Voilà, vous y êtes : vous avez trouvé votre nouvel appart, tous les papiers sont signés, votre compte en banque est vidé jusqu’à la prochaine paie ou la prochaine bourse ou la prochaine fois que vos parents auront pitié de vous, vous avez survécu à l’état des lieux de votre futur ancien appart et vos cartons et/ou valises sont faits. Vous vous tenez, digne et fier-e comme Artaban, au milieu de ce chaos cubique qu’est devenu l’ensemble de vos possessions.
Minute ! Avez-vous seulement pensé à la suite ? Ben oui, la suite : vous ne vous attendiez tout de même pas à ce que vos cartons se mettent à sautiller à votre suite comme par magie ? Il va falloir déplacer le tout d’un point A à un point B. Il va falloir… déménager ! Oui, voilà, c’est ça.
Non.
Ah ben vous avez l’air moins faraud-e, tout de suite. Enfin, ce n’est pas comme si vous vous retrouviez totalement démuni-e face à l’adversité. Il y a plusieurs alternatives. Tout à fait. Alors lâchez un peu ce bout de bois, Poudlard n’existe pas dans la vraie vie et vous avez l’air ridicule. Venez plutôt voir quels types de galères nous avons à vous proposer.
Si j’ai… ? Oui, j’ai bien dit « galères », oui. Aaah, j’ai parlé de déménagement quand on n’a plus un rond, mais je n’ai jamais dit que ce serait une partie de pêche à Hawaii ! Je… Avez-vous bien lu le titre de cet article ?
Le Classique : pour les petits malins qui font bosser les copains/copines
Cette formule peut paraître un peu moins galère que les autres, puisqu’elle implique que votre point A et votre point B se trouvent à une distance traversable avec la voiture d’un pote (comprendre : s’il doit faire 2000 km juste pour l’aller, il y a moins de chance pour qu’il ou elle soit prêt-e à courir le risque que vous oubliez vos slips au point A).
Il est vrai que, dit comme ça, le plan voiture prend des allures de déménagement parfait, à la limite du paradisiaque – vous vous voyez déjà, sirotant un cocktail avec vos lunettes de soleil sur le nez, la tête à la fenêtre pendant que quelqu’un d’autre s’occupe de vous conduire, vous et tout votre bordel, vers votre nouveau chez-vous.
Commencez déjà par accepter l’idée que le jour de votre déménagement, s’il ne pleut pas, c’est qu’il fait trop chaud et que vos cuisses collent au siège passager. C’est fait ? Bien.
Ensuite, je trouve que vous allez un peu vite en besogne. Je veux dire, les bons potes qui vont accepter de vous servir d’appui, que dis-je, de fauteuil roulant en ces temps difficiles, fournissant épaule solide et mode de locomotion assez vaste, tout le monde ne les a pas forcément sous la main. Selon votre situation, vous allez peut-être devoir soudoyer votre entourage, ou promettre à vos parents de manger des fruits et légumes jusqu’à la fin de votre vie pourvu qu’ils acceptent de venir.
Mais soit. Mettons que vous aussi, vous avez des potes adorables (un morceau de « ma vie est mieux que la vôtre » s’est égaré dans cette phrase). La main-d’oeuvre, check. Le mode de locomotion, check. Le déménagement… check ? QUE NENNI, NAÏF LECTORAT. Il vous reste encore à défier les lois de la physique.
Qu’est-ce à dire ? C’est très simple : avez-vous jeté un oeil au tas informe de vos petites affaires, qui fait une tête de plus que vous ? Maintenant, regardez le coffre de la voiture. Vous y êtes ?
Bon, si vous en êtes rendu-e au point où vous cherchez à exploiter une dimension cachée dans le coffre, à la manière du sac de Mary Poppins, c’est que vous avez bien senti passer toute l’ampleur du souci.
Hé oui.
