Selon moi, il existe plusieurs sortes de musique vintage. D’un côté, il y a le vintage façon Frank Sinatra ou Nina Simone, celui « qui fait bien » (notons tout de même, parce que j’voudrais pas qu’on pense que c’est nul, qu’il s’agit là de deux artistes qui font battre mon coeur et que j’écoute beaucoup). Le vintage classe, quoi, qu’on n’hésite pas à passer en soirée parce que ça peut plaire à tout le monde et ça donne un petit côté honhonhon dîner chez l’Ambassadeur.
De l’autre côté, il y a le vintage que j’appelle « mes parents ont écouté Nostalgie quelques fois quand j’étais en voiture avec eux et j’ai des restes ». Des chansons désuètes pour la plupart, cultes, aux sonorités parfois largement ringardes, avec un recours bien trop fréquent au synthé… En même temps, peut-on en vouloir aux musicien•ne•s de l’époque ? C’était nouveau ! Moi quand j’ai un truc nouveau, j’en abuse aussi, depuis toujours (sauf quand le truc nouveau en question, c’était un cahier de vacances).
Alors aujourd’hui, j’ai eu envie de vous parler de ces chansons désuètes que j’aime tellement – parce qu’il faut s’assumer sous toutes ses coutures, ah ouais. Tu sais, celles qu’on se passe toujours avec des écouteurs, et pas trop fort pour que les gens à côté de toi dans le métro ne reconnaissent pas le rythme…
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Le chanteur, de Daniel Balavoine
Pendant la première partie de mon enfance, j’ai détesté toutes les chansons de Daniel Balavoine.
Et puis Liane Foly, et Lenna Ka (quelques petites pépites de la fin des années 90) ont débarqué avec leurs reprises et je me suis mise à écouter avec un certain plaisir Tous les cris les SOS et La vie ne m’apprend rien. Du coup, j’ai arrêté de crier « lalala j’entends rien » en sortant mon walkman dès qu’à la radio, le monsieur annonçait du Balavoine. Et c’est ainsi que j’ai entendu pour la première fois Le Chanteur en entier.
Je me souviens que je le trouvais un peu bizarre, du haut de mes dix ans, ce mec qui rêvait que les meufs se jettent sur lui toutes nues et le tuent, mais j’ai kiffé sévère son flow (si j’puis dire).
Bonus de la lose : je ne peux VRAIMENT PAS m’empêcher de bouger la tête et les épaules en rythme pendant TOUTE la chanson, chaque fois que je l’écoute.
Bonus de la lose + : avec les lèvres pincées (celles de mon visage). Un peu comme j’imaginerais faire le mec le moins rock du monde essayant d’avoir l’air rock.
Bonus de la lose ++ : quand Balavoine enchaîne deux « Et puis l’année d’après je recommencerai », je fais du playback en fronçant les sourcils et en serrant le poing. C’est plus fort que moi.
Bonus de la lose +++ : sous le prétexte de cet article, ça fait 7 fois que je l’écoute depuis le début de l’heure.
Résiste, de France Gall
Cette chanson, c’est mon hymne des matins ronchons. Les jours où je me réveille un peu triste, un peu perdue, pas assez jolie ou avec un ongle incarné, je fais ma routine matinale en l’écoutant. Je sors de la douche, et tandis que je m’hydrate et me maquille, je me la passe deux ou trois fois, et je la chante en même temps en me regardant dans les yeux grâce à cette invention fantastique qu’est ce qu’on appelle « miroir ».
J’ai bien conscience que ça sonne comme un bon gros cliché de film français des années 80, mais qu’y puis-je ? Cette technique fonctionne. C’est comme si je réapprivoisais mon visage (à me regarder surjouer la confiance en moi), mon énergie et mon estime de moi ce faisant – une estime de moi qui serait bien mise à mal si j’étais surprise par le voisin d’en face.
Salut les amoureux, de Joe Dassin
À ce point de l’article, j’aimerais tout de même attirer ton attention sur le fait que je suis totalement en train de chier mou sur mon e-réputation, si tel terme existe encore. Car du haut de mes 26 ans, alors que je me suis battue toute ma scolarité contre mon côté loser, j’avoue devant la Francophonie entière lectrice de madmoiZelle que oui, je suis absolument dingue d’une chanson de Joe Dassin.
