Des tracts distribués dans la rue ? C’est « la grande opération sur la sécurité des femmes dans l’espace public », idée promise par Gérald Darmanin. Depuis mardi 30 mai, cinq millions de flyers sont distribués par les policiers et les gendarmes partout en France, dont un million le sont à Paris et en petite couronne d’Île-de-France.
Leur but ? « Informer et rappeler à chacune et chacun les gestes à avoir lorsqu’on est témoin ou victime d’une agression », avait expliqué le ministre de l’Intérieur au mois de mai.
En clair, ces tracts servent de sensibilisation mais aussi de lutte contre le harcèlement de rue. On peut y lire quelques conseils tels que « faites du bruit », se « mettre en sécurité pour prévenir au plus vite les forces de l’ordre », ou encore « déposez plainte » à destination des victimes, ou encore « intervenez » s’il n’y a pas de danger pour les témoins.
Lire aussi : Je me suis interposée pour aider une femme victime de harcèlement de rue
« Rire ou en pleurer » ?
Sans aucune surprise, cette mesure est jugée insuffisante voire absurde selon plusieurs collectifs féministes. Par exemple, Stop Harcèlement de Rue a, dans un fil Twitter, largement critiqué la mesure de Gérald Darmanin.
À commencer par son titre : « Les flyers sont intitulés ‘Sécurité des femmes dans l’espace public’, ce qui occulte les violences subies dans l’espace public par d’autres personnes minorisées comme par exemple les personnes handies, racisées, LGBTI+, ou encore grosses », écrivent les militantes. Elles regrettent que le flyer ne s’adresse pas aux agresseurs.
« Je me suis demandé si je devais en rire ou en pleurer », a réagi Sandrine Bouchait, présidente de l’Union nationale des familles de féminicides, sur RMC ce mardi 30 mai. « Ce flyer reporte la responsabilité sur la victime. On va lui dire que si elle avait fait ceci ou cela, ce ne serait pas arrivé », poursuit-elle.
De son côté, l’association #NousToutes qualifie cette mesure de « honte », et interpelle Darmanin : « Vous devriez commencer par distribuer des flyers à vos policiers », a-t-elle écrit sur son compte Twitter, faisant notamment aux quatre jeunes femmes ont déposé plainte pour des violences sexuelles subies lors d’un contrôle de police durant une manifestation à Nantes en mars dernier.
Du côté des élues également, la mesure ne convainc pas. La sénatrice écologiste Mélanie Vogel a ironisé : « 5 millions de flyers ! Les agresseurs n’ont qu’à bien se tenir ». Même son de cloche pour la sénatrice EELV Karima Delli a écrit sur son compte Twitter : « La nouvelle mesure pour protéger les femmes : un flyer ! »
Pour rappel, 80 % des femmes assurent avoir peur de rentrer seules la nuit, selon le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE). Si l’outrage sexiste est désormais un délit, selon Stop Harcèlement de Rue, l’efficacité de la répression demeure très limitée, a-t-elle analysé dans un communiqué.
À lire aussi : Pour en finir avec le harcèlement de rue, il faut penser la ville avec les jeunes femmes
Les Commentaires
Je ne suis pas du tout convaincue par la mesure (évidemment), néanmoins il y a quand même 3 points qui méritent d'être soulignés :
- Je ne pense pas que ce soit anodin que ce soient des policiers et des gendarmes qui les distribuent. À mon avis ça contribue à les sensibiliser un minimum
- Le flyer incite aussi les gens à agir en cas d'agression
- Le flyer rappelle les chiffres sur la peur des femmes de se faire agresser, etc
Donc ce n'est pas qu'un flyer qui responsabilise les victimes (même si une bonne partie du flyer est consacré à comment agir quand on est victime).