Mais le spectacle doit continuer, comme on dit, alors vous faites ce que vous pouvez pour vite prendre la route, histoire de ne pas arriver en contrées hostiles à 3h du matin. Si tout est entré, vous avez le droit de faire une petite danse du soleil. Si vous avez dû vendre ou abandonner du mobilier, ou envoyer du rab par colis, vous avez aussi le droit, mais en plus blasé.
Dans tous les cas, maintenant que vous êtes assis-e, prêt-e à partir, vous réalisez, une jambe sur un carton et le bras sur un morceau de portemanteau (tiens, un poireau, qu’est-ce qu’il fait dans la théière ?), que toutes vos illusions de voyage en mode croisière sont parties danser la carioca chez les zoulous. Ça fait un peu mal, mais ça passera une fois que vous aurez dégagé cette fourchette de sous vos fesses.
Joie et félicité ! Vous voilà parti-e vers d’autres aventures. Au programme, un mal de fesses et/ou de dos mémorable le jour où vous sortirez enfin de cette voiture, un choix assez varié d’embouteillages, un GPS oublié dans une valise et/ou une carte que vous ne savez pas lire correctement, un long moment d’errance dans une ville que vous ne connaissez pas encore très bien… Comment ça, je dramatise ? Ah ben c’est vous qui voyez, hein.
En attendant, vous avez loupé la sortie.
L’Erasmus : pour les globe-trotters qui prennent l’avion
Finalement, vos cartons sont des valises et une trop grande quantité de sacs de voyage, parce que vous êtes un-e guerrier-e qui part à l’étranger ? C’est vrai que dans ce cas-là, l’alternative avion est plus séduisante. Parce bon, sinon, c’est traverser le pays en stop, prendre une trentaine de trains, et ramer à travers un ou deux océans. Du coup, l’avion, ouais.
On se calme ! Vous ne pouvez pas encore partir pour l’aéroport. Vous croyez quoi, qu’un jet privé vous attend ? Non, en bon-ne fauché-e, vous avez acheté des billets dans une compagnie low-cost, et comme toute compagnie low-cost, vous avez des limites de poids pour les bagages qui vous coûtent déjà une blinde. De toute façon, je regrette de devoir vous dire ça, vraiment, mais vous ne pouvez pas partir avec votre maison sur votre dos. Non.
Fig. 1
Vous pouvez continuer à fixer votre monumentale valise de cet oeil torve, vous ne serez pas fixé-e pour autant sur son éligibilité aux maigres 20kg autorisés. Vous allez, fatalement, au cours de votre empaquetage, finir hystérique et paranoïaque, au point de remettre votre valise sur la balance après y avoir ajouté vos pantoufles. Y a-t-il un moment dans notre vie où une balance nous stresse autant qu’avant de prendre l’avion ?
Allez, c’est bon, vous avez assez analysé la consistance de votre gel douche : vous avez un check-in à affronter. Une fois que vous aurez réussi à traîner une partie de votre vie sur votre dos tel un escargot neurasthénique, oui, bien sûr. Je vous rappelle que vous avez le droit de faire appel à un ami : ça ne réduira somme toute qu’assez peu votre charge, mais la misère a besoin de compagnie, comme on dit.
Ça y est ? Le check-in est fait ? Votre valise a été acceptée sans surplus de découvert sur votre compte en banque ? Ah non. Bon, tant pis, ce n’est pas comme si vous aviez le choix, si vous voulez arriver à bon port (rappel : il y a toujours l’option rame).
Prenez votre bagage à main dont le poids est supérieur à la limite autorisée (chut), et traînez-moi tout ça aux contrôles : il vous reste à défiler, sans ceinture, pieds nus et mains sur la tête, devant quelques types qui s’en balancent un peu mais te pendraient sur la place publique pour une bouteille ou un liquide louche dans ton sac.
