N’est pas drôle qui veut.
La preuve avec Norman par exemple, dont le dernier spectacle est davantage vecteur d’effroi que d’amusement. La preuve également avec la filmographie entière d’Éric Fraticelli.
La comédie, c’est un art risqué qui peut vite avoir l’effet inverse de celui escompté. Alors justement, Drôle, la nouvelle série de Fanny Herrero, est t-elle à la hauteur de son titre ?
Drôle, les turpitudes du milieu du stand-up
Aïssatou (Mariama Gueye), Bling (Jean Siuen), Nazir (Younès Boucif) et Apolline (Elsa Guedj) ne rêvent que d’une chose : faire carrière sur les planches.
Non pas en déclamant du Shakespeare dans des toges en toile de jute mais en faisant marrer les amateurs d’humour de notre belle capitale, notamment au Drôle, un plateau de stand-up où a du mal à officier son propre patron, Bling, empêtré dans la cocaïne et le manque de confiance en lui.
Alors que les liens entre ces 4 humoristes se font et se défont, c’est tout le paysage de la jungle des plateaux de stand-up parisiens qui défile, avec ce qu’elle contient de galères, de désillusions mais aussi d’espoirs et de conquêtes.
Fanny Herrero, désormais mondialement célèbre grâce à l’exportation réussie de sa série Dix pour Cent, suit les comédiens sur scène où ils testent et peaufinent leurs meilleurs sketchs, mais aussi chez eux, dans leurs foyers et leurs névroses.
Drôle, c’est une série qui peut faire rire, si l’on est client du stand-up, mais qui surtout ne fait pas que cela.
C’est d’ailleurs quand elle est le moins drôle qu’elle est la meilleure, cette série Netflix en 6 épisodes.
Drôle, et le drame des artistes
En effet, si Drôle construit ses fondations sur un terre-plein de vannes, qu’enchaînent les protagonistes sur scène et ailleurs en réussissant la plupart du temps à faire au moins sourire, grâce notamment à la plume de Shirley Souagnon, Jason Brokerss, Thomas Wiesel et Fanny Ruwet, humoristes confirmés qui sont venus mettre leur grain de sel à l’écriture du programme, Drôle est surtout une série sur les affres du métier d’humoriste.
Une ode aux clowns tristes qui tentent de percer, là où tant échouent. Comme l’avait souligné Fanny Herrero dans les notes de production du programme :
« Drôle, il faut le prendre dans tous les sens. “Drôle” comme ce qui fait rire, évidemment, mais aussi “Drôle” comme ”étrange”, “singulier”, qui ne ressemble pas aux autres. »
Ainsi, Drôle parle aussi et avant tout de la singularité du métier d’humoriste qui consiste à se foutre à poil tous les jours devant un public d’inconnus.
Un risque, une adrénaline, une drogue finalement, après laquelle courent nos 4 héros, dont il nous faut préciser qu’ils ont été particulièrement bien castés, au point qu’on finit par ne plus voir les acteurs jouer, qu’on les identifie désormais à leurs personnages.
L’origine de Drôle
Pour nourrir son programme, Fanny Herrero s’est entourée des meilleurs. C’est même avec l’un des meilleurs du métier que la scénariste a eu l’idée de sa série :
« Je n’étais encore jamais allée dans un comedy-club, je ne savais pas ce qu’était un plateau. J’ai suivi Gad au Paname [comedy-club du 11e arrondissement de Paris, ndlr] et là j’ai eu une révélation à la fois émotionnelle et artistique. »
Par la suite, la scénariste est allée disséquer les rouages de ce métier si particulier en écumant les plateaux de la capitale, et en s’inspirant de ce qu’elle y voyait.
En résulte une série dont le naturel est sans doute le premier charme. Un charme malheureusement rompu par la prévisibilité du moindre arc narratif, qui ne laisse aucun suspens et crée un manque d’enjeu véritablement problématique.
Ainsi, et si chacun des personnages a plus d’une corde à leur arc que leur histoire, il n’en demeure pas moins que rien ne les relie suffisamment les uns aux autres, tant et si bien qu’on finit par s’ennuyer et se défaire de notre affection pour eux.
Vraiment dommage car le casting est tout à fait exaltant, comprenant de jeunes acteurs prodigieux, et a le mérite de célébrer la même diversité qui foule pour de vrai les plateaux de stand-up parisiens.
Si l’on n’a pas ri de bout en bout et qu’on a décelé un manque de travail au niveau des enjeux communs des personnages, il serait toutefois malhonnête de prétendre qu’on a pas pris de plaisir devant Drôle, d’autant qu’au regard des autres séries françaises, elle en impose.
Jusqu’à relancer un peu la réputation du catalogue hexagonal de Netflix, qui jusqu’alors faisait peine à voir avec ses Marseille et autres Plan Cœur.
Comme quoi Fanny Herrero, et en dépit des défauts de son programme, demeure notre phare dans la nuit.
À lire aussi : Drôle, la nouvelle série de la créatrice de Dix pour Cent, est dispo sur Netflix
Crédit de photo à la Une : Drôle via Netflix
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Les Commentaires
Je m'attendais à quelque chose de pas très drôle et vite oublié sur le sujet du stand-up qui m'indiffère (comme ''Jeune et golri''). Mais quelle bonne surprise ! Le sujet ne m'intéresse pas plus qu'avant, mais c'est frais, bien joué, et tout simplement drôle !