Tu es sans doute au courant : les inégalités de salaires persistent entre les hommes et les femmes. Au global, les hommes gagnent toujours 25,7 % de plus que les femmes en France. Et si l’on compare à poste équivalent (donc en prenant en compte les temps partiels, les secteurs d’activité non-mixtes, etc), un écart de 10% subsiste, selon le Ministère du Travail.
Demander une augmentation et le syndrome de la bonne élève
Pour mettre fin à cette discrimination pure et simple, les entreprises de plus de 1.000 salariés doivent mettre en ligne avant le 1er mars leur index égalité (les plus petites boîtes ont une année de rab’ mais devront s’y plier aussi, à partir de 50 salariés). Il s’agit d’un score sur 100 calculé à partir de plusieurs indicateurs. En-dessous de 75 points, les entreprises seront susceptibles d’être sanctionnées financièrement.
En attendant, tu peux essayer d’agir concrètement pour l’égalité et le bien de ton compte en banque en demandant une augmentation. (Bon, si tu es un homme, seule la seconde partie de ma phrase précédente fonctionne évidemment).
Je ne sais pas pour toi, mais de mon côté, demander une augmentation n’est clairement pas un truc inné chez moi. J’ai plutôt tendance à me dire que si je fais du bon boulot, ça va se voir et finir par être récompensé, non ? (Coucou le syndrome de la bonne élève qui attend ses bons points !)
Eh ben, en fait non, c’est rarement le cas. Si tu ne demandes pas, tu n’obtiens pas. Alors voilà un article avec quelques conseils glanés auprès de spécialistes pour passer à la table des négociations. (Et si cela te semble aussi effrayant que de monter à la tribune de l’ONU, c’est normal, accroche-toi !)
Quand est-ce qu’on demande une augmentation salariale ?
Tu aimerais savoir quand te jeter à l’eau pour demander plus d’argent ? « Il y a deux moments clés pour (re)négocier son salaire : lorsque l’on change d’entreprise et lorsque l’on change de poste en interne », explique Anne-Laure Guiheneuf qui a créé un module de formation à la négociation salariale au sein de l’école de commerce nantaise Audencia. « Quand on reste sur le même poste, la marge de manœuvre est moins importante. »
Ne rate donc pas le coche, la prochaine fois que tu changeras de job. S’il n’y a pas de changement pour toi à l’horizon, tu peux quand même tenter le coup. Renseigne-toi d’abord au sein de ton entreprise, auprès de tes collègues par exemple, sur la procédure habituelle pour demander une augmentation.
En général, les grands groupes ont des processus très cadrés, avec une période précise de l’année où demander une augmentation (en général au moment de ton entretien annuel). Dans les plus petites structures, il y a souvent plus de flexibilité.
« J’encourage les femmes à être proactives et à ne pas attendre l’entretien individuel, car leur demande risque d’être noyée dans la masse », précise Anne-Laure Guiheneuf qui conseille de rebondir sur un succès pour venir demander une augmentation. Si tu viens de signer un gros contrat, que tu as eu un retour très positif d’un client ou que tu as réussi à régler une situation compliquée, c’est un moment propice pour discuter de ta rémunération.
Cela peut toutefois valoir le coup de te renseigner un peu sur les finances de ton entreprise. Si elles sont dans le rouge, il y a malheureusement peu de chances que ta demande aboutisse. Mieux vaut attendre des jours meilleurs pour faire ta demande.
À qui adresse-t-on sa demande d’augmentation ?
La première personne à contacter, c’est ton ou ta manager. « Il faut vraiment s’en faire un·e allié·e car c’est la personne qui suit ton travail au quotidien et aura donc des éléments tangibles pour appuyer ta demande », préconise Océane Roudier, Responsable des Ressources Humaines chez Exomind, un cabinet de conseil en transformation digitale.
Si les relations avec ton ou ta N+1 sont compliquées ou que tu as le sentiment de ne pas être écouté·e, tu peux aller voir les RH en direct, mais attention à ce que ton ou ta manager ne se sente pas évincé·e.
Évite aussi de demander ton augmentation entre deux portes de manière informelle. Il vaut mieux obtenir un rendez-vous au calme avec ton ou ta manager pour « parler de ta carrière ». Tu auras alors plus le temps de dérouler tous tes arguments.
