— Image d’illustration tirée de la série This Is Us
Je ne vous apprends rien : le corps des femmes est jugé, critiqué, scruté depuis des millénaires. Trop gros, trop fin, trop petit, trop grand, trop couvert ou pas assez… il y a toujours quelqu’un pour avoir une opinion.
En septembre dernier, Dennis Nickson, Andrew R. Timming, Daniel Re et David I. Perrett ont publié dans le journal PLOS ONE les résultats d’une expérience sur l’impact de l’apparence (et a fortiori de celle des femmes) sur « l’employabilité ». Spoiler : les femmes qui pèsent un peu plus lourd que les autres seraient davantage susceptibles d’être victimes de discrimination à l’embauche.
Des recherches passées ont déjà suggéré que les personnes en surpoids, ou obèses, subissent des discriminations dans le monde du travail — elles seraient perçues comme moins employables, mais aussi moins qualifiées (tout le monde sait que la compétence se mesure au tour de taille bien sûr…) (non).
Cette fois, Dennis Nickson et consorts ont centré leur attention sur des différences de poids « minimes » : les personnes ayant un IMC « standard » sont-elles également perçues et traitées différemment selon leur poids ? Suffit-il de quelques kilos pour que les préjugés et discriminations à l’embauche apparaissent ?
L’impact du physique sur le recrutement
Les chercheurs ont proposé à 120 participant•es d’observer 40 photographies de visages et d’évaluer si les personnes derrière ces clichés étaient « employables », pour deux types de travails différents : un emploi avec des interactions avec le public (serveur•se ou vendeur•se), et un emploi sans interaction avec le public (travail en cuisine).
Les participant•es doivent attribuer à chaque visage une note allant de 1 (ne serait très probablement pas recruté•e) à 7 (serait très probablement recruté•e).
À chaque participant•e, l’équipe précise que tou•tes les candidat•es sont qualifié•es pour les jobs.
Une partie des photos est truquée : quelques kilos y ont été ajoutés.
Ce que les participant•es ignorent, c’est qu’une partie des photos est truquée — 4 femmes et 4 hommes sont en fait montré•es à deux reprises : une fois avec leur visage réel et une seconde fois avec une version modifiée, où quelques kilos ont été ajoutés.
Exemple des photographies présentées et retouchées dans le cadre de l’expérience
Les femmes doublement discriminées
Les chercheurs constatent que, de manière générale, les visages modifiés (plus potelés, donc) ont été jugés moins employables que les autres par l’ensemble des participant•es, homme ou femme. Et l’effet s’intensifie :
- lorsque l’emploi prévoit une interaction avec le public (on ne sait jamais, des fois qu’un bourrelet terrorise un•e client•e),
- et quand les candidats sont des femmes (ben tiens, la double peine).
Les femmes plus rondes que les autres sont perçues plus négativement que leurs homologues masculins, peu importe le poids de ces derniers.
Lorsque les gens postulent à un emploi de serveur•se ou de vendeur•se, les femmes plus rondes que les autres sont perçues plus négativement encore que leurs homologues masculins, peu importe le poids de ces derniers. Selon l’étude, une femme dont l’IMC serait « standard » subirait un biais de poids plus important encore qu’un homme qui serait en surpoids (toujours selon la mesure, discutable, de l’IMC).
En d’autres termes… L’employabilité des femmes varierait aussi en fonction de quelques simples kilos.
Cette nouvelle expérience rejoint les précédentes recherches sur l’inégalité des genres dans le monde professionnel, et sur les discriminations subies par les personnes en surpoids et obèses.
Comment agir pour contribuer à changer les choses ? La première étape peut être celle de la prise de conscience : en réfléchissant aux résultats de toutes ces études, en interrogeant nos propres préjugés et stéréotypes, nous pouvons changer de position et contribuer à faire évoluer la société dans laquelle nous vivons.
À lire aussi : L’apparence physique, un critère discriminant en entretien d’embauche (surtout pour les femmes)
Ces résultats peuvent être particulièrement précieux pour celles et ceux qui travaillent dans les ressources humaines !
Enfin, même si ce n’était pas son objectif premier, l’expérience nous montre que les jugements des femmes à l’égard des autres femmes n’étaient pas vraiment différents des jugements des hommes. En grandissant dans un monde sacrément sexiste, nous avons intégré et appris un certain nombre de choses, et s’en extraire peut être compliqué : gardons nos consciences ouvertes !
Pour aller plus loin…
- L’article publié sur PLOS ONE
- Un article de Livescience
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