Il y a deux mois, une étude montrait que près d’un•e demandeur•se d’emploi sur dix dit avoir été discriminé•e à l’embauche du fait de son apparence physique ; 20% des personnes en surpoids estiment que cela leur a clairement causé un refus.
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Pourtant, en préambule de la constitution du 27 octobre 1946, on peut lire les mots suivants :
« Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances. »
Le ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social a décidé de réagir en conséquence et s’engage contre les discriminations à l’embauche !
Pour cela, il lance une campagne nommée #LesCompétencesDabord segmentée en plusieurs actions.
La discrimination à l’embauche en question
La discrimination à l’embauche peut être basée sur vingt motifs tels que le genre, l’âge ou les convictions religieuses (vous pouvez connaître l’intégralité des critères ici).
Ces motifs sont bien entendu interdits en théorie pour écarter une personne pendant une procédure de recrutement… en théorie seulement, car en octobre 2015, une étude montrait qu’à compétences égales, le nom et l’origine obligent en moyenne à envoyer quatre fois plus de CVs pour décrocher un entretien.
D’un côté, les victimes hésitent à poursuivre les employeur•ses car les preuves sont rares et qu’elles ont peur de devoir subir les conséquences d’une telle accusation.
De l’autre, les entreprises ne mesurent pas les conséquences de leurs éventuelles pratiques discriminatoires. Pourtant, elles peuvent être punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende.
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Les vrais chiffres de la discrimination
Afin de se rendre davantage compte des discriminations, une opération de testing à grande échelle a été lancée auprès d’entreprises de plus de 1000 salarié•es.
Cette méthode consiste à envoyer aux entreprises deux candidatures similaires en tous points, sauf pour un critère relevant de l’un des vingt motifs de discrimination. Ces résultats seront rendus publics et les entreprises testées devront tirer le bilan de ces résultats.
Le gouvernement propose également aux entreprises de se tester elles-mêmes, afin de vérifier leurs propres pratiques d’embauche par ce biais.
Une autre étude, cette fois commandée à France Stratégie, sera publiée fin juin. Elle aura pour but d’évaluer le coût de ces discriminations mais aussi leur impact, que ce soit à l’échelle de la société mais aussi à celle des entreprises qui se privent de talents.
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La campagne anti-discriminations en détail
Dans le but de lutter contre ces discriminations, le gouvernement a décidé de lancer une campagne de sensibilisation afin de faire évoluer les mentalités.
Pendant quinze jours, elle sera diffusée dans les gares, métros et kiosques. Cette campagne sera renforcée par une présence sur les réseaux sociaux, que ce soit Twitter, LinkedIn ou Facebook.
Le site du ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social relaie également la campagne dans une rubrique créée à cette occasion. On y trouve un film d’une durée de deux minutes présentant cette lutte contre les discriminations à l’embauche ainsi que de nombreuses informations.
Cette campagne a pour objectif de conduire les employeur•ses à prendre conscience de leur responsabilité dans la discrimination à l’embaucheb
Décourager la discrimination… en encourageant l’ouverture !
Le ministère a décidé de jouer la carte de la bienveillance pour encourager les entreprises à se positionner contre les discriminations.
Pour ce faire, il compte mettre en place un Label diversité pour encourager les sociétés qui s’engagent dans cette lutte. Et pour celles qui veulent participer activement au changement, elles seront fournies en guides et en outils.
Les entreprises sont également encouragées à user de méthodes de recrutement alternatives qui permettent d’engager des personnes si elles ont les compétences requises pour le poste et non en raison des informations annexes sur le CV. Il est par exemple possible de demander des CVs anonymes ou bien d’embaucher dans des salons en ligne.
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Permettre une meilleure réaction en cas de discrimination
Si les entreprises se doivent d’évoluer, les victimes de ces discriminations doivent pouvoir agir !
Pour cela, le gouvernement mise sur l’action de groupe, dans le cadre du projet de loi Justice du XXIe siècle, qui permettrait de faire cesser les discriminations collectives qui touchent les candidat•es et/ou salarié•es. Pour le moment, cette loi a été votée au Sénat et le sera bientôt à l’Assemblée nationale.
Plus concrètement, si vous êtes victimes d’une discrimination à l’embauche ou pendant votre emploi, vous pouvez contacter l’inspecteur du travail, les organisations syndicales, les associations de lutte contre les discriminations ou le Défenseur des droits.
Ces personnes pourront vous informer, vous aider à monter un dossier reportant la situation de discrimination et appuieront vos démarches, y compris juridictionnelles. Elles peuvent aussi vous apporter de l’aide pour régler votre problème à l’amiable.
Une belle action… et ses limites
Je ne peux qu’encourager une action visant à lutter contre les discriminations. Ayant moi-même été victime de sexisme et de « blagues » de très mauvais goût sur mes origines, je sais qu’il ne s’agit pas d’une théorie mais d’une réalité.
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Alors si ça me fait plaisir de voir que le gouvernement s’engage sur ce sujet, ça me fait rire (jaune) quand je me rends compte qu’à côté, le ministère de l’Intérieur recrute des employés… mi-blancs mi-blancs.
Comme quoi, la discrimination n’est pas forcément évidente à cerner, et il est nécessaire que nous soyons tou•te•s vigilant•es à ce propos.
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Les Commentaires
Il me semble que le défenseur des droits a la possibilité de mener des enquêtes en cas de plaintes (envois de CV identiques, testing) et si c'est avéré, lancer des procédures judiciaires.
http://www.defenseurdesdroits.fr/fr/competences/missions-objectifs/lutte-contre-les-discriminations