Cet article a été initialement publié le 29 avril 2015, pour les 70 ans du droit de vote des femmes en France.
Le 29 avril 2020, nous fêtons les 75 ans du droit de vote des femmes, l’occasion de lire ou relire ce morceau d’histoire !
Le 29 avril 2020 est la date anniversaire d’une grande première.
Le 29 avril 1945, il y a 75 ans jour pour jour, soit un âge qui paraît canonique mais est plutôt jeune au regard de l’Histoire, les femmes françaises ont pu voter et être candidates pour la première fois à une élection politique !
Si ce droit n’est plus contesté aujourd’hui, il a pourtant été l’objet d’un long combat. Plus d’un siècle s’est écoulé entre la première fois qu’un homme a mis un bulletin dans l’urne, en 1848, et la première fois qu’une femme a fait le même geste !
Et surtout, le droit de vote des femmes n’est qu’une petite brique du grand mur de l’égalité hommes-femmes en politique. D’autres sujet font encore l’objet d’une lutte aujourd’hui : le sexisme en politique, la parité parmi les élu•e•s…
Le droit de vote, un droit « conquis, pas donné »
Le droit de vote des femmes était déjà autorisé dans un grand nombre de pays lorsque la France s’est enfin décidée à en faire autant en 1945.
Mais ce droit, les Françaises le réclamaient depuis très longtemps ! L’une des toutes premières femmes à élever la voix a été Olympe de Gouges, qui est aussi à l’origine de la Déclaration des droits de la Femme et de la citoyenne.
Mais lorsque le droit de vote est accordé aux citoyens en 1848, il ne concerne que les hommes ! Glamour rappelle d’ailleurs qu’à l’époque, le journal féministe La Voix des Femmes a encouragé l’écrivain George Sand à se présenter aux élections législatives.
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En 1849, lorsque la féministe Jeanne Deroin a fait acte de candidature aux élections législatives, elle a été tournée en dérision par la presse.
Mais les Françaises n’ont pas renoncé pour autant : en 1868, elles ont été une vingtaine à diffuser un manifeste réclamant le droit de vote, appuyé par le journal L’Opinion nationale.
La première vraie proposition de loi pour accorder le droit de vote aux femmes a été déposée en 1901, mais elle ne concernait à l’époque que certains profils : les femmes majeures et célibataires, veuves ou divorcées. Une manifestation a lieu à Paris en 1908 en faveur du droit des femmes.
C’est aussi à cette période que les suffragistes, les mouvements qui réclament ce droit, s’activent : en 1914, ils réunissent 505 972 « oui » lors d’un plébiscite pour le vote des femmes.
Les propositions se sont succédées jusqu’en 1936, mais à chaque fois que la Chambre des députés s’est prononcée en faveur du droit de vote des femmes, le Sénat a refusé d’examiner les textes, comme le raconte L’Humanité.
Le journal relève quand même une anecdote : en 1925, le Parti communiste français a repéré une faille dans la réglementation qui lui a permis de présenter des candidates aux municipales en banlieue parisienne. Mais leur élection a vite été annulée par les tribunaux.
29 avril 1945, le premier vote des femmes
Ce droit de vote a finalement été accordé aux citoyennes françaises par une ordonnance du gouvernement provisoire mené par le général de Gaulle, installé à Alger, le 21 avril 1944 — le gouvernement actuel a d’ailleurs mis en ligne le texte original.
Mais ce n’est qu’un an plus tard, le 29 avril 1945, que les femmes françaises ont voté pour la première fois, en l’occurrence à l’occasion des élections municipales.
C’était aussi la première fois qu’il était possible d’élire une femme en France à un poste politique.
Même s’il s’agit d’un énorme progrès pour les droits des femmes, ses retombées étaient à relativiser aussi à l’époque. Car il ne suffit pas d’avoir le droit de voter, il faut aussi savoir comment exercer ce droit et pourquoi.
Et malheureusement, comme l’explique Metronews, en 1945 :
« Les femmes, qui n’ont pas encore la culture du vote, sont plus tentées par l’abstention que la participation. »
Sur Slate, Camille Jourdan rappelait en 2014, via les témoignages de femmes qui ont participé à ce fameux vote, que très peu de femmes étaient actives en politique à l’époque :
« À droite comme à gauche, très peu de femmes étaient alors engagées en politique. Rolande Trempé et Odette Roux, au PC, Etiennette Clauzure, au Parti radical, et Henriette Eliseche, qui avait tenté de battre le maire de sa commune, faisaient donc partie de ces « rares femmes ». Odette raconte:
« Une femme qui s’occupait de politique, dans l’esprit des gens bornés, c’était fatalement une femme dont la vie n’était pas correcte. »
En 1945, elles n’ont donc été qu’environ 3% de conseillères municipales élues après ce suffrage.