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Mais Salut les amoureux, je la trouve un peu particulière. Déjà, parce qu’elle a été reprise par Miossec, et puis aussi parce que quand j’écoute les paroles, j’ai l’impression d’y voir une chronique très actuelle des difficultés sentimentales d’hier et d’aujourd’hui. Je crois TELLEMENT PAS à cette histoire de couple (j’y vois plutôt une sorte de plan fion régulier mais passons) qui se sépare à la cool. J’ai l’impression que forcément, l’un des deux a grave les boules et fait style « hahahaha mais non bien sûr que non je pensais pas VRAIMENT qu’on était ensemble hihihih allez c’était à la cool bisous et bonne bourre avec – comment il s’appelle déjà ? Jean-Guy, voilà ! Haha. Sacré•e toi ! » tandis que l’autre était détendu•e, pépouze, à faire semblant d’être un binôme amoureux quand ça l’arrangeait.
Je me trompe peut-être dans mon interprétation, hein, mais y a bien trop d’indices (le côté « on a vécu ensemble sans penser à demain » m’évoquant les discussions qui n’ont certainement jamais été claires sur le statut, le fait qu’ils ont toujours oublié quelque chose chez l’autre comme des retrouvailles avec beaucoup de sudation dedans).
Alors par compassion, je trouve ça touchant de vérité. Et puis je l’aime bien, quoi, cette chanson.
Fais-moi une place, de Julien Clerc
En secret, je rêve de chanter juste. D’avoir une voix un peu douce, un peu rauque. Dans ce monde idéal, je prendrais régulièrement ma guitare pour fredonner des grands classiques avachie nonchalamment mais avec élégance sur mon canapé, sous les yeux attendris de l’élu de mon coeur à qui je jetterais des regards pleins d’une émotion ténue.
Malheureusement, je ne sais pas jouer de la guitare (alors avachie, encore moins), je chante comme une merde, je ne sais pas être à la fois nonchalante et élégante et mes sentiments sont toujours bien trop forts pour que je lance des regards pleins d’une émotion ténue. Quand je suis heureuse, je pue le bonheur des globes oculaires. A contrario, la moindre envie de péter me donne un air vénère – voire VNR.
Dans ce monde idéal, une de mes reprises les plus fréquentes, ce serait Fais-moi une place. Cette chanson à elle seule (en plus d’un bon millier d’autres) me donne envie de savoir chanter. Pas pour en faire une carrière (je veux déjà être auteure, scénariste, actrice et chroniqueuse sur tous les médias possibles, c’est déjà beaucoup : ajouter à cette liste longue comme ma bite astronaute, ingénieure dans l’agro-alimentaire et chanteuse serait un peu fort de café), juste comme ça. Parce que cette chanson, je la trouve bien mignonne, bien touchante, bien qu’extrêmement cheesy, et que quand je trouve un truc joli j’ai envie qu’il soit à moi.
Et un jour, j’oserais dire publiquement que j’ai des frissons chaque fois que j’entends L’envie d’aimer même si je fais style que je l’écoute au second degré. Mais pas maintenant. Maintenant, c’est trop tôt.
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À toi ! Quelles sont les chansons désuètes que tu te sens prête à avouer publiquement (bien que sous pseudo) aimer ?
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Les Commentaires
"Bonus de la lose ++ : quand Balavoine enchaîne deux « Et puis l’année d’après je recommencerai », je fais du playback en fronçant les sourcils et en serrant le poing. C’est plus fort que moi."
Bah je tiens juste à te dire, @Sophie Riche, que je le fais tout le temps, seule devant mon ordi (oui, parce que j'ai Le Chanteur dans ma playlist Spotify, mais chut). Tu n'es pas seule.
Et une de mes chansons désuètes préférées, c'est Je l'aime à mourir, de Francis Cabrel. Je la trouve assez réconfortante, comme un plaid ou un thé bien chaud...