Comment enseigner la discipline aux adolescents d’Indonésie et leur forger le caractère ? Il faut se lever tôt. Très tôt. C’est du moins ce qu’affirme le gouverneur du Nusa Tenggara oriental, qui a récemment lancé un projet pilote dans une dizaine de lycées de Kupang, la capitale de la province. Depuis le mois dernier, les élèves de terminale des établissements concernés rentrent en classe à cinq heures du matin.
Forger le caractère des élèves… en les obligeant à se lever aux aurores
Viktor Laiskodat, le gouverneur à l’origine de cette initiative, a déclaré que «- La principale raison [à cette mesure], c’est de forger le caractère de nos élèves afin qu’ils apprennent la discipline ». En Indonésie, les cours débutent généralement entre 7 et 8 heures et se terminent aux alentours de 15h30. Selon The Guardian, cette mesure est vivement critiquée, notamment de la part des parents. S’ils craignent pour la sécurité de leurs enfants qui doivent se déplacer en pleine nuit, ils constatent surtout que leurs adolescents sont épuisés. Pour arriver à l’heure, ils doivent souvent se lever à quatre heures du matin. Un horaire parfaitement raisonnable pour le gouverneur :
Ils peuvent dormir à 10 heures et se réveiller à 4 heures. Six heures de sommeil, c’est assez. [Ils peuvent] se laver pendant 30 minutes et faire 30 minutes de trajet, puisque tout est proche dans cette ville, comme ça, ils peuvent être à l’école à 5 heures.
Viktor Laiskodat, DetikBali (en indonésien), 28 février 2023
Priver des adolescents de sommeil, une pratique violente et dangereuse
Contrairement à ce que pense le gouverneur du Nusa Tenggara oriental, les élèves ont besoin de dormir plus de six heures par nuit. À 17 ou 18 ans, ils doivent même dormir entre 8 et 10 heures. Le sommeil est tellement important chez les adolescents qu’en 2014, l’Académie pédiatrique américaine avait déduit que, pour respecter leurs rythmes, les journées de cours ne devaient pas commencer avant 8h30.
Le manque de sommeil a un impact sévère sur le métabolisme des adolescents. Les nuits trop courtes altèrent la vigilance et la concentration et entraînent une baisse de l’humeur. À terme, les jeunes deviennent plus irritables et peuvent développer des troubles de l’apprentissage. Cette mesure n’est pas seulement violente, elle est aussi contre-productive puisque l’objectif premier est d’apprendre la discipline aux adolescents. Le manque de sommeil risque au contraire de les dissiper.
Au sein même des pouvoirs publics, cette expérimentation ne fait pas que des adeptes. Depuis février, la décision est vivement débattue. L’ombudsman [la personne chargée d’assurer la médiation entre la population et les autorités, ndlr], a finalement demandé au gouvernement central d’intervenir. De leur côté, les législateurs locaux exigent la levée immédiate d’une mesure qui ne se base sur rien. Sans succès pour l’instant, Viktor Laiskodat vient même d’élargir la décision à tous les fonctionnaires qui travaillent dans les établissements concernés.
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