Il suffit. L’autre jour, on discutait de Sex & The City avec les filles de la Rédac et leur vision idéalisée de la série m’a plutôt scié. Quand j’ai commencé à leur expliquer que, si j’avais passé pas mal de bons moments, la série n’était pas exempte de tout reproche, j’ai eu face à moi des regards médusés, puis des tentatives de me raisonner façon « mais non, c’est pas possible ce que tu racontes là, je l’ai pas capté comme ça, moi ». Un peu comme un môme quand il se bouche les oreilles en faisant « gnagnagangangna » pour ne pas entendre des choses qui lui bouleverseraient son monde.
Le film sort fin mai, il est donc temps de soumettre aux madmoiZelles mon point de vue. Let’s go, voici cinq raisons qui font que Sex & The City, c’est pas si bien que ça. Tu m’diras c’que t’en penses.
Parce que le métier de chroniqueuse tel que le pratique Carrie Bradshaw, c’est une immense illusion.
Sans déconner. Des chroniqueuses comme Carrie, il doit en exister un/une par (grand) journal. Un papier à rendre par semaine, bien payé, le reste du temps à sortir, la truffe à l’air, pour trouver un truc à raconter. Sex & The City a peut-être créé des vocations chez certaines plumes talentueuses, mais elle a surtout envoyé au casse-pipe des tas de nanas qui se voient bien devenir les futures Carrie Bradshaw. Or, le quotidien de la journaliste est bien moins glamour, sans oublier le parcours du combattant (à grands coups de stages, même une fois diplômée) pour se faire une place dans ce secteur où les places sont chères. Attention, révélation : non, ce n’est pas parce qu’on a un Mac portable, qu’on pianote en pyjama sur son lit en dégustant un thé et en fumant une clope l’air inspiré, qu’on devient une Carrie Bradshaw. Non, non et non.
Parce que la série est bien trop tendre avec Big
Big, c’est le Diable, et pas seulement pour Carrie, mais pour n’importe quelle nénette. Pas lui en tant que tel, mais ce genre d’homme. Celui qui sent qu’il plaît aux femmes, qui en connait tout un rayon sur elles, qui sait sur quel bouton appuyer pour les faire craquer… mais qui ne pense au final qu’à sa petite gueule et qui leur brise le coeur sans le moindre remords. Là où ça cloche selon moi, c’est que le beau brun ténébreux est présenté comme le tombeur de ces dames, irrésistible au possible. Et ça a marché, puisqu’au sein de la Rédac, aucune autre fille n’avait mon point de vue sur le bonhomme.
Pourquoi ça ? Peut-être parce qu’à aucun moment, Big ne s’est pris un violent coup de genou dans les roustons – et pourtant, c’est pas les occasions qui manquaient de lui envoyer la purée. A aucun moment, Carrie ne passe le cap du « laissons mourir ce trouduc, il n’en vaut point la peine et attardons-nous sur ma petite tronche »… Ce qui m’amène au point suivant.
Parce que Carrie est une tête-à-claques sentimentale
Parce pour chier dans la colle dans une relation, il faut être deux. Et là, il faut dire que Carrie, dans la série « 13 ans d’âge mental dans la relation à l’autre », elle se pose comme championne du monde. Mais En regardant la série, je me suis à plusieurs reprises écrié devant ma télé « MAIS Y A-T-IL QUELQU’UN POUR LUI DIRE QUE LE PRINCE CHARMANT, CA N’EXISTAIT PAS ? ».
En transformant Carrie bien trop souvent en victime de l’affreux Big, en lui faisant foirer sa seule relation qui en valait la peine – Aidan, alias Le Bûcheron (avec Big, en manque à ce moment-là), je ne suis pas convaincu que le personnage de Sarah Jessica Parker ait fait avancer l’inconscient collectif féminin dans le bon sens. A moins que, pour se sentir vivante, la Femme (avec un grand F) ait besoin d’être malheureuse. Va savoir.
Parce qu’à part Samantha, les personnages tournent en rond.
Pas évident pour des scénaristes de faire évoluer des personnages de façon cohérente sur six saisons .Les champions du monde en la matière resteront sans doute les auteurs de Friends, qu’il va être difficile de détrôner tellement l’évolution de chacun des caractères est une forme de petit bijou.
Ceux de Sex & The City ont opté pour la constante : exceptée Samantha, magnifique avec son bogosse à la fin de la saison 6, les autres personnages principaux continuent d’évoluer dans leurs flips et leurs névroses. Certes, ça contribue à faire (beaucoup) rire durant les trois-quatre premières saisons, mais en avançant dans la série, on pourrait attende des personnages qu’ils mûrissent, qu’ils apprennent de leurs erreurs.
Raté. Carrie continue à tomber connement dans les bras de Big, Big continue à vouloir faire le vieux garçon (et la sourde oreille), Charlotte est toujours aussi flippée de l’existence et Miranda continue, malgré son adorable mec, à faire son independant-strong-woman agaçante au plus haut point pour le mâle que je suis.
Parce que depuis la fin de Sex & The City, les séries US ont passé un cap…
Parce que oui, avec le recul, Sex & The City semblent un peu dépassée. Depuis la fin de la série en 2003, les auteurs des séries US ont compris que le rêve à tout prix n’était pas forcément le meilleur ingrédient pour conduire une série au succès. Aujourd’hui, les spectateurs attendent de pouvoir s’identifier un maximum aux personnages, avec des vraies VDM comme on peut en avoir, nous. Moins de rêves certes, mais plus de réel et de proximité.
Pire, le subversif de Sex & The City fait aujourd’hui un tantinet chiqué. Depuis, HBO a produit des séries de la trempe de Six Feet Under, Showtime a lancé The L Word ou plus récemment l’excellente Californication. Du subversif qui, même s’il sent encore parfois le bubble-gum, recale les périgrinations de Carrie au rang de pleurnicheries dignes de la cour primaire.
Alors oui, les histoires de cul ouvertement assumées, racontées et montrées (presque montrées, on n’a jamais vu le moindre téton de Carrie) auront sans doute ouvert la voie à leurs successeurs, mais je me demande toujours à quoi ressemblerait un Sex & The City dont la saison 1 démarrerait en 2008…
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Les Commentaires
Ptêtre qua l'époque c'était nouveau, mais franchement maintenant...