Il y a deux mois, j’écrivais ma première chronique d’une ex-fumeuse. Quelques jours plus tôt, on était le 30 janvier, j’avais arrêté la cigarette pour toujours, après plus de sept ans d’addiction ; c’était un peu difficile, mais pas tant que ça. Une semaine plus tard, je revenais dans une deuxième chronique sur la prise de confiance, sur l’impression d’avoir atteint une sorte de vitesse de croisière de l’abandon de la clope.
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Deux mois depuis ce second article, coucou, je suis de retour ! Comment ça se passe, est-ce que j’ai arrêté la junk food en même temps, est-ce que j’ai repris la cigarette, est-ce que j’ai changé de personnalité, est-ce que j’ai développé des tics, est-ce que je suis partie me ressourcer au Tibet ? C’est ce qu’on va voir !
Message à l’attention de toi si tu es là parce que tu as décidé d’arrêter de fumer (t’as fait le plus dur ma gueule).
Replonger et fumer en soirée : un échec ?
Je vais en parler d’emblée comme ça, c’est fait : oui, j’ai craqué. J’ai craqué une première fois, quand, un peu pompette, j’ai eu envie de tirer une taffe sur la cigarette d’une copine. J’ai trouvé ça absolument dégueulasse, comme au premier jour de ma première cigarette.
Dix jours plus tard, j’ai vécu un gros stress pendant quelques heures. Rien de bien dramatique, mais suffisamment pour que je réclame une cigarette à quelqu’un. Puis une deuxième. Puis une troisième.
Le lendemain matin, quand je me suis réveillée, j’ai paniqué. J’avais peur que ce soit foutu, que mes deux mois sans cigarette n’aient servi à rien. Je repensais à tous les messages alarmistes qui disent qu’il suffit d’une fois, d’une clope pour replonger.
Laisse-moi te dire que je m’en suis sortie. Passé ce moment de panique, j’ai arrêté d’y penser, j’ai fait ma vie, continué ma journée comme j’avais prévu de la laisser se dérouler. Le soir, je suis allée boire un verre en terrasse avec une copine fumeuse et définitivement, non, je n’avais pas envie de lui en demander une. Pourquoi ? Probablement parce que j’ai disséqué les raisons qui m’avaient poussé à fumer à nouveau, et la première d’entre elles, c’est que je me suis sentie trop forte.
Je n’avais plus du tout envie depuis plusieurs longues semaines, plus jamais. Ni le matin en sortant de chez moi, ni le soir en sortant du travail, en soirée ou en rentrant de soirée… Je pensais vraiment que j’allais reposer la première cigarette de la soirée où j’ai craqué, écoeurée, et je l’ai pourtant finie. Je me suis trop fait confiance : j’ai oublié que je pouvais avoir l’illusion d’avoir envie d’une cigarette à nouveau, un jour. C’est important de se faire confiance et de se sentir forte, c’est même primordial pour arrêter de fumer, mais ça ne veut pas dire qu’on doit oublier de se rappeler que certains risques existent.
Si tu as arrêté de fumer et que tu viens de craquer, ou si tu craques un jour, rappelle-toi d’un truc : on est tous faillibles. Même si tu as perdu tous tes réflexes de fumeuse, même si tu te crois intouchable, ça peut arriver. En oubliant cette éventualité, tu perds des yeux le danger qu’elle peut représenter. Ça ne veut pas dire qu’il faut tout le temps penser à la cigarette (ce serait tout à fait contreproductif également) ! Mais penses-y, de temps en temps, pour te rappeler que cette option-là n’a rien à faire dans ta vie.
Et si ça t’arrive de craquer, ne te flagelle pas, par pitié. Ne te torture pas l’esprit avec cette soirée ou cette journée où tu as fumé. Réfléchis aux raisons qui t’ont poussée à le faire. Bien sûr, il vaut mieux tout faire en sorte pour que ça n’arrive pas, mais c’est arrivé alors rien ne sert d’en faire tout un drame. On ne peut pas revenir en arrière, autant en tirer des enseignements pour que ça n’arrive plus.
Ma technique en cas d’envie de cigarette
Le soir où j’ai craqué à nouveau, j’étais trop obnubilée par autre chose pour utiliser ma technique anti-craquage. Sinon, à tous les moments où j’ai eu envie de fumer (pour l’instant seulement au début du sevrage), j’ai eu une méthode toute simple non pas pour me passer l’envie, mais pour me rappeler que je n’en avais pas envie (sémantiquement parlant, c’est drôlement différent).
Cette technique, elle est toute simple : je me focalise sur tous les trucs qui sont mieux depuis que j’ai arrêté de fumer. Je passe en revue des trucs comme…
- mes cheveux qui graissent moins vite
- l’absence de besoin de trouver un bureau de tabac ouvert quand je suis en manque
- pouvoir profiter des repas en terrasse sans avoir l’impression de gêner à allumer une cigarette alors que les gens autour n’ont pas fini
- mes réveils plus chantants, avec mon nez moins sec et mon oreiller qui ne sent rien
- mon souffle plus clair, ma toux qui n’est plus caverneuse et inquiétante comme elle l’était
- surtout ma fierté, tellement grande, tellement forte, chaque fois que quelqu’un me demande si je fume et que je réponds « Plus ! J’ai arrêté » au lieu de me contenter de dire « non ». Vraiment, ça me fout une patate vitelotte de dingue à chaque fois.
Moi les dernières années de mon addiction à la nicotine.
