Quelle drôle de symbolique que la chevelure. Chez moi cela a été un combat permanent, entre tiraillements, tentatives de conformisation, destructions… Pour vous expliquer, je suis moitié Martiniquaise, moitié Corrézienne. Mes cheveux sont donc un mélange assez marrant de très frisé, bouclé et quelques rares soldats lisses. En langage technique, je suis entre le 3B et le 3C.
L’envie d’être « comme tout le monde »
Petite, ma tignasse était un trophée. Puis arriva l’école, le collège et l’envie d’être comme tout le monde. J’ai commencé à réclamer des brushings chez le coiffeur, puis des lissages brésiliens. Je tirais un maximum sur mes cheveux pour obtenir le moins de frisouilles possible. Puis j’appris à réaliser seule mes brushings, et c’est là que le cercle vicieux s’est enclenché.
De mes 15 à 24 ans, je me lissais les cheveux non-stop au fer à lisser et à coups de lissages brésiliens. Mes modèle capillaires étaient exotiques : Charlotte Gainsbourg, Freja Beha, Françoise Hardy, Anna Karina… J’en étais arrivée à un point où la réelle nature de mes cheveux m’était devenue totalement inconnue.
Cassés à cause de la chaleur à répétition, ils ne frisaient plus, ne brillaient plus. Les pointes partaient en miettes : partout où je passais, je laissais des petits bouts de cheveux. Mais putain que je me sentais bien, j’aimais pouvoir accomplir le fameux « coiffé-décoiffé » de la Parisienne type.
Et puis je suis tombée sur le film Good Hair de Chris Rock. L’interrogation de sa fille sur pourquoi elle n’avait pas de « bons cheveux » a terriblement fait résonner toutes ces années à repousser ma nature, à vouloir absolument avoir les cheveux de ma mère.
Pourtant, même en tombant sur des filles portant leurs cheveux au naturel, j’étais persuadée qu’à moi cela n’irait pas. J’étais tellement habituée à mon look gainsbourien. Née à Paris et n’ayant jamais vécu ailleurs qu’à la capitale, mon attachement à mes racines noires se résume en gros à un goût prononcé pour le zouk des années 80 et pour la bouffe antillaise.
https://youtu.be/1m-4qxz08So
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Le déclic
Puis est venu ce déclic, déclenché par mes recherches Pinterest sur Lisa Bonet et autres Amandla Stenberg et le formidable site NaturallyCurly. Poussée aussi par mon copain de l’époque, j’ai totalement mis de côté mon lisseur pendant l’été 2014. Pour ne plus y retoucher.
C’était un sacré chantier, pour être honnête, cela ne ressemblait pas à grand chose : un mélange de frisé, de lisse et d’ondulé. J’ai tenu six mois. À encaisser certaines remarques pas forcément cool, du genre « Tu vas rester comme ça définitivement ou bien ? », « On dirait une sauvage, genre Tarzan »… Mais j’ai eu énormément d’encouragements aussi.
Et en décembre 2014, j’ai pris rendez-vous au super salon l’Appart 36, avec Matthieu. Il a patiemment écouté mon histoire, me rassurant même en me disant que mon foutoir avait de la gueule. Et il a commencé à couper. Pas complètement : je ne voulais pas me retrouver avec une coupe courte. Parce qu’au fond, c’était ce qui m’attendait — j’avais peut-être dix centimètres de longueur réellement saine, pas plus.
Puis trois ou quatre mois plus tard, j’y suis retournée pour enfin me débarrasser de toutes les longueurs abîmées. Ça a été la révélation ! Plus besoin de reboucler mes cheveux au fer à boucler (le comble, je sais). J’avais une mini-afro !
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Mes cheveux, ma fierté
Ça a été très compliqué de me retrouver, je dois l’avouer. Et puis c’est venu tout seul. J’ai largué tout mon maquillage pour ne garder que le mascara. Et plus mes cheveux poussaient, plus je me sentais sûre de moi, armée. Aujourd’hui quand je tire sur mes boucles, elles descendent sous mes épaules ! Incroyable : mes cheveux ne poussaient plus il y a encore deux ans.
Ils sont aussi devenus plus ou moins ce qui me définit pour les autres. Je suis devenue « la fille aux cheveux frisés ». C’est souvent le sujet abordé par des inconnu•es, généralement pour me complimenter.
Mes cheveux sont devenus une fierté, je ne les cache plus, ils sont une partie extrêmement forte de ma personnalité. Et pour la suite, je laisse pousser, pour voir.
Un entretien facile
En ce qui concerne leur entretien, sachez en plus qu’il est possible de ne passer mille ans sur ses cheveux quand ils sont frisés — ce qui arrange la MÉGA flemmarde que je suis question beauté.
Je ne les lave qu’une fois par semaine à l’après-shampoing : j’en profite pour les démêler, masser ma tête et peigner dans tous les sens avant de rincer. Je laisse une noisette d’après-shampooing, et sèche avec un t-shirt en coton en pressant doucement les boucles. Ensuite, HEADSHAKE LIKE YOU DON’T CARE et tu laisses sécher à l’air libre.
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Toutes les deux semaines je démêle, laisse poser un soin toute la nuit et fais un shampooing le lendemain matin. Puis je laisse également une noisette d’après-shampooing, et sèche avec un t-shirt en coton en pressant doucement les boucles avant de secouer ma tête et laisser sécher. J’avais commencé à utiliser des crèmes type Bumble & Bumble pour les nourrir et les coiffer, mais franchement l’après-shampoing fait l’affaire.
Et voilà, c’est tout. Pas de coiffage, cela ne sert à rien : ces cheveux ont leur propre vie et se moquent royalement de ta volonté. Le seul inconvénient, c’est que laisser sécher à l’air libre en hiver, c’est pas la grande folie, mais on s’y fait.
Voilà, vous savez à peu près tout ! C’est au final une histoire d’acceptation de soi, je ne revendique rien. Toi qui te lisses les cheveux, toi qui portes des extensions, des tresses, une weave… le plus important est de se sentir SOI. Et de s’amuser aussi, parce que ça va bien cinq minutes !
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