Ça me fait toujours doucement ricaner quand je vois des touristes prendre en photo le métro à Paris (« c’est bon, c’est le métro quoi, arrêtez »). Mais avec le recul, les Italiens doivent bien me trouver chelou aussi, à toujours vouloir immortaliser la scène quand les pizzas arrivent.
En 2009…
… en 2011, rien n'a changé !
Ndlr : La chronique qui suit est subjective. Comprendre : elle ne revendique aucun caractère scientifique et absolutiste dans les propos qu’elle déploie. Elle n’est pas le fruit d’un travail d’ethnologue, mais propose simplement, sur un ton bon enfant, un screenshot second degré de ce qui fait les différences culturelles entre un pays et un autre.
1. Les Italiennes ont un certain sens de la féminité
Comment ça, camionneur ?
Quand j’ai débarqué en Italie avec mon habituel combo jean-sneakers, je me suis vite sentie « garçon manqué » au milieu des jeunes filles apprêtées. En Italie, les filles aiment être séduisantes et coquettes, ce qui suppose longs cheveux bruns, peau hâlée, vêtements casual dans des matières-simples-mais-classes et talons hauts. Ce goût du style « bien habillé » existe aussi dans notre hexagone, mais en Italie, c’est la majorité des filles qui semble s’être fait passer le mot : pour être une meuf bonne, il faut savoir mettre en valeur ses atouts féminins. Du coup, elles font péter les longues chevelures lissées, s’entichent des pièces basiques mais bien coupées de chez Max Mara, se poudrent les pommettes de paillettes dorées totalement raccord avec leur teint naturellement hâlé, et s’entichent d’une jolie paire de talons achetée à Milan et de soutiens-gorges Intimissimi.
Je me souviendrai toujours du soir de mon anniversaire en Erasmus, où j’ai troqué mes Nike et mon pantalon motif liberty pour une robe en velours et des talons Asos : mes flatmates italiennes se sont empressées de me dire que j’étais « carrément plus canon comme ça » et que le mascara que j’avais appliqué pour l’occasion (en plus de mon simple trait de khôl noir habituel) me donnait « un regard plus Femme » .
[rightquote]L’impression d’être la petite meuf je-men-foutiste que les tigresses du campus vont relooker afin de lui déployer tout son potentiel[/rightquote]S’en est suivi une sorte de coaching vestimentaire et make-up, où les filles ont essayé de me convaincre d’abandonner cette coupe de cheveux courte (« ça te donne un côté copine sympa, alors que tu pourrais être une lionne de désir »), d’arrêter de porter des baskets (« OK pour le footing, mais jamais dans la rue, attends ! ») et, parfois, de moins rire comme un camionneur. L’impression d’être la petite meuf je-men-foutiste que les tigresses du campus vont relooker afin de lui déployer tout son potentiel, ça me faisait bien marrer. À mes copines italiennes et femmes fatales 7j/7 : j’ai carrément hâte de vous revoir dans 10 ans, vous serez de sacrées MILFS, ça ne fait pas l’ombre d’un doute. (Ndlr : et bien sûr, je vous laisse imaginer leurs faciès choqués à chaque fois que je leur faisais des séries de rots).
2. Les mecs se doivent d’être virils
Du premier point découle celui-ci. Si les filles campent à la perfection le rôle de filles très filles, pour les mecs c’est pareil : il faut être un mec, un vrai. Ainsi, l’Italien modèle aime les jolies chemises, les cheveux courts et gominés, les pantalons bien coupés et les chaussures de ville sombres. En été, éventuellement, l’Italien portera des Sebago et un pantalon en lin (très pratique pour sentir la douce caresse du vent quand on roule en Vespa).
L’Italien est viril : il aime boire des verres avec ses potes et leur faire des grosses tapes dans le dos, payer des coups aux filles et leur sortir des sourires sponsorisés par Colgate (ou Marvis, c’est plus couleur locale). Quand les Italiens font des blagues, les Italiennes rigolent. Quand les Italiens payent le resto, les Italiennes ne sortent jamais la CB pour éventuellement riposter. Bref : en Italie, les rapports hommes / femmes sont régis sur la base des normes convenues par la société sur la division sexuelle des comportements. Ce code de conduite simplifie bien des situations, là où en France « on se prendrait un peu plus la tête ».