Ça prend trente secondes de repenser à ces quelques trucs qui font que je préfère ma vie aujourd’hui. Trente secondes, c’est rien, et ça m’a évité tellement de clopes dont je croyais avoir envie à cause du manque de la nicotine…
Le reste du temps, j’évite d’avoir un paquet sur moi, même pour rendre service à un ou une ami-e en passant lui en acheter un, j’ai donné tous mes briquets…
Rien ne me rappelle, chez moi, dans mes poches ou dans mes sacs, mon ancienne addiction. Et rien que ça, ça aide drôlement lors des premiers temps.
Personnellement, avoir repris le sport est le truc qui m’a le plus aidée, parce que j’ai pu réaliser clairement les efforts que je faisais, en augmentant chaque fois le temps que je peux passer sur le tapis ou le vélo elliptique. Mais je crois vraiment que j’aurais pu réussir même sans en faire puisque j’ai réalisé récemment que je n’avais pas fait du sport pour arrêter de fumer, mais arrêté de fumer, entre autres, pour faire du sport. J’en avais envie, quoi, sans me l’avouer, parce que je pensais que ce serait impossible que je puisse arrêter de fumer.
Ce qui aide encore plus, comme je l’ai dit dans les autres chroniques, c’est de voir des gens fumer, paradoxalement. Pas par sadisme hein, entendons-nous bien (azy tu m’as prise pour Jafar ou quoi) ! C’est simplement que quand je les vois faire des trucs du quotidien avec une clope à la main, ça me rappelle qu’ils vivent juste une existence similaire à la mienne, mais en respirant un truc que je ne voulais plus respirer. Ça ancre ça à nouveau dans le concret : les fois où j’ai eu envie de fumer de manière viscérale, les premières semaines, je glorifiais la cigarette, comme si c’était quelque chose d’extraordinaire dont je me privais. Voir quelqu’un fumer une clope sans larmes de jouissance dans les yeux me rappelle à quel point c’est un geste normal, banal. Un geste qui ne m’apportait plus rien, et que je ne voulais plus – que je ne VEUX plus – voir faire partie de ma vie.
La joie d’avoir arrêté de fumer
Y a un truc vraiment, vraiment tout con, mais qui me remplit de bonheur chaque fois que je repense au fait que j’ai arrêté de fumer : j’ai à nouveau vraiment envie de voyager, et je sais qu’il y a plus de chances que ça m’arrive.
Pas seulement parce que je ne dépense plus 6,50€ par jour pour m’acheter un paquet et que je mets de côté pour partir. Ça compte, bien sûr, mais c’est loin d’être ce qui me marque le plus. En réalité, ce qui change vachement, c’est que je n’ai plus peur de prendre l’avion, ou le train sur une moyenne ou longue distance.
J’osais pas vraiment me l’avouer, mais chaque fois que je réservais un billet pour les vacances, je pensais avec anxiété au temps que ça me ferait sans clope. Ma plus grosse crainte, c’était les retards d’avion, quand tu es dans la salle d’embarquement et que tu n’as pas de possibilité de sortir t’en griller une. Je préférais largement choisir l’option TGV, sortant à chaque arrêt en gare même si ça ne me laissait le temps de ne fumer que deux taffes, en tremblant de peur à l’idée de ne pas entendre le signal de départ. J’ai un peu sali ma vie pendant plus de sept ans, à la saupoudrer de stress sans m’en rendre compte.
Au bar, j’ai quitté des conversations super enrichissantes en plein milieu pour aller fumer. J’ai chopé la crève mille fois en préférant rester en terrasse en plein hiver. Entre les pensées de voyages auxquels j’ajoutais des pensées négatives en m’imaginant frustrée et d’autres moments géniaux, je me rends compte que j’ai gâché plein de trucs tellement cool. Je ne m’en veux pas de l’avoir fait ! Je profite de la joie de ne plus le faire : c’est différent.
Maintenant je kiffe, tout, tout le temps. Les moments compliqués, d’angoisse, de stress, de remise en question ou simplement de mauvaise humeur sont, comme je le disais dans la chronique #2, les mêmes aujourd’hui qu’avant, à la seule différence qu’avant, je les accompagnais d’une grande quantité de cigarettes qui me dégoûtaient (puisque j’en étais à un point où la clope me foutait la nausée).
Moi depuis que j’ai arrêté de fumer (en moins pénible) (j’espère) (dites-moi que oui svp)
Alors oui, j’ai eu un craquage, parce que je me sentais trop sûre de ne jamais avoir envie de replonger dans la clope. Mais maintenant que je suis consciente que ça peut arriver, je crois que ça a moins de chances de se produire à nouveau. J’ai craqué, mais ça n’entame ni ma joie, ni ma fierté, ni mes nouvelles habitudes, ni mon bonheur tellement fort chaque fois que j’en pète des paillettes de joie quand je réalise que je peux monter les escaliers sans haleter comme un phoque, par exemple.
Je suis concentrée sur les films que je regarde, sur le travail que je fais, sur les livres que je lis, sans pensée pour la cigarette, sans besoin d’allumer un bâton avec du tabac et de la nicotine dedans pour me donner l’illusion de m’aérer l’esprit. Après 7 ans d’addiction, j’ai réussi à me libérer de tout ça, j’ai « économisé » plus de 400€*, je me sens plus heureuse que jamais.
J’avais déjà conscience d’avoir une vie extrêmement cool… Je te raconte pas à quel point j’en suis dingue depuis deux mois.
*En vrai j’ai rien économisé du tout, je les ai de mon plein gré dépensé en restaurants, en bonne bouffe, en fringues et autres trucs qui me font VRAIMENT plaisir KESSIA ?
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Et cet article m'a reboosté ! Un petit craquage ce n'est pas la fin du monde, mais il faut rester vigilant et faire en sorte que ça n'arrive plus, comme tu le dis si bien. Merci @Sophie Riche