— Initialement publié le 16 mai 2013
Londres, c’est une destination à la mode. Tout le monde connaît Londres, tout le monde est allé à Londres, alors forcément, tout le monde s’en tamponne la partie la plus charnue de son individu, que je vive à Londres. Quand on vit en France, Londres, c’est quoi ? Une heure d’avion ? Quelques heures en Eurostar, et voilà les Primark d’Oxford Street (déconnez pas, toutes les Françaises campent là-bas, vous me la faites pas à moi), la fontaine pleine de touristes de Piccadilly Circus, la Tour de Londres, la maison de la reine, et j’en passe et des meilleures.
Mais à trop regarder les paillettes, on en oublie la face cachée, le côté obscur, que dis-je, la pègre de cette éblouissante (quoiqu’un peu grise) cité.
Les écureuils (gris) anglais, particulièrement de Londres.
Et ce sont des monstres.
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Alors, je sais bien que je passe pour une douce ahurie à chaque fois que je remets le sujet sur le tapis, que je fais bien rire pendant les repas (après un ou deux verres mais là n’est pas la question) et que, nan mais tu sais, à Londres ils ont surtout un problème avec les renards, les maladies, tout ça… mais c’est un fait : les écureuils de Londres sont des petites putes, qui vous boufferaient du renard au p’tit déj’ si ces derniers n’avaient pas compris le truc et ne se planquaient pas aussi bien.
(Quoi, vous croyiez que c’était vous qu’ils cherchaient à éviter ? Pauvres naïfs.)
Les écureuils anglais n’ont pas peur de vous
Mon premier contact avec la bête remonte maintenant à quelques mois. Fraîchement installée dans la capitale de tendre Albion, je découvrais chaque petit pavé, chaque joli parc, chaque bar, avec émerveillement. Ce jour-là ne faisait pas exception à la règle de la nouvelle Londonienne pas encore blasée, et j’avais rendez-vous avec d’autres amis touristes à Piccadilly Circus (tip : ou comment tourner autour d’une fontaine pendant dix minutes sans se rejoindre : trouvez un autre point de rendez-vous).
Comme pour insister sur le fait que c’était un point de rendez-vous pourri, le sort fit que la newbie que j’étais s’emmêla quelque peu dans les lignes de métro, et, en bref, je décidai de descendre à St James’ Park, et de rejoindre Piccadilly à pieds. Il faisait beau, l’automne naissant avait fait rougir les arbres, je n’étais donc pas si mécontente de devoir rattraper mon retard en traversant le parc au pas de course.
Grossière erreur. Car ce jour-là, il était pressé aussi.
The horror.
Une noisette lui avait échappé ou quelqu’un lui avait piqué ses glands, je l’ignore ! Mais ça l’avait mis de méchante humeur. Quelques jours plus tard, je tente d’exorciser le traumatisme en résumant la chose de la sorte sur mon blog :
« J’étais assez pressée, mais lui aussi. J’arrivais sur le petit chemin et il s’apprêtait à le traverser. Fatalement, ce qui devait arriver arriva : il y eut collision. Et collision violente, sinon c’est pas drôle.
Pas eu le temps de m’excuser, pas même eu le temps d’essayer de déterminer ce qu’il se passait et à qui la faute, parce qu’il était déjà en train de m’engueuler. De. M’engueuler. (…) J’ai pas tout compris à ce qu’il m’a sorti, pour être honnête, mais je crois que c’était pas très aimable, et à un moment il me semble qu’il a failli essayer de m’en coller une.
Puis il s’est arrêté, a redressé fièrement la tête et m’a regardée l’air de dire « bon, ça va pour cette fois, file », a attendu que je passe en surveillant attentivement le moindre de mes gestes, et il a repris sa route pendant que je me dévissais la tête, toujours ahurie, pour le voir partir. Je n’avais toujours pas bien compris ce qu’il venait de se passer, et je devais avoir un air un peu con. »
Imaginez vous faire engueuler par Tic de Tic & Tac. (C’est le plus teigneux.)
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Écureuils : 342 – Dignité : 0Puis un pote à lui rappliqua sur un signal secret et je préférai battre en retraite.
Écureuils : 343 – Dignité : -12
Ce jour-là, accompagnée de deux amies en visite, j’avais voulu passer par Hyde Park et en profiter pour leur montrer que je ne délirais pas. Il faisait froid, mais ces écureuils anglais ne craignent rien et ils étaient tous là quand même, ces sales bêtes étant des mutants qui n’hibernent pas. Prenant mon courage à deux mains, j’en ai apostrophé un, qui traînait plus loin sous un arbre, en tendant la main (que j’avais d’ailleurs fort tremblante) comme si j’avais un truc à manger dedans.
Ni une, ni deux, le ventre sur papattes a franchi le mur du son pour sauter sur la rambarde en face de moi, la patte griffue en avant, et le tremblement de son postérieur montrant combien il était prêt à me sauter à la gueule si je ne lâchais pas effectivement un truc à manger dans les secondes qui suivaient. Ah ça, mes potes, elles ont… elles ont… elles ont pris des photos en rigolant. Mais n’empêche que si je ne m’étais pas barrée en courant à la dernière minute, je me serais faite bouffer par un rongeur qui en a vu d’autres.
Pendant ce temps-là, un collègue à lui escaladait un couple en train de se bécoter.
Merci à l’héroïque BV pour la photo.
Les écureuils anglais sont mignons
Mais enfin, ce qui fait vraiment leur force, à ces gangsters à poil gris, ce n’est pas tant leur immense réseau mafieux qui s’étend sur tout Londres, ni leur assurance déroutante ou le fait qu’ils s’en battent les noisettes que tu sois là ou pas si tu n’as rien à manger sur toi (au point de te prendre pour un arbre, à l’occasion). Ce qui fait leur force, et ça m’arrache les boyaux de l’avouer, c’est qu’ils sont mignons. MIGNONS.
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Non mais vous les avez vu, ces salopards, avec leur petite bouille, et leur queue-queue toute fluffy et leurs papattes toutes menues ?!
Parce que lorsque je suis avec des élèves (oui, alors, parce que je suis prof) (assistante) (bref) dans mon bureau face à une grande fenêtre donnant sur un parc, et que ces connards se mettent sans prévenir à se courir après dans un arbre en effectuant des petits bonds gracieux, et m’arrachent donc sys-té-ma-ti-quement un « Iiih ils sont trop mignooons » entre deux points de grammaire française…
… je suis prête à parier que ce n’est qu’un autre de leurs complots pour tenter de nuire à ma crédibilité.
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