La question pour la Daronne
Chère Daronne
J’ai fait un grand voyage en solo cet été et je suis tombée amoureuse du Mexique. Les paysages, les gens, la bouffe, l’ambiance, tout m’a plu et je me verrais tellement y vivre. J’ai failli ne pas rentrer, mais finalement, il a bien fallu, mais cette idée ne me quitte pas et je rêve de retourner y vivre. Mon mec, mon boulot, mes potes (même eux) tout me semble un peu naze depuis que je suis revenue.
Dis, je fais quoi ? Je plaque tout ou j’ignore cette envie ?
Emma
La réponse de la Daronne
Ma petite cuillère de gelée royale,
Ah bah oui, bah, évidemment, c’est un classique. Ce syndrome a même un nom : l’EDPV ou l’État Dépressif Post Vacances. Enfin, c’est moi qui inventé ce terme, mais je suis certaine que si je soumettais mon idée à l’OMS, elle ajouterait immédiatement l’EDPV à la liste des syndromes qui pourrissent notre époque.
C’est plutôt bon signe de ne pas avoir très envie de rentrer à la maison après des vacances. Ça veut dire qu’on a bien ri et qu’on a réussi à déconnecter d’un quotidien qui a quand même été bien pourri pour beaucoup d’entre nous ces dernières années. Les voyages à l’étranger peuvent être merveilleux : la culture, le dépaysement, la bouffe, la culotte ou le slip d’un.e humain.e rencontré.e sur place, ça en fait de beaux souvenirs pour se réchauffer le cœur les soirs d’hiver.
Alors comment savoir si ton blues post vacances est normal ou s’il témoigne d’un besoin de changement réel ?
Attention au fantasme !
Eh voilà, je vais faire ma rabat-joie. Mais bon, tu sais déjà ce que je vais te conseiller : avant d’agir, prends le temps de réfléchir. OUAH, QUEL CONSEIL ORIGINAL ET AVANT-GARDISTE ! Je sais que je n’invente pas l’eau chaude, mais il faut bien que quelqu’un se dévoue pour rappeler les bases.
Pour commencer, gare au fantasme qui ferait du Mexique une terre de cocagne où tout serait plus simple et authentique. D’abord, c’est méga moche pour ses habitants qui ont autre chose à foutre que de servir de fétiche à des Européens en mal d’authenticité, et puis tu risques de te prendre une grosse gamelle parce que l’El Dorado merveilleux, ambiance pays des Schtroumps, ça n’existe… Que dans l’imaginaire d’Européens en mal d’authenticité justement.
Vivre vraiment quelque part c’est totalement différent que d’y séjourner pour des vacances (NO SHIT SHERLOCK). On a des obligations matérielles, des factures qui s’accumulent et personne pour nous tenir la main, parce que la vérité, c’est qu’en général quand on débarque dans un nouvel endroit, on est souvent seul comme un vieux chien dans la rue et cette image n’est même pas correcte puisque les chiens ont sûrement bien plus de copains clébards qu’une personne qui arrive dans un pays étranger sans connaître personne.
Partir à l’autre bout du monde, et s’installer dans le pays de ses rêves, moi je dis : pourquoi pas, on n’a qu’une vie. Mais mieux vaut analyser cette envie avant de se précipiter.
C’est une crise ou une véritable envie ?
Donc, là, tu as envie de tout quitter et moi, j’ai envie de te demander : pourquoi ? Certes, j’ai bien compris que ton lieu de destination t’avait fait beaucoup d’effet, mon petit merlan frétillant, mais que se passe-t-il vraiment chez toi pour que tu n’aies plus envie d’y retourner ?
Attention ! Je ne dis pas que tu as une vie de merde qui mérite d’être remise en question. Beaucoup de gens à l’existence parfaitement satisfaisante ont le blues en retournant au bureau après quelques semaines d’aventure. Heureusement, dans ces cas-là, il suffit de quelques semaines pour reprendre goût au quotidien.
Mais si vraiment l’idée même de remettre un pied dans ton appart’, ou retrouver ton partenaire, ou tes potes, ou tes collègues, te désespère, c’est peut-être le signe que quelque chose mérite d’être amélioré au quotidien. De quoi aurais-tu besoin pour te sentir mieux ? Nouveau loisir, militantisme, engagement politique, changements professionnels ou amoureux… Les solutions pour donner du sens à sa vie sans tout plaquer existent et il n’y a pas toujours besoin de partir au bout du monde pour être heureux.
Tu veux vraiment y aller ? Bah vas-y alors !
Et puis parfois, c’est le coup de foudre, la mort par chaos. Tu as pesé le pour et le contre, fait le point, réfléchi et réfléchi encore, c’est toujours ce pays et rien d’autre qui illumine ton cœur. Dans ce cas-là, qu’est-ce que tu veux que je te dise, si tu l’aimes, tu l’aimes cet endroit.
Est-ce que je te conseille de tout plaquer du jour au lendemain pour autant ? Non, toujours pas, désolée. Mais, pas de panique, je t’encourage quand même à organiser ton départ de façon intelligente.
Renseigne-toi, rejoins des groupes d’étrangers vivants sur place, regarde le prix des loyers, les possibilités d’emploi, puis monte un projet pérenne afin de partir dans de bonnes conditions… Cela te permettra de mettre toutes les chances de ton côté pour apprécier l’expérience une fois sur place.
Allez, je te laisse, je déménage dans la Sartre la semaine prochaine,
La bisette
Ta daronne
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