Les citoyens et citoyennes françaises ont revoté en octobre de la même année pour élire l’Assemblée constituante, et là encore, les femmes n’ont représenté que 3% des élus.
Des lois pour la parité
Et les progrès ont été longs à arriver, avec plus ou moins de remous. Selon Françoise Picq, spécialiste de l’histoire du féminisme citée par l’AFP :
« On a assisté entre 1945 et les années 1990 à une baisse permanente du nombre de femmes élues à l’Assemblée nationale. »
À l’occasion de l’anniversaire du premier vote des femmes en France, Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et ex-ministre des Droits des Femmes, a d’ailleurs remis en avant une vidéo qui retrace les différentes avancées des droits des femmes en politique.
En 2000, la France a adopté la loi sur la parité, qui instaure l’égalité entre les hommes et les femmes dans la vie publique.
Elle impose notamment que les listes présentés par les partis politiques lors des scrutins soient constituées du même nombre d’hommes et de femmes, et ceux qui ne respectent pas cette mesure se voient sanctionnés d’une amende.
En 2008, le premier article de la Constitution a été modifié, pour affirmer que :
« la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »
Le 28 janvier 2015, enfin, l’Assemblée nationale a définitivement adopté la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui entend notamment généraliser la parité dans toutes les sphères de la société.
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L’égalité hommes-femmes en politique, c’est pas gagné
Aujourd’hui encore, les chiffres de participation des femmes et ceux du nombre d’élues sont plus élevés, mais la place des femmes en politique en France reste fragile.
La France n’a jamais eu de femme présidente de la République, même si Ségolène Royal est arrivée au second tour des élections présidentielles en 2007.
Le gouvernement de François Hollande formé en 2012, a été le tout premier à être véritablement paritaire, c’est-à-dire à compter autant d’hommes que de femmes — en prenant en compte à la fois les secrétaires d’État et les ministres.
Il a aussi remis en avant le ministère des Droits des Femmes, créé par François Mitterrand en 1981 sous le nom de ministère délégué aux Droits de la femme.
Marc Fauvelle dans son édito du 29 avril 2015 sur France Inter se montre très pessimiste, et décrit cette composition du gouvernement comme un « cache-sexe » des autres paliers de la politique, dans laquelle les femmes sont encore sous-représentées, tout en se désolant :
« Ce n’est pas faute d’avoir voté des lois, affiché des grands principes. »
Il martèle :
« La parité, aujourd’hui, est un mythe à quelques exceptions près. »
Si une loi votée en août 2014 a renforcé les sanctions financières pour les partis politiques qui ne respectent pas la parité sur les listes présentées aux élections, Marc Fauvelle rappelle que certains partis et notamment l’UMP, ont préféré payer les amendes plutôt que de respecter ces recommandations lors des élections législatives de 2012.
Malheureusement, ces mesures semblent encore nécessaires pour assurer la présence plus importante des femmes en politique. Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a ainsi relevé dans un rapport paru en février 2015 :
« L’égal accès entre les femmes et les hommes n’est pas une réalité pour tous les mandats électoraux et fonctions électives :
- En l’absence de contrainte légale, les hommes sont très majoritaires parmi les maires, les président-e-s de conseils départementaux, régionaux ou les président-e-s d’intercommunalité.
- En présence d’incitation légale, telles que les retenues financières pour non présentation de candidatures paritaires aux élections législatives, les résultats sont peu probants.
- En présence de contrainte légale, les femmes représentent à peu près la moitié des élu-e-s, comme au sein des conseils municipaux des communes de 1 000 habitant-e-s et plus ou dans les conseils régionaux. »
Les chiffres le montrent bien, en 2015, nous étions encore très loin de l’égalité réelle en politique en France. Les femmes représentaient :
- 27% des députés à l’Assemblée nationale
- 25,4% des membres du Sénat
- 16% des maires
Si elle a constaté des progrès, Pascale Boistard, la secrétaire d’État aux Droits des Femmes, a expliqué sur iTélé que ceux-ci restent limités.
Dans les conseils départementaux notamment, l’obligation de présenter des binômes hommes-femmes aux élections a permis une présence plus importante des femmes.
Mais elles ne sont que 10% à avoir été élues à la présidence de ces fameux conseils départementaux…
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Les Commentaires
Effectivement, on a laissé passer à la relecture. Je viens de corriger