Pour clore les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie qui se sont tenues ces 27 et 28 septembre 2021, le président de la République a insisté sur l’importance « du sujet de la santé mentale » dans le contexte de la pandémie et a reconnu que les moyens actuels n’étaient pas à la hauteur des nouveaux challenges.
Pour rappel, la crise sanitaire a fait pas mal de dégâts : les consultations chez les psys ont fait un bond de 27% entre octobre 2020 et mars 2021.
Pour faire face à cette crise dans la crise, Emmanuel Macron a déballé un paquet de mesures et a révélé tout un panel de financements : 80 millions d’euros dédiés à la santé mentale, avec, entre autres, la création de 800 postes dans les centres médico-psychologiques et 20 nouvelles équipes mobiles pour prendre en charge les personnes âgées.
Mais l’annonce qui a le plus fait parler d’elle, c’est celle du remboursement des consultations de psychologues sous prescription médicale dès l’année prochaine.
La déclaration a eu l’effet d’une bombe. Car si l’amortissement des frais d’accès à la thérapie est une bonne nouvelle, les modalités de cette mesure sont loin de mettre tout le monde d’accord…
Les consultations de psychologues enfin remboursées
Pour faire face à ce pic de demandes de consultations de psychologues libéraux, l’Assurance maladie remboursera les frais des soins dès 2022. Cet aménagement sera accessible pour toute personne dès l’âge de 3 ans, et sera mis en place via un forfait de 8 consultations de 30 minutes, renouvelable sous prescription médicale.
Le tarif remboursé pour la première séance sera de 40€, puis, les sept autres seront au prix de 30€.
Une mesure qui répond à l’un des principaux freins à la thérapie : le prix parfois exorbitant des consultations, surtout dans les grandes villes. En moyenne, en France, une séance chez le psy vous coûtera pas moins de 64€ pour moins d’une heure… Sachant que pour être efficace, un traitement complet demande généralement un suivi sur plusieurs mois, voire années, la facture peut vite être très salée et dissuader de nombreuses personnes.
Une décision salvatrice, donc ? Pas si sûr…
Une fausse bonne idée ?
Le gouvernement a beau se gargariser en qualifiant le rassemblement de « moment historique du débat national réunissant l’ensemble des acteurs concernés », les psychologues n’étaient pas conviés pour s’exprimer sur le sort de leur propre profession.
« On voudrait être associés, on ne l’est pas, ils décident de tout sans nous, avec des médecins », a expliqué Christine Manuel, membre du Syndicat national des psychologues au Monde.
Si Emmanuel Macron a concédé que « toute la profession des psychologues n’était pas totalement ravie » de cette mesure, il a rapidement tenté d’étouffer les braises en annonçant que les psychologues qui souhaitent continuer de pratiquer en dehors de ce nouveau parcours de soin pourront « continuer à le faire ». Oui, mais à quel prix ?
Mardi 28 septembre, les thérapeutes étaient dans la rue pour soulever les nombreux couacs d’une telle décision. Ils et elles se sentent oubliées, se soucient de l’avenir de leur profession et dénoncent une mesure « indécente ».
Les psychologues libéraux s’inquiètent au sujet de leur rémunération si de telles mesures sont mises en place : avec des consultations à 30€, pour rester dans les clous, ils estiment qu’ils devront travailler à la chaîne, au détriment de la qualité de leurs soins.
Et parlons-en, de ces 30€. Car rares (voire inexistantes) sont les consultations à ce tarif… et le hic, c’est que le remboursement ne prendra pas en compte les dépassements d’honoraires.
Les psychologues dénoncent aussi le recours à la prescription médicale prévu par cette décision. Pour bénéficier du remboursement, les patients et patientes devront obligatoirement passer par un médecin généraliste, ce qui selon le psychologue clinicien Patrick Ange Raoult à Ouest France : « […] est non seulement une lourdeur administrative mais c’est également nous considérer comme incapable de définir ce qui est nécessaire pour le patient ».
La question se pose : sur quels critères le médecin généraliste décidera-t-il de ceux et celles qui « méritent » d’accéder au remboursement ou non, sans tomber dans une sorte de hiérarchisation des troubles mentaux ?
Sans oublier le nombre limité de séances prévues dans le forfait et la durée (30 minutes) de celles-ci qui freineraient considérablement le processus thérapeutique mis en place et son efficacité. Comment traiter un ou une patiente en 30 minutes et huit séances chrono ?
C’est mieux que rien, certes, mais une chose est sûre : une telle mesure, mise en place dans de telles modalités semble intenable pour beaucoup de professionnels qui se voient déjà contraints de fermer leur cabinet…
Cette décision du gouvernement pour prendre à bras-le-corps le sujet de la santé mentale n’est-elle que de la poudre de perlimpinpin jetée aux yeux des Français, Françaises et psychologues libéraux ?
À lire aussi : Le coût de la thérapie : en France, aller voir un psy reste un luxe
Crédits photos : Alex Green (Pexels)
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Les Commentaires
Et petit point supplémentaires, si le tarif de base est bien 25€, il existe aussi d'autre cotation des consultations de médecine générale lorsqu'elle requierent plus de matériel ou de temps qu'une consult de "base" de type virose hivernale, suivit de maladie chronique.
Par exemple, il est habituel de faire des consult a 30€ quand il s'agit de pédiatrie, la consult est souvent plus longue, c'est aussi un tarif spécial si on fait une suture ou tout autre petit geste chirurgical. Et il y a plein d'autre cotation que je connais pas encore parceque je commence tout juste ^^