« On guérit du sida » ou encore « il faut mettre deux préservatifs pour se protéger »… Beaucoup trop d’idées reçues circulent sur le VIH. En cette journée mondiale de lutte contre le sida, MadmoiZelle a interviewé Sandrine Fournier, directrice du pôle financement et recherche du Sidaction sur les conséquences qu’a la crise sanitaire sur la lutte contre le sida.
La crise du Covid-19 VS le combat contre le sida
Hassiba : Économiques, sociales, culturelles… La crise sanitaire n’épargne aucune sphère de la société. À l’heure du confinement, la lutte contre le Covid-19 a-t-elle ralenti le combat contre le sida ?
Sandrine Fournier : En raison du Covid, on ne dispose pas de chiffres. Habituellement, au 1er décembre, nous avons le nombre de nouveaux diagnostiqués. Or les équipes étant mobilisés pour le Covid, les remontées ne sont pas suffisamment exhaustives.
En revanche, on était à 6200 nouveaux diagnostics l’année dernière. Première fois, qu’on avait une légère baisse alors qu’on était sur un plateau depuis des années… malheureusement, ça risque de ne pas être le cas cette année.
À quel niveau la crise sanitaire a-t-elle une incidence ?
On note l’impact du Covid-19 sur le dépistage : il y a eu moins de 60% de dépistages du VIH, mais aussi d’autres IST bactériennes durant la période du confinement. Et cet écart n’a pas été comblé par la suite.
Le dépistage doit devenir un réflexe. On voyait progresser d’années en années le nombre de tests, c’était un très bon signe et là, le Covid-19 marque un arrêt considérable sur le dépistage. C’est un problème. On estime qu’il manque près de 650 000 tests depuis la mi-mars par rapport aux projections attendues.
La reprise des dépistages du VIH est nécessaire
Quelles sont les conséquences d’un dépistage tardif ?
Moins de personnes se font dépister, elles seront donc prises en charge plus tard. Il faut savoir que 51% des personnes diagnostiquées n’avaient jamais réalisé de dépistage auparavant. Parmi elles, 26% le sont à un stade très avancé de la maladie.
Aujourd’hui, on sait l’impact extrêmement positif
lorsqu’on est traité peu de temps après l’infection. On vit une vie sur le plan médical en bonne santé aussi longtemps qu’une personne qui n’est pas affectée par le VIH et on ne transmet plus le VIH.
Depuis sa création en 1994, Sidaction a évolué. Quelles sont les principales actions menées par l’association en 2020 ?
C’est d’abord de financer des actions de recherche et aussi de soutenir les associations sur le terrain qui pratiquent le dépistage rapide. Elles recueillent un taux de positivité bien supérieur au dépistage classique car elles travaillent auprès des publics les plus exposés au VIH.
L’autre enjeu est de continuer à informer les jeunes. Aujourd’hui, on parle beaucoup moins du sida. Les moins de 25 ans ne sont pas aussi informés que ceux de la génération précédente, et se sentent de moins en moins à risque de contracter le VIH.
Lutter contre la désinformation autour du VIH
À cause de nombreuses idées reçues qui circulent encore…
Exactement, les fausses croyances sont encore nombreuses., comme l’idée que la pilule contraceptive protège du VIH ou qu’on peut contracter le VIH en embrassant une personne, ce qui est faux (la salive n’est pas vecteur de la maladie).
30% des personnes pensent qu’il existe des médicaments pour guérir du VIH, malheureusement ça n’est pas du tout le cas. On se réjouit d’avoir des médicaments qui nous permettent de vivre avec et de se maintenir en bonne santé, en revanche sans ce médicament, le VIH reste mortel. Non, on n’en guérit pas.
Mettre deux préservatifs permet de se protéger, selon certaines idées reçues…
Surtout pas, ça fragilise le préservatif et on multiplie le risque d’accidents !
Pour mettre fin à ces fausses croyances, il y a un gros travail d’informations à faire, notamment auprès de personnes fragiles ou bien précaires qui ont d’autres problématiques. La santé n’est pas toujours leur priorité.
Le Covid-19 fragilise davantage cette population qui n’a pas accès aux aides sociales, comme les travailleurs et travailleuses du sexe. Faute de travail, ils et elles n’ont pas de revenus, donc leur priorité est de manger et non pas se soigner. Notre rôle est d’aider cette population à avoir accès à l’information dans un premier temps et ensuite accès au traitement.
Parce que le combat est long et que le Sidaction est financé à 85% par des dons privés, n’hésitez pas à faire un geste de solidarité sur le site don.sidaction.org
À lire aussi : La prévention sur le VIH et le sida se dégrade chez les 15-24 ans
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Le covid a généré :
- une recherche de pointe extrêmement rapide contre le covid. Très souvent les recherches contre une maladie aident à trouver des remèdes contre d'autres dont le sida. En plus ce sont 2 virus.
-Un regain de l'intérêt pour la recherche en biologie qui est super mega importante et délaissée. Ça ne peut qu'aider la recherche contre le vih.
-Un regain d'intérêt pour la santé publique et donc l'information et la prévention . Or, comme dit dans l'article même si on n'a pas de vaccin ou de traitement curatif qui éradique le sida, si tous les malades sont testés et sous traitement on met fin à l'épidémie et on éradique le sida (pas de transmission sous traitement)
edit : en plus j'imagine que logiquement le confinement aura baissé drastiquement le nombre de contaminations annuelles en 2020. Et avec le covid, les normes sanitaires reviennent à l'ordre du jour notamment chez certains tatoueurs et pierceurs qui les avaient délaissées.