L’article a été mis en ligne initialement le 24 septembre 2010
C’est la
Il vaut mieux, avant d’entrer dans une salle pour voir Des Hommes et des dieux, connaître un peu de quoi il en retourne parce que c’est sans détour que Xavier Beauvois nous plonge au cœur d’un monastère dans l’Algérie des années 90. Leurs journées se passent paisiblement entre prière, jardinage, prière, soins et distribution de médicaments pour les villageois et encore un peu de prière. Mais très vite, la menace terroriste s’impose à notre joyeuse équipe monacale. On s’attend alors à ce que le film deviennent une longue attente insoutenable du moment où les terroristes les massacreront jusqu’au dernier. Il n’en est rien. De façon assez surréaliste, la vie continue tout aussi paisiblement dans le monastère. Certains moines ont peur, parlent de partir, mais restent et finalement continuent leur vie, imperturbablement.
On devine que leur tranquillité leur vient de leur foi, de sa pratique et des prières, excessivement présentes à l’écran. Mais cette relation qui lie un homme à sa foi n’est pas assez creusée, pas assez décortiquée, alors qu’elle peut sembler absurde et surtout étrangère à beaucoup de spectateurs, dont je suis. Croyants ou pas, très peu de gens se dédient aussi complètement à la spiritualité, ou à n’importe quelle passion. La plupart d’entre nous menons des vies partagées entre plusieurs amours et passions, comment comprendre alors ce qui se déroule sous nos yeux ? C’est impossible. Tout est survolé sans qu’on arrive jamais au coeur du sujet, le point de vue unique est celui de ces hommes qui se sont exclus du monde réel pour vivre leur foi. Le terrorisme, le village, l’Algérie même, sont vus de loin. Malgré l’implication du monastère dans la vie du village en soignant les habitants, en vendant leur miel sur le marché, en assistant aux fêtes religieuses et aux cérémonies, il est clair que ces hommes vivent dans un autre monde qui est difficile d’accès.
Au fond, l’histoire de ce monastère est incompréhensible, nous n’avons pas les clés qui nous permettent de nous identifier aux moines et à leur situation. On assiste à un phénomène mystique qui reste totalement hermétique. Et puisque la peur et la tension ne sont pas palpables, la lenteur du film n’est que lenteur, sans réel intérêt, la contemplation ne porte aucune émotion. Je crois que Xavier Beauvois est réellement passé à côté de la possibilité de faire un film incroyablement fort et mystique, mais il ne suffit pas pour cela de montrer des scènes de prières.
Le montage est cependant très bien maîtrisé, les images sont très bien cadrées, le rythme est fluide et coule tranquillement. Et puis les acteurs sont très bons, quoique j’ai trouvé Lambert Wilson un peu mal à l’aise dans son rôle, mais la légèreté, l’humour et la sagesse de Michael Lonsdale relèvent un peu le niveau par moments et permettent de très jolis dialogues notamment sur l’amour avec une jeune algérienne. De même, certaines scènes sont particulièrement belles, par exemple le dernier repas au son du Lac des cygnes, un vrai moment de grâce, plein d’émotion. Mais avec un tel sujet, c’est tout le film qui aurait dû l’être.
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