Le tabou menstruel dans le sport en prend encore un coup ! Déjà, le 30 mai 2022, à Roland Garros, la joueuse chinoise Zheng Qinwen expliquait être passée à côté de sa 8e de finale à cause de douleurs menstruelles. Et alors que se joue actuellement le tournoi de Wimbledon, une nouvelle tenniswoman rejoint sa cause.
Alicia Barnett, joueuse britannique de 28 ans, a confié lors d’un entretien pour l’agence de presse PA, relayé le 4 juillet 2022 par Sky News qu’elle avait eu ses règles durant les pré-qualifications. Cela l’angoissait. D’autant plus qu’elle devait se plier au dress-code du tournoi de Wimbledon : porter du blanc.
Les menstruations jouent sur la forme physique et mentale des sportives
Alicia Barnett a pourtant débuté dans le tournoi, le 1er juillet dernier, avec une victoire au premier tour du double mixte aux côtés de son compatriote Jonny O’Mara. Puis, le duo a éliminé Venus Williams et Jamie Murray au cours d’un match époustouflant.
Pourtant, la tenniswoman n’était pas à l’apogée de son jeu, ses menstruations influant sur sa forme physique et mentale. C’est notamment ce qu’elle explique à l’agence de presse PA :
« Votre corps se sent plus lâche, vos tendons se relâchent, parfois vous vous sentez beaucoup plus fatiguée et votre coordination est plus difficile. Moi, je me sens vraiment déprimée et il est difficile de trouver la motivation nécessaire pour jouer. »
« Le stress mental de devoir porter du blanc »
Et il y a aussi cette histoire du dress-code blanc, imposé depuis la création du tournoi britannique en 1877. 145 ans plus tard, n’est-ce pas temps d’abolir cette exigence arbitraire pouvant compliquer la vie des femmes autour de leurs règles, sur les courts de tennis ? Pour Alica Barnett, cela ne fait aucun doute, le sujet des menstruations des sportives doit devenir central dans le monde du sport, poursuit-elle, toujours auprès de l’agence PA :
« Je suis une grande défenseure des droits des femmes et je pense que cette discussion est tout simplement incroyable, il faut que les gens en parlent maintenant. »
Ce n’est pas la joueuse de tennis portoricaine, Monica Puig qui dira l’inverse. Dans un récent tweet, la médaillée d’or olympique dénonçait elle aussi le « stress mental de devoir porter du blanc à Wimbledon » et « de prier pour ne pas avoir ses règles pendant ces deux semaines ».
Le dress-code de Wimbledon : déjà dénoncé en 2015 !
Mais le débat ne date pas de cette année. Dès 2015, lors d’une interview à la BBC Sport, la joueuse britannique Heather Watson a été une des premières à s’engager sur la dédiabolisation des règles dans le sport. Cela faisait suite à son malaise, durant l’Open d’Australie, où elle avait été forcée d’interrompre son premier match pour faire appel au docteur à cause de ses douleurs menstruelles. Elle mentionnait déjà les ballonnements, crampes et fatigue qui altéraient son jeu.
Lorsqu’on l’a interrogée sur la tradition du dress-code blanc à Wimbledon, Heather Watson a tempéré ses propos. Elle assurait que c’était « une expérience particulière » mais que son « seul stress » était… « d’avoir ses règles » ! Du coup, la plupart du temps, elle tentait de les planifier en fonction de ses tournois… Bonjour, la charge mentale !
Passer par la prise de pilule pour contrôler, voire supprimer ses règles est une pratique courante chez les sportives, une injonction à la performance à laquelle elles ne peuvent pas échapper. Madmoizelle mettait en avant, en avril 2022, les témoignages de diverses sportives, comme la judokate Margaux Pinot, qui évoquaient d’autres stratégies pour adapter son entraînement tout en ménageant son corps lorsqu’on a ses règles.
61% des femmes ont déjà manqué une activité sportive à cause de leurs règles
Car sans surprise, le mal de ces tenniswomen ne fait pas figure d’exception dans le milieu du sport. Pour preuve, 61% des femmes ont déjà manqué une activité sportive à cause de leurs règles, d’après une enquête publiée fin juin par la marque Intimina en partenariat avec Censuwide. Cette dernière repose sur un panel de 1 000 sportives françaises, professionnelle et amatrices qui ont été interrogées sur leur rapport entre le sport et leurs menstruations.
51% d’entre elles redoutent d’avoir des fuites lorsqu’elles font une activité sportive, et 70% ont des intenses douleurs menstruelles. Les faits sont là, le débat est ouvert et il est aux institutions sportives d’en tirer enfin la bonne mesure.
Pour en finir avec le tennis, en 2018, la joueuse américaine Séréna Williams a réussi à faire bouger la WTA (World Tennis Association) sur son code vestimentaire et sur des questions de retour à la compétition des femmes après leur grossesse. Les mesures avaient été prises à la suite du scandale déclenché par la combinaison qu’elle avait porté, fin mai 2018, à Roland Garros. À quand la balle de match pour qu’elles soient enfin considérées et déstigmatisées ?
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Image en Une : © Instagram Alicia Barnett et Heather Watson X Madmoizelle
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Les Commentaires
Un article sur notamment la gestion des règles des joueuses de foot est à lire sur le site Sofoot.com et je l'ai trouvé relativement intéressant et donne pour une fois la parole aux femmes, sportives de haut niveau, sur un sujet malheureusement toujours tabou.