Mis à jour le 15 septembre 2017 – Mise à jour à retrouver en fin d’article.
Article original publié le 14 septembre 2017 – Le 12 septembre, est paru au journal officiel un texte qui indiquait une augmentation du tarif de certaines consultations chez le médecin.
En effet, depuis le mois de mai, une consultation chez un médecin généraliste c’était 25 euros, point. Peu importe ce pour quoi vous venez.
Il existait d’autres tarifs pour des médecins spécialistes, à 30 ou 46 euros selon les situations.
Mais depuis le 12 septembre, de nouveaux types de consultation ont été créés et entreront en vigueur le 1er novembre 2017, avec des tarifs plus élevés : les consultations complexes, à 46 euros, et les consultations très complexes à 60 euros. Certaines des consultations complexes peuvent aussi être majorées de 16 euros.
Quelles sont les consultations concernées ?
De nombreux cas de figures sont pris en compte : dans la première catégorie, à 46 euros, on a par exemple le cas d’une première consultation de contraception ou de prévention des maladies sexuellement transmissibles chez les jeunes filles de 15 à 18 ans chez les généralistes, gynécologues, obstétriciens, et pédiatres.
On a aussi la prise en charge des enfants obèses, et avec la majoration de 16 euros on retrouve la prise en charge d’un couple stérile, celle des troubles graves du comportement alimentaire, et bien d’autres.
Celles qui sont dénommées « très complexes » relèvent par exemple de l’annonce d’un cancer, d’une maladie rénale, d’une malformation du foetus, etc.
Il y en a bien d’autres, et vous pourrez trouver la liste dans le texte de loi officiel.
Pourquoi augmenter les tarifs de certaines consultations ?
Lorsque nous avons vu passer cet article de France Bleu, ce matin, nos réactions étaient plutôt homogènes. Ce gif les résume à merveille.
MAIS QUOI ?!?!
Nous étions pour le moins « surprises » de cette décision qui à première vue, peut rendre plus compliqué l’accès au soin pour les patient•es aux finances modestes.
C’est pourquoi j’ai appelé plusieurs présidents de syndicats signataires et non-signataires de la convention, afin d’avoir des explications sur le pourquoi du comment.
Jean-Paul Hamon, président de la FMF, un syndicat signataire de la Convention conclue avec la Caisse Nationale d’Assurance Maladie avance les arguments en faveur de ces augmentations :
« Premièrement, le prix des consultations en France est l’un des plus faibles d’Europe, la moyenne est de 45 euros dans les pays européens.
Ensuite, avec cette convention, il y a des consultations pour lesquelles l’assurance maladie a reconnu que c’était long et difficile à gérer et que ça demandait plus de temps, et donc d’être mieux rémunéré pour le médecin. […]
C’est une reconnaissance de la difficulté, de la longueur, de la nécessité d’informer le patient, du fait que l’on était sous payés. »
Quels critères pour définir une consultation complexe ou très complexe ?
Quand je lui demande quels ont été les critères retenus pour définir une consultation complexe ou très complexe, il explique :
« On parle de certaines consultations qui sont particulièrement longues, par exemple les annonces de cancer, de malformations foetales : ça ne s’annonce pas comme ça sur le coin d’une table.
Il faut être prudent, prendre du temps, expliquer quelles sont les possibilités de traitement, etc.
Il y a aussi des prises en charge de stérilité où on reçoit des couples : des consultations longues où il faut expliquer les procédures, ou encore l’exemple de l’annonce des greffes rénales et de quelles en sont les contraintes, il y a aussi l’asthme décompensé par exemple pour lequel il faut faire des épreuves respiratoires, etc. »
Mais alors, je vais payer plus cher ?!
Question cruciale que celle de l’accès au soin : si le prix des consultations augmente, seront-elles toujours remboursées à la même hauteur ? France Bleu explique que le mode de remboursement reste le même :
« Ces nouveaux tarifs ne modifient pas le mode de remboursement de ces consultations : elles sont toujours prises en charges à 70% par l’assurance maladie, et à 100% en cas d’affection de longue durée. »
Ce qui signifie, pour une consultation chez un généraliste par exemple dans le cadre de la prise en charge des enfants obèses qu’auparavant la consultation s’élevait à 25 euros et qu’on avait à sa charge (ou à celle de sa mutuelle) 7,5 euros. Aujourd’hui, on passe de 25 à 46 et donc de 7,5 à 13,8 euros.
Interrogé sur la difficulté d’accès aux soins mise en avant par des enquêtes comme celle de l’IFOP en 2012
qui montrait que 42% des Français déclaraient avoir renoncé à des soins chez un spécialiste en raison du coût de la consultation, Jean Paul Hamon considère pourtant que c’est un faux argument :
« Le problème d’accès au soin pour des problèmes d’argent c’est un mauvais argument : les médecins ne refusent pas les CMU, les AME, prennent les patients qui n’ont pas les moyens de payer une mutuelle, on pratique déjà le tiers payant (ndlr : le fait de ne pas facturer la consultation au patient et de se faire payer directement par la sécurité sociale) si quelqu’un nous le demande et si quelqu’un a du mal à sortir l’argent, on met le chèque de côté – ça m’arrive régulièrement.