Pour préparer l’entretien, tu peux te renseigner sur ta « valeur » sur le marché. Combien sont payées les personnes qui font le même travail que toi dans l’entreprise ou en-dehors ? Il existe notamment des études sur les rémunérations moyennes publiées chaque année par l’Apec ou les grands cabinets de recrutement. Cela te donnera un ordre d’idée du salaire auquel tu peux prétendre si tu bosses du côté corporate de la force.
La positive attitude
Je te conseille aussi chaudement de fourbir tes arguments en réfléchissant à toutes tes réussites et à ce que tu as apporté à l’entreprise ces derniers mois. Si tu as rempli (ou dépassé) tes objectifs, c’est une excellente entrée en matière, mais tu peux aussi réfléchir à des succès plus qualitatifs (satisfaction d’un client, organisation d’un projet pour l’équipe, etc).
Ça y est, tu es devant ton ou ta manager ? Bien joué ! Il te reste maintenant à adopter une attitude positive et à essayer de rester factuel·le. Centre l’entretien sur toi, tes réussites et ta demande, en tentant de ne pas te laisser parasiter par des émotions négatives (frustration, colère, etc). J’ai bien conscience que c’est plus facile à dire qu’à faire lorsqu’on se sent victime d’une injustice.
Inutile d’évoquer ta situation personnelle pour tenter de négocier. Le fait que ton ou ta conjoint·e soit au chômage n’est pas un argument valable pour ton entreprise. Attention aussi à parler à la première personne en disant « JE » plutôt que « ON » ou « NOUS ». Oui, je sais, c’est parfois compliqué pour les femmes, traditionnellement encouragées à être modestes et discrètes.
Pourquoi Jean-Mi est mieux payé que moi ?
En parlant de femme, si tu as découvert que tu étais moins payée que tes collègues au même poste et avec le même niveau d’expérience, tu vas peut-être avoir envie de tout casser d’utiliser cet argument pour négocier.
Sur ce point, il n’y a pas de consensus entre les expertes que j’ai interrogées. Certaines déconseillent de rentrer dans des comparaisons entre individus style « Jean-Mi est mieux payé que moi, c’est pas normal ». D’autres pensent qu’on peut l’amener subtilement.
Un peu plus subtilement que ça…
« On peut dire : je sais qu’un tel gagne tant et je ne comprends pas pourquoi il y a une différence entre nos salaires puisqu’on fait le même travail », suggère Noémie Le Menn, présidente d’Up Change conseils et coaching, et autrice du livre Libérez-vous des réflexes sexistes au travail. « On ne menace pas, on ne se plaint pas, on pose une question afin d’ouvrir le dialogue », complète-t-elle.
Si tu es dans ce cas de figure, tu peux aussi aller voir les représentants du personnel. C’est leur rôle d’aller porter ce genre de revendications auprès de la direction.
Qu’est-ce qu’on demande ?
Une fois que tu as exposé tes réussites et déroulé tes arguments, tu peux demander une augmentation, en donnant par exemple une fourchette du salaire que tu aimerais avoir. Mais il n’y a pas que le salaire fixe qui peut être négocié. Pense aussi à tout ce qu’il y a autour : une prime, une part variable de ton salaire indexé sur tes objectifs, des avantages en nature (voiture de fonction, téléphone, etc).
Dans les périodes de vaches maigres, il est parfois plus simple pour une entreprise de te proposer ce genre de compensation. Tu peux même pourquoi pas venir négocier plutôt une formation, du télétravail ou un aménagement de poste si ce sont des pistes qui t’intéressent. (Mais si c’est du pognon que tu veux, demande du pognon !)
En guise de conclusion, tu peux demander à ton ou ta manager quand est-ce que tu auras une réponse, et vous pouvez dès maintenant reprogrammer un rendez-vous. L’idée, c’est de ne pas laisser traîner la demande pendant des mois (ou des années).
J’espère que ces quelques conseils t’ont été utiles et que cet article t’aura donné envie de te lancer. Il n’y a aucune honte à demander et tu n’as RIEN à perdre. Même si ta demande n’aboutit pas, cet entretien sera l’occasion de mettre en valeur ton travail auprès de ton ou ta chef·fe, et à terme cela s’avèrera sans doute payant. Bonne chance !
Pour aller plus loin :
- Si tu vis dans l’Ouest de la France, tu peux t’inscrire à la formation gratuite pour les femmes NegoTraining proposée par l’école de commerce nantaise Audencia.
Tu as d’autres conseils à donner pour bien négocier son salaire ? Partage-les dans les commentaires !
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Il n'y a pas encore de commentaire sur cet article.