[rightquote]En boîte, il n’est pas choquant qu’une folle soirée démarre par une main au cul…[/rightquote]Par exemple, en boîte, il n’est pas choquant qu’un Italien aille mettre une main au cul d’une Italienne – tout est simple : si la fille accroche, ils dansent ensemble et repartent dans le même taxi à la fermeture du club, sinon, un petit « vaffanculo » s’échappant de lèvres pulpeuses et glossées est tout à fait accepté. Ce qui, vous en conviendrez, a au moins le mérite d’être clair, en comparaison avec les étranges parades amoureuses auquelles nous les Français, nous adonnons trop souvent (cette fois-ci sponsorisées par Doliprane).
3. La pop nationale n’est pas une honte
Bon alors, autant chez nous, la variété française ça nous fait marrer, autant en Italie, les chanteurs de pop italienne sont de vraies égéries. Je pensais que c’était une spécificité un peu décomplexée de ma coloc italienne d’écouter du Umberto Tozzi à fond dans la cuisine dès 9h du matin, ou une vision un peu (disons..) « vintage » de l’humour, due à la fatigue pendant les révisions. Mais que nenni.
[rightquote]La pop italienne, ils ne la prennent pas à la légère[/rightquote]En faisant mes courses chez Coop, en allant boire un spritz au Duomo, en allant en soirées chez des potes italiens, j’ai vite compris que la pop italienne, bah les Italiens ils n’écoutent pas ça en mode private joke.
Une mélodie entêtante, des grands envolées lyriques au piano, des paroles racontant des histoires d’amour impossible, une voix rauque, un chanteur qu’on imagine forcément avec les cheveux poivre et sel et une petite barbe de 3 jours, l’impression qu’il va mourir à la fin de sa chanson tellement les émotions sont intenses : ce genre de chansons fait FORCÉMENT ET SYSTÉMATIQUEMENT un tabac sur les radios italiennes.
Et bien que sur le moment, subir tout ça me saoulait parfois, je dois dire qu’aujourd’hui revenue en France, ça me fait un petit pincement au coeur (putain, je vais même vous avouer que j’ai versé une larme en regardant la vidéo montage super mal foutu sur fond de grosse musique italienne, réalisée par un pote Erasmus, AAAH). Heureusement, un petit tour sur le Facebook d’Astrella, mon ex coloc en Italie, et je retrouve tous les tubes du moment là-bas. Cadeau => c’est celui qu’elle a posté aujourd’hui :
4. La gastronomie est une cuisine simple et traditionnelle
Vous n’avez pas pu passer à côté de cette grosse tendance du moment en France (et ailleurs) qu’est celle de la nouvelle cuisine / cuisine contemporaine (auquel il faut ajouter les émissions culinaires à la télé, le fooding, le magazine Fricote, les happenings gustatifs, les veillées Foodstock, le règne des verrines, les coffrets cadeaux livre + moule à cake à l’entrée de la Fnac, le revival des cours de cuisine entre midi et deux, la mode des « hey venez les potes, on fait une soirée Dîner presque parfait » et la folie des tapas et amuse-gueules). Cette frénésie est nettement moins présente en Italie, pays où tous les habitants restent à vie « les petits-fils et les petites-filles de leur grand-mère italienne ». Comprendre par là : ils semblent avoir juré fidélité aux recettes traditionnelles de Mamie, entre la tomate et la mozzarella.
Ça ne m'a pas empêché, un jour, d'essayer de faire des lasagnes au chocolat (SACRILÈGE) à mes potes italiens
[leftquote]La trattoria et la pizzeria sont vues comme des cantines, qui plairont à coup sûr[/leftquote]Les Italiens sont nombreux à ne pas voir l’intérêt de chercher l’innovation en cuisine alors que les grands classiques ne déçoivent jamais. Pizza diavola, pâtes aux épinards et à la crème fraîche, gratin d’aubergines, spaghettis à la sauce bolognaise : pourquoi aller chercher la coquetterie d’une belle présentation en verrine lorsqu’un bon plat tradi fait l’unanimité ? Par ailleurs, les Italiens envisagent le restaurant comme le prolongement de leur maison : ils ne se mettent pas forcément en tête, comme nous les Français, de commander « un truc qu’ils ne pourraient pas réaliser chez eux ».
