Ma mère en prof de sexualité ? Grands dieux, non !
Certes, nous avions tous et toutes des adultes dans notre entourage. Mais leur propre éducation à la sexualité laisse clairement à désirer !
Ma mère pensait toujours, en 2011, que les tampons sont réservés aux filles ayant perdu leur virginité. Celle d’une amie a poussé de hauts cris, maudissant ce DIU qui, c’était sûr, allait rendre sa chère enfant stérile.
Mon père, devant moi, n’a jamais prononcé le mot « sexualité ». Dans ma famille, c’est simple : le sujet n’existe pas.
Et en même temps… c’est pas leur faute s’ils n’ont pas reçu cette éducation que je réclame aujourd’hui pour la génération 2000 !
Ses trois filles ont bien grandi, et ma mère n’a pas pour priorité de se tenir au courant des évolutions en matière de contraception. C’est plus de son âge !
Les parents ne sont pas des profs, car c’est un métier, vous savez
Être parent, ce n’est pas devenir par magie expert·e en sexualité, en amour, en consentement.
Comment voulez-vous qu’un père qui a toujours dit « Allez fiston, fais un bisou à la dame, tu vas la vexer » soit le plus à même d’enseigner que « non c’est non » ?
Comment voulez-vous qu’un duo de parents en couple exclusif depuis 30 ans soit au fait des dynamiques de plan cul
, de relation libre, de polyamour ?
Comment voulez-vous qu’une mère n’ayant jamais mis un pied sur Adopte Un Mec pige les subtilités de Tinder, des nudes sur Snapchat, du revenge porn ?
Le monde change à une vitesse folle ; la vie des ados d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec la mienne à leur âge. Pourtant je ne suis pas si vieille, et toujours nullipare…
Tout le monde n’a pas deux parents éduqués, disponibles et pédagogues
Je rappelle aussi en passant que certains élèves n’ont pas la chance d’avoir des parents présents.
L’autre jour, une jeune fille de 17 ans dont je suis proche a juré qu’elle n’irait jamais voir de gynéco, terrorisée par les articles sur les violences gynécologiques.
J’étais là pour lui en parler, et essayer de la rassurer. Car sa mère n’est plus là, emportée par un cancer. Son père n’y connaît rien.
Il existe aussi des parents en vie, mais pas présents. Démissionnaires, fourbus de fatigue à force d’enchaîner les jobs pour joindre les deux bouts, malades, rarement là…
S’abonner à la chaîne YouTube de Martin Winckler, médecin bienveillant, n’est probablement pas leur premier réflexe.
Et c’est pas grave : je compte sur l’Éducation Nationale pour prêcher la bonne parole.
La sexualité est un sujet trop sérieux pour qu’on le laisse à n’importe qui
J’ai des potes trentenaires qui apprennent en 2018 que le « retrait » n’est pas une méthode de contraception fiable car le liquide pré-séminal peut contenir des spermatozoïdes.
Je vois des mecs sur Twitter demander comment font les filles pour porter un tampon et faire pipi en même temps (spoiler : l’urètre et le vagin c’est pas pareil).
Je facepalm devant des gens qui mettent de l’eau, de la vapeur, des nids de guêpe (oui) dans leur vagin pour le nettoyer, alors qu’il le fait très bien tout seul.
J’ai des copines qui enchaînent les infections urinaires mais ne savent toujours pas qu’il vaut mieux faire pipi après un rapport sexuel, pour entraîner vers la sortie les potentielles bactéries.
Et encore, je ne vous parle même pas de consentement, de « zone grise », de sexualité positive, simplement de santé, de biologie basique.
Je connais de formidables personnes dans de formidables assos qui font un formidable travail de pédagogie ludique, exhaustif et adapté aux plus jeunes autour de la sexualité.
Filez-leur des contrats, vraiment. Mes parents ne m’ont pas appris à lire, ni à compter, ni à gérer ma sexualité… pourtant, maintenant que je suis adulte, je sais faire tout ça.
Et pour le dernier point, j’en aurais bien eu besoin plus tôt.
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N’hésite pas à y répondre pour que la rédac puisse également répondre à tes potentielles questions, tes doutes, tes interrogations sur ce vaste sujet !
Ce questionnaire a deux buts :
- Récolter un maximum de témoignages pour cibler les questions et zones d’ombres récurrentes chez les lectrices
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