« Salopard, tu voulais faire péter l’avion avec ton p’tit filou framboise, hein ?! Réponds, qui sont tes complices ? On a déjà coincé la fille au Babybel, t’es foutu ! »
Une fois cette épreuve traversée sans finir au poste, il ne vous reste qu’à :
- espérer que votre avion ne va pas atterrir dans la ville voisine pour cause de mauvais temps
- faire le poireau pendant trois heures pour monter dans l’avion
- vous battre pour monter dans l’avion
- traverser les contrôles à l’arrivée selon votre destination
- vous déshydrater nerveusement
- vous re-traîner vos kilos de biens matériels sur le dos dans une ville que vous découvrez où les gens parlent une autre langue que celle de votre maman
- mourir.
Au pire, hein, vous campez à l’aéroport.
Fastoche.
Le Combo : pour ceux qui prennent tout mais qui ont un karma pourri
Ah. Vous êtes désespéré-e au point que les modes de transport vous importent peu, pourvu que vous arriviez un jour ? Bon, alors déjà, vous pouvez piocher comme vous l’entendez ou comme ça vous vient dans les deux formules précédentes, en rajoutant à vos possibilités de traversée du territoire le stop, le train et la rame. Et puis pagayer, il paraît que c’est bon pour la santé. Quoique si vous avez un karma pourri, vous risquez de couler la barque, toutes vos affaires, votre ordi, et votre dignité.
Avoir un karma pourri en déménagement, c’est quoi ? C’est, déjà, un certain soulagement, puisque vous savez que quel que soit le mode de transport que vous choisissez, pas un ne sera plus pratique qu’un autre, et que vous allez galérer allègrement dans tous les cas de figure.
Le train : vous allez oublier une valise sur le quai, tomber sur le wagon d’une colonie de vacances, vous retrouver confronté-e à un enfant qui voudra vous coller ses jouets baveux sur la figure, et avoir pour voisin-e un individu trop bavard, surtout vu l’haleine qu’il dégage en direction de vos petits sens olfactifs délicats.
Vous en faites toujours des tonnes.
L’avion : vos p’tits filous seront périmés et on les prendra pour une attaque bactériologique aux contrôles.
Sur place : si vous arrivez un jour, vous allez arriver sous la pluie, et même si vous avez un parapluie, vous serez trop chargé-e pour l’ouvrir. Vos affaires vont prendre l’eau, vous allez monter cinquante fois des escaliers avec votre surcharge à bout de bras parce que vous ne savez pas où aller et que les panneaux dans ce métro sont aussi indicatifs que des poils de cul d’écureuil en rut.
Votre plan d’hébergement temporaire s’avèrera être un plan foireux, parce que la tante de votre cousin au quatrième degré aura oublié que vous veniez aujourd’hui et ne vous aura pas laissé les clés, alors vous devrez aller chercher les doubles chez sa femme de ménage qui habite à l’autre bout de cette ville que vous ne connaissez pas, à l’aide une carte obscure et trempée parce que vous n’avez pas la 3G ou même de smartphone, et une fois que vous aurez survécu à l’aller-retour il ne vous restera plus qu’à faire une crise de nerfs en bas des escaliers que vous devrez monter pour la deuxième fois parce que votre plan squat est au cinquième étage sans ascenseur et vous haïssez le monde entier putain.
Mais la bonne nouvelle, c’est que vous allez finir par y arriver. Parce que vous êtes un-e guerrier-e. Et que ça vous fera des tas d’histoires à raconter pour remplir des articles.
Le Kamikaze : pour ceux qui ont une bicyclette
Mais… Qu’est-ce vous faites. Lâchez ce vélo. Vous êtes fous. Arrêtez. Vous me donnez des palpitations.
Et voilà, j’hyperventile. Hhhh. Hhhh.
Bon, vous êtes content-e, vous avez fait votre petite blague ? Bien. Coupons donc, si vous le voulez bien, le mode simulation de galères de déménagement, et revenons à la réalité. Vous êtes à nouveau dans votre salon, entouré-e de votre barda à déplacer, et vous savez à présent qu’aucun individu déluré ne viendra vous sauver d’un coup de baguette magique ou d’un voyage dans une cabine bleue plus grande à l’intérieur.
Tous vos rêves d’enfant ainsi piétinés, quel type de galère allez-vous choisir pour votre déménagement ?
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