Tout le monde ou presque a un avis sur la matière première qui composaient les chaussures de Cendrillon pour aller au bal. Certains scientifiques se sont même amusés à tester si des pantoufles de verre auraient pu, physiquement, supporter le poids d’une femme sans se briser. Le résultat négatif a fait enfler l’hypothèse selon laquelle il devait donc s’agir de souliers en vair, c’est-à-dire de la fourrure animale (mais c’est oublier que cette matière souple aurait permis à n’importe quel pied de s’y glisser sans contrainte).
Pour Perrault, Cendrillon portait des pantoufles de verre, et c’est volontairement irrationnel
On pourrait tout de même rappeler qu’il s’agit d’un conte de fées, que celles-ci n’existent pas, et sont donc incapables de changer les citrouilles en calèche, et les haillons en robe de princesse, mais ce serait aller contre l’esprit de Noël. Il faudrait aussi inventer un mot pour désigner cette propension de certains fans à focaliser de façon excessive sur un détail pour tenter de le rationnaliser par une démonstration pseudo-scientifique. Un mot qui pourrait bien être « racisme » quand il s’agit de contester l’existence de personnages noirs dans les fictions fantastiques que sont House of the Dragon, Les Anneaux de Pouvoir, ou encore La Petite Sirène. Mais c’est un autre débat.
Pour en revenir au cas du conte de Cendrillon de Charles Perrault de 1697, une chercheuse écossaise a récemment expliqué au Guardian en quoi il s’agissait bel et bien de verre. Selon Genevieve Warwick, professeure d’histoire de l’art à l’Université d’Edimbourg et autrice de Glass Slipper: Towards a Cultural History of Renaissance Materialities (La pantoufle de verre : vers une histoire culturelle des matérialités de la Renaissance), ces souliers importables dans la réalité servent justement de satire de la royauté française de l’époque.
Transformer les cendres en verre, une métaphore du règne pur luxe de Louis XIV
L’universitaire rappelle au grand quotidien britannique que Charles Perrault était le secrétaire chargé de la décoration des palais royaux de Louis XIV, dont la fameuse Galerie des Glaces à Versailles : une salle de 73 mètres de long, richement meublée, dotée de 357 miroirs et 17 grandes fenêtres. Rappelons qu’à l’époque, le verre coûtait une fortune et s’importait plutôt de Venise. Un problème ? Par pour Louis XIV, qui voulait faire rimer France avec luxe afin d’en faire un outil de pouvoir politique et économique. Le conteur a donc été l’administrateur chargé de mettre en place une verrerie royale pour la France, déroule Genevieve Warwick auprès du Guardian : « Perrault était chargé d’assurer l’approvisionnement de la verrerie : sable, cendre et bois pour les feux. D’où le nom de Cendrillon. »
Cette dernière, femme du peuple, chargée de ramasser des cendres et qui devient digne de l’amour d’un prince grâce notamment à ses pantoufles de verre, apparaissait donc comme une métaphore plutôt évidente du faste de Louis XIV pour les contemporains de Perrault, poursuit l’historienne de l’art : « Il en faisait une sorte d’emblème national de la façon dont nous allons faire prospérer la France, en fabriquant nous-mêmes ces produits de luxe. »
Et lorsque Cendrillon danse en pantoufle de verre (une mission impossible), il s’agit aussi de se moquer gentiment des effets de mode de l’époque, souvent ridicules, parfois dangereux, comme la tendance des épingles, sortent de chaussures à talon proches d’échasses. D’ailleurs, Louis XIV était aussi connu pour son adoration des souliers richement brodés jusqu’à frôler l’absurde. CQFD.
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Crédit photo de Une : Disney+.
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Les Commentaires
c'est que personne ne moufte quand la Bonne Fée transforme les haillons de Cendrillon en magnifa-ï-que robe de bal (paske c'est scientifiquement possible, ça ?)
et pis, et si la pantoufle était en verre fourrée de vair ?