Au contraire, la trattoria et la pizzeria sont vues comme des cantines, des endroits où l’on peut commander des plats auxquels on est habitués et qui nous plairont à coup sûr. Parlons aussi du frigo italien : il est toujours plus ou moins rempli des mêmes choses (des tomates fraîches, du pesto, des piadina à faire réchauffer) et d’une semaine à l’autre, il y a fort à parier que la liste de courses ne change pas d’un poil (charcuterie, fromages, basilic, « oh et chéri, tu seras gentil, pour changer cette fois tu prendras des fusili au lieu des macaronis ! » )
Une petite fixette, non ?
5. La jeunesse italienne se bourre la gueule au vin rouge
Vous m’étonnez qu’à me ramener en shouille avec une teille de vodka ou de quoi faire des whisky-coca, j’avais un peu l’air d’une alcoolo ! Les Italiens, comme les Français, adorent le vin, mais ne le cantonnent pas qu’au dîner : ils le prennent aussi à l’apéro et pour se mettre une murge.
Coucou, j'ai fait un *petit* apéro avec 4 Italiens !
Évidemment, on a toutes des copines qui n’aiment pas l’alcool fort et préfèrent boire du muscadet pour s’enivrer progressivement. Et évidemment, en Italie, il y a bien des jeunes qui s’achètent des grosses bouteilles de gin pour se mettre une race.
Mais en tendance, ne trouver que du vin à un apéro italien n’est pas surprenant (et d’ailleurs, ça ne revient pas à dire que vos convives sont de petites frappes – détrompez-vous, ils sont largement capables de boire des litres et des litres de vin jusqu’à ramper par terre).
Je me souviens qu’un samedi soir en Erasmus, le parfait combo pour faire la fête, c’était aller dans un café à l’heure de l’aperitivo, se commander un grand verre de vin, se ruer sur les assiettes d’amuse-gueules et les bols d’Amica chips (« chips de l’amitié », attendez, avec un nom pareil, on est ENCORE plus obligés de craquer) que le serveur ramène gratuitement (les Italiens prennent l’apéro en terrasse très au sérieux, vous aurez toujours de quoi faire un dîner apératoire gratuit au café – ça change des cacahuètes premier prix de Paris, vous en conviendrez) et prolonger la soirée dans un appart avec des litres et des litres de piquette. Ensuite, tout bourrés, vous irez en boîte écouter de la pop italienne (cf point 3 ci-dessus, donc).
Allez, maintenant que vous avez lu cet ingrat papier plein de clichés sur les clichés des Italiens, courez rendre justice à nos voisins de la Botte en lisant la Chronique d’une Italienne en France. La défense a elle aussi le droit à la parole.
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Les Commentaires
Primo, je ne sais pas si c'est l'effet blonde aux yeux bleus, mais, j'ai trouvé les italiens FOUS. Du genre à te faire voler en dansant en boîte, limite j'avais le malheur de lacher la main d'un italien, je me retrouvais dans les bras d'un autre dans la seconde sans rien faire. Un soir où on s'était retrouvés entre pleins d'erasmus pour boire un peu avant d'aller en boite, un italien a commencé à me parler, et de façon tout à fait "normale", il a passé sa main dans mon dos, au dessus du t-shirt, et il a degraffé mon soutif en un claquement de doigts ... ou encore les sifflements accompagnés d'un "puta", le mec qui te colle sa main sur l'entre-jambe dans le bus bondé, t'as beau bouger autant que tu veux, ça ne change rien. Et le mattage incessant, mais à vrai dire, je pense que c'est plus culturel qu'autre chose, dans le sens où ça vaut autant pour les hommes que pour les femmes et les enfants. En France, si la personne qu'on regarde croise notre regard, en général on baisse les yeux, là non. J'ai trouvé ça vachement déstabilisant.
Sinon oui, j'ai trouvé les chauffeurs de bus malades, ils roulent super vite, et si jamaisi ils n'arrivent pas à fermer les portes, ba roule ma poule à 50km/h dans les virages.
Et pour avoir vécu 5 jours avec 3 italiens, j'ai eu le plaisir de goûter à la vrai carbonara sans crème fraîche (qui est orgasmique), moi qui avais du mal avec le goût du café, 10 expressos ultra corsés plus loin (mon mug de café quotidien doit être une aberration pour eux), je me surprend à trouver mon café au lait léger très fade : j'ai doublé la dose de café et désormais je me passe de lait. Et oui, ils sont calés sur la politique et la culture française, peut-être même plus que nous pauvres français, ça en est presque complexant.
(pardon pour ma formulation approximative, trop de choses à dire !)