Avez-vous déjà été surprise par un discours sexiste sortant de la bouche d’une autre fille ? Êtes-vous agacée lorsque l’une de nos pairs explique que oui, les femmes sont de petites choses fragiles et doivent être protégées par les hommes ?
Vos poils se hérissent-ils lorsque vous entendez une femme dire qu’elle, elle est attirée par les machos ?
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JE VOUS ENTENDS – et la science aussi ! Une recherche, dont les résultats ont été publiés en février dernier dans le Journal of Personality and Social Psychology, suggère que les femmes qui ont des relations à long terme avec des hommes sexistes pourraient elles-mêmes devenir de plus en plus sexistes au fur et à mesure que la relation avance.
Pour parvenir à cette observation, Matthew Hammond, Nickola Overall et Emily Cross ont interrogé plus de 1 000 couples hétérosexuels, et ce à plusieurs reprises.
Votre sexisme, vous l’aimez hostile ou bienveillant ?
D’abord, les chercheur•ses ont proposé à chacun des membres du couple d’évaluer son propre sexisme, puis d’évaluer le sexisme de leur partenaire.
Les scientifiques ont distingué deux formes de sexisme :
- Le sexisme hostile, que vous connaissez sans doute très bien, malheureusement : « Les femmes ne sont pas capables de ceci ou cela, les femmes doivent s’occuper des tâches ménagères, avoir un utérus prédispose à la cuisine »…
- Le sexisme « bienveillant », qui est aussi très enquiquinant et correspond, pour schématiser, à tous les discours qui disent qu’une femme est un trésor, qu’on doit la chérir et la protéger, et gnagnagna. Le sexisme bienveillant apparaît comme quelque chose de « positif », mais fait autant (si ce n’est plus) de dégâts que le sexisme hostile.
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Après ces premières interviews, les chercheur•ses obtenaient deux informations :
- Le niveau de sexisme du partenaire (hostile, bienveillant, ou pas sexiste du tout)
- Le niveau de sexisme de la partenaire (hostile, bienveillant, ou pas sexiste du tout).
L’évolution du sexisme
À plusieurs reprises, plus tard dans le temps, l’équipe de recherche a renouvelé l’expérience auprès des mêmes personnes : de ce fait, elle pouvait observer l’évolution du sexisme chez les deux membres du couple.
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La première observation, c’est que la perception qu’ont les hommes de leur propre sexisme n’évolue absolument pas dans le temps.
En revanche, la perception qu’ont les femmes de leur propre sexisme change : lorsqu’elles sortent avec un homme au sexisme bienveillant, elles auraient tendance à adopter ce type de sexisme.
À l’inverse, lorsque leur partenaire est féministe, elles rejetteraient encore plus le sexisme (sous toutes ses formes) et deviendraient de plus en plus féministes.
Selon les chercheur•ses, lorsqu’une femme adhère au « sexisme bienveillant », une flopée de problèmes se développe en association : un sentiment d’incompétence, une absence de désir de succès indépendant de celui de leur partenaire, une attitude plus dure envers les victimes de viol, moins de soutien envers les politiques de promotion des femmes au travail…
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Le sexisme, c’est contagieux ?
Pourquoi est-on contaminée par le foutu sexisme bienveillant de notre partenaire ?
Il y a peut-être une question de survie (finalement, en adhérant au sexisme bienveillant, on se fond dans la société… et, en un sens, on pense s’extraire d’une position de dominée), ou une question de « dissonance cognitive » là-dedans : comment continuer une relation avec un type qui vous méprise, vous et votre genre ?
Soit on le rejette (et c’est donc la fin de la relation)… soit on rétablit la « consonance cognitive ».
Si je ne suis pas sexiste et que je m’amourache d’un homme sexiste, il est possible que je fasse peu à peu bouger mes valeurs… en adoptant les attitudes anti-féministes de mon conjoint.
En fait, si je ne suis pas sexiste, et que je m’amourache d’un homme au sexisme bienveillant, il est possible que je ne réalise pas tout de suite son sexisme (l’amour est aveugle, il paraît). Lorsque je m’en rends compte, il est trop tard : je suis alors en dissonance cognitive, c’est-à-dire que mes pensées (féministes) sont en contradiction avec mes actes (sortir avec un mec anti-féministe).
La dissonance cognitive est extrêmement inconfortable d’un point de vue psychologique. Je vais donc essayer de rétablir la consonance cognitive en rationalisant mon choix (on ne va pas faire tout un fromage parce qu’un homme est galant), en faisant peu à peu bouger mes valeurs… et en adoptant les attitudes anti-féministes de mon conjoint.
Ce phénomène est détestable – mais peut-être qu’en ayant connaissance de ce phénomène-là, en gardant les yeux bien ouverts, nous pourrons lutter contre cette saleté de sexisme bienveillant !
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Avez-vous déjà été amoureux•se d’un•e partenaire sexiste ? Comment avez-vous réagi ?
Pour aller plus loin :
- L’étude en question : Internalizing sexism within close relationships: Perceptions of intimate partners’ benevolent sexism promote women’s endorsement of benevolent sexism
- Un article de Bustle : Women Who Date Sexist Men Become More Sexist Over Time, Study Finds
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Les Commentaires
Je suis féministe et je n'ai pas le sentiment de devenir sexiste. Au contraire, mon partenaire est ouvert à la discussion et nous échangeons sur le sujet lorsqu'il tient des propos sexistes. Je lui explique en quoi ce qu'il vient de dire est sexiste et j'essaye de le pousser à réfléchir sur la chose pour qu'il fasse évoluer son point de vu.
Le slut shaming, la méconnaissance du harcèlement de rue, le "sexisme bienveillant", etc sont intégrés (même par les femmes) depuis la plus tendre enfance.
Concernant le sexisme "bienveillant", j'ai lu quelques madz qui ont du mal à ce le figurer. Il y a l'exemple de la galanterie si elle est uniquement dans le sens "homme vers femme" (parce qu'on est d'accord que faire attention l'un à l'autre est normal)
Mais j'ai également entendu des machos (d'un niveau "bien atteint" justifier leur sexisme par des phrases du genre "la femme est le centre du monde, donc bien sûr qu'elle ne peut pas être objective. C'est pour ça qu'elle a besoin de l'homme pour réfléchir et diriger la société, parce que l'homme est extérieur et donc objectif.".... Heu... No comment ! Avec ce genre de personne c'est peine perdue...
Ou alors "une femme ne doit pas sortir seule parce qu'il peut lui arriver des problèmes et donc elle ne pourra pas se défendre. Une femme ne doit pas se battre, c'est le rôle de l'homme de défendre la femme."
J'ai l'impression que mon conjoint est un peu plus ouvert qu'avant, même si c'est difficile de faire évoluer les mentalités. D'autant plus que nous faisions le même travail et que nos collègues étaient hyper sexistes (voir les phrases du paragraphe précédent). Donc il a souffert de mon féminisme parce qu'aux yeux de nos collègues machos, mon conjoint était "un homme faible" : je débattais sur les même sujets qu'eux, j'exprimais mon points de vu et je ne me démontais pas si quelqu'un montrais de l'agressivité envers moi. Pour ces machos, ça signifie que mon conjoint ne "sait pas tenir sa femme à sa place" et donc c'est un homme faible dominé par moi.
Cette image l'a bien "fait chier".
Heureusement, nous avons tous les 2 quittés cet environnement toxique et ça fait du bien de côtoyer des personnes saines d'esprit maintenant