Il faut arrêter de penser que les patients renoncent aux soins classiques pour des raisons financières : ils renoncent soit car les délais sont trop longs, soit pour des soins réellement coûteux que sont l’audio prothèse, les prothèses dentaires ou l’ophtalmologie. »
Les soins mentionnés sont en effet encore bien plus chers que ceux d’une « simple » consultation. Néanmoins, cette hausse des tarifs risque potentiellement de décourager ceux et celles qui n’ont ni mutuelle, ni les moyens d’avancer ces sommes.
Qu’en est-il de l’accès à la contraception pour les jeunes filles de 15 à 18 ans ?
Ce qui avait plus particulièrement attiré mon attention dans cette annonce, c’était le cas des premières consultations de contraception ou de prévention des MST chez les jeunes filles de 15 à 18 ans (CCP).
Il arrive souvent à l’heure actuelle que ces consultations soient expédiées : on arrive, on nous prescrit la première pilule qui passe sans même demander automatiquement si l’on présente des risques et des contre-indications comme le fait de fumer, sans nous en expliquer le fonctionnement.
Jean Paul Hamon reconnaît cette situation, et il mentionne notamment « un retard dans la pose de stérilet sur les jeunes femmes nullipares ».
Jean Paul Ortiz, président de la CSMF, un syndicat qui n’a pas signé la convention car il considère en fait que le champs de ces consultations complexes et très complexes devrait être encore davantage étendu, insiste sur le fait que c’est justement une manière de régler ce problème :
« 46 euros, ça veut dire que c’est une consultation complexe qui a un contenu, et grâce à ça on va y passer le temps nécessaire. »
Qu’est-ce qui garantit aux patient•es que ce temps leur sera véritablement consacré ? Je suis personnellement dubitative, ce dont je lui fais part. Jean Paul Ortiz me répond :
« On ne peut pas garantir que tout sera réglé du jour au lendemain, mais l’idée c’est bien ça, de mettre en place les outils, les moyens y compris financiers et organisationnels pour que les médecins qui voient une jeune fille pour une primo consultation aient clairement le temps pour lui expliquer les MST, la contraception.
Ça ne peut pas être une consultation ordinaire, c’est pour ça qu’elle est mieux valorisée, ça cible cette consultation pour que ce soit fait correctement. »
Ça signifie quand même payer plus cher cette consultation ?
Mais ce qui m’importe encore davantage, c’est que ce type de consultation reste accessible au plus grand nombre ! Et si le tarif augmente à 46 euros, cela peut compliquer l’accès des personnes aux moyens financiers limités… Jean Paul Ortiz précise :
« Ça ne coûte rien aux jeunes filles, c’est remboursé à 100% : ça ne coûtera pas plus cher à la patiente mais permettra au médecin d’y passer plus de temps, d’y mettre un vrai contenu. »
Effectivement, le texte indique :
« La consultation de contraception et de prévention est dénommée CCP. Cette consultation à fort enjeu de santé publique est réservée aux jeunes filles de 15 à 18 ans et prise en charge dans les conditions définies à l’alinéa 21 de l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale.»
Et en fouillant, on se rend compte que ça correspond à un remboursement intégral. Cependant, cela n’enlève pas le fait que dans la majorité des cas, il faut avancer les frais de consultation.
Difficile par exemple, pour une jeune fille de 15 ans qui ne souhaite pas en parler à ses parents mais n’a pas ce montant à sa disposition ? Jean-Paul Hamon veut rassurer :
« On peut pratiquer le tiers payant et on a demandé à ce que ce soit anonyme : il y a la possibilité de mettre un numéro fictif de sécurité sociale qui permet au médecin de se faire rembourser la consultation et qui permet que la consultation de la jeune fille ne soit pas connue des parents. »
Reste que ça, c’est valide si l’on a une carte vitale. Or, la délivrance d’une carte vitale si elle est possible à partir de 12 ans, n’est automatique qu’à 16 ans… Quid donc, des jeunes filles de 15 ans ?
À ce sujet, j’ai contacté la Caisse Nationale d’Assurance Maladie ainsi que le Ministère des solidarités et de la santé pour savoir si quelque chose était prévu pour ces cas particuliers, et j’attends pour l’heure leurs réponses.
Mise à jour du 15 septembre 2017 – Le service presse de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie m’a recontactée cet après-midi, notamment pour répondre à cette dernière question au sujet des jeunes filles ne disposant pas de carte vitale.
« C’est une consultation qui de manière certaine est prise en charge à 100%, peut faire l’objet du tiers payant et peut être anonyme à la demande de la jeune fille.
On est entrain de définir précisément quelles sont les modalités pour qu’elle soit conforme à son objet : expliquer aux jeunes femmes les enjeux de la contraception et des MST. Donc tout l’enjeu c’est de faire en sorte qu’il y ait le minimum de barrières possibles.
En principe, ça devrait fonctionner pour ces jeunes filles sans carte vitale exactement comme ça fonctionne pour les consultations pour une contraception d’urgence : il est possible de demander à ce que ça n’apparaisse pas dans le relevé des parents, les médecins disposeront d’un outil informatique pour cela. »
En principe donc, peu importe la situation financière et familiale des jeunes filles, elles ne devraient pas avoir à avancer les 46 euros ou à informer leurs parents.
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Les Commentaires
La majorité des consultations complexes sont réservées aux spécialistes dans la nouvelle tarification, pour les med gé il y a contraception et obésité je crois