J’avais remarqué, auparavant, en regardant les commentaires laissés sur l’article Lingerie d’homme au féminin, que plusieurs madmoiZelles avaient l’air de mal voir le fait que leur copain/conjoint puisse porter des vêtements féminins. C’est une vision des choses que j’ai croisée souvent, et je voulais donc laisser mon témoignage sur le fait en lui-même : sortir avec un travesti.
Mon copain pensait déjà à se travestir il y a de cela trois ans, lorsque nous venions de nous rencontrer. Il y pensait couramment, et comme tout adolescent de 14 ans qui envisage le travestissement, il y eut une longue période durant laquelle il se demanda bien fort si oui ou non, il était gay.
Au bout d’un moment, son amour pour moi grandissant (il m’aimait déjà bien à l’époque) (et moi je le méprisais) (oui. Bon. Soit.), il se dit finalement que si ça se trouve, les vêtements féminins n’ont pas grand-chose à voir avec l’orientation sexuelle.
Il n’osa jamais le dire à personne, et surtout pas à moi, même s’il sait que mon père se travestissait lorsque j’étais enfant et que j’étais donc la mieux placée pour le comprendre. Par peur que je me moque de lui. Je me moquais souvent de lui. J’étais un peu une connasse.
Et finalement, l’année passée, nous sommes sortis ensemble. Nous avions (et avons toujours) (je pense) (j’espère) une relation assez fusionnelle, et comme il était le seul mec de ma bande de potes à ne pas avoir peur de parler de vernis à ongle et de chaussures à talons, j’ai vite pris l’habitude de fouiner sur les boutiques en ligne en lui montrant quelles fringues me plaisaient le plus. Et il me montrait lesquelles lui plaisaient à lui. Et c’était l’éclate.
Et un jour, il m’a dit qu’il avait envie, une fois, d’enfiler une robe. Juste pour voir. Pour le vêtement. J’aurais pu flipper comme un chaton, hurler comme un putois et le quitter dans la minute, mais mon père m’avait habituée à l’idée que non, travesti n’est pas le synonyme d’homosexuel. Oui, mon copain m’aimerait avec des talons, m’adorerait en jupe et me vénèrerait en robe. Je n’avais pas à m’inquiéter pour ça.
Un mot : fa-bu-lous. (Le génial Ezra Miller interprète un personnage du Rocky Horror Picture Show dans le film Le monde de Charlie)
Alors oui, il m’est arrivé de douter, de me dire que non, mon copain n’était pas mon père, qu’il pouvait très bien virer homosexuel et me quitter parce que mon vagin n’aurait plus d’attrait pour lui. Mais ce n’est pas arrivé. Il a beau avoir 17 ans, âge où, selon mes parents, on passe son temps à « se chercher », ça ne lui a jamais traversé l’esprit et ce n’est pas près d’arriver.
Il m’est aussi arrivé d’être peinée par ce travestissement. J’avais l’impression de perdre cette aura mythique qui m’entourait en tant que femme aux yeux de mon copain. Lorsque nous regardions des fringues sur le net, ce n’était plus « Je l’imagine bien sur toi » qu’il me disait (ce qui gagnait une dimension tout à fait perspicace lorsque nous nous trouvions sur un site de lingerie), mais un « Need ! » tonitruant que je ne pouvais même pas lui reprocher (j’ai approximativement la même réaction quand je tombe sur des vêtements que j’aime un peu trop d’amour). Je me suis donc retrouvée dans la meilleure situation de ma vie : comme mon copain aimait les mêmes fringues que moi et s’imaginait donc avec, j’avais pour rivale-plantureuse-et-sexy-qui-va-me-piquer-mon-copain-bordel-c’est-sûr…mon propre copain. Génial.
Alors oui, jeune demoiselle, si ton copain se travestit, tu ressentiras des malaises dans ta petite tête d’autruche. Parce que personne ne t’avait prévenue, parce que tu t’y attendais pas, parce qu’il y avait 2% de chances environ que cela t’arrive (c’est énorme, en fait), parce qu’aucun magazine n’avait fait un dossier « amour et sexo » là-dessus, parce que tu sais pas comment réagir, tout simplement, et parce que tu ne peux pas deviner tes réactions ou tes sentiments face aux bas nylon délicatement posés sur les jambes de ton copain. Et moi non plus, je ne savais pas. Et t’inquiète pas, c’est normal. Le travestissement n’a jamais été quelque chose de courant, les médias n’en parlent pas beaucoup, et finalement, il y a toujours cette petite peur (infondée) que ton homme vire sa cuti et parte avec quelqu’un d’autre.
Mais rassure-toi, souvent quand un homme met des vêtements de femmes, que ce soit pour se travestir ou juste pour porter une paire de bas sous son pantalon, ce sera souvent par attrait pour l’esthétique de la mode féminine plutôt que pour autre chose. La robe est au mec ce que le smoking est à la femme. C’était pas destiné à la base, mais c’est arrivé, et c’est très bien comme ça.
Mon copain ne se travestit pas encore beaucoup. Lorsque j’ai été lui chercher sa première paire de bas, il les portait chez lui, sous son pantalon. Maintenant, lorsqu’il est question de travestissement, ça se passe chez moi. On gère la tenue, le maquillage (je n’ai aucune technique, mais heureusement, mon copain a des traits très fins, et j’ai très peu de « trucages » à faire), on fait des photos, on s’amuse et c’est rigolo.
Pour tout vous dire, lorsque vous avez un copain et qu’il se travestit, si vous l’aimez, vous n’en avez rien à faire. Je vois mal quelqu’un quitter son conjoint parce que celui-ci met des jupes de temps en temps. Après, oui, vous pouvez lui demander d’arrêter (en tout cas en votre présence), parce que ça vous met mal à l’aise, mais est-ce vraiment une bonne idée ?
Et vous, comment pensez-vous réagir si votre mec se pointe un jour en jupe taille haute et talons de douze ?
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Les Commentaires
Ainsi, non, le fait de se travestir n'implique pas la notion de "déguisement", mais simplement le fait de porter des vêtements destinés à un genre qui n'est pas celui dans lequel on se reconnaît
Sinon j'ai eu la chanson "Sweet Travestite" dans la tête pendant tout l'article, du coup j'ai pas arrêté de me dandiner en le lisant