Ne te cache pas derrière ton soi-disant bon goût, et ne me laisse pas seule à assumer l’horrible vérité : il y a des moments où nous sommes bien nombreuses à aimer nous faire des sessions « j’écoute de la merde, mais c’est ironique, bien entendu ».
L’admettre n’est pas chose aisée : pendant longtemps, j’ai cru qu’il fallait que je fasse croire aux autres, même mes plus proches, que la musique qui m’accompagnait était exclusivement celle qu’il « fallait ».
Mais nous ne pouvons pas n’être que swaggity swag. Nous avons nos failles, aussi. Alors je me suis mise en quête d’une façon de faire passer mes faiblesses sporadiques en terme de hype auditive pour un truc cool.
Et il se trouve que pas plus tard que l’autre jour, j’ai compris comment procéder. Car certaines des chansons que j’écoutais en boucle quand j’étais petite ou adolescente et auxquelles je ne bitais rien, rapport que je connaissais mal l’anglais, sont en réalité fondées sur un message vraiment pas dégueulasse. Voici trois chansons nulles, mais avec un message inspirant.
Overprotected — Britney Spears
Clairement, Overprotected n’est pas le meilleur morceau de Britney. Il est moins efficace qu’un Baby one more time qui prône le masochisme affectif suite à une rupture difficile ou qu’un Oops I did it again sur une fille qui peut pas s’empêcher de faire tomber tous les mecs amoureux d’elle et d’en jouer. Pourtant, c’est un de ceux que je préfère.
Même la choré du clip est moins bien que toutes les autres, honnêtement. Les pas n’ont pas l’air bien calés sur la musique et ça n’a rien de très rythmique de se jeter contre des poteaux. C’est pas raccord.
Musicalement, tu sais pas trop si ça se veut rock ou r’n’b et puis là d’un coup, elle commence à faire des mouvements de jambes avec ses potes que même dans mon club de danse pour débutants du fin fond de la Picardie c’était plus gracieux. Bref, Overprotected, c’est pas une réussite.
https://www.youtube.com/watch?v=_EiXnZgHGlQ
Mais le message est bon : à l’époque, Britney commençait à assumer qu’elle aimait le sexe, qu’elle le pratiquait et que son anneau de pureté en vrai c’était des conneries. Elle avait déjà sorti Slave 4 U et les gens commençaient à jaser sur son dos tendance « mais que se passe-t-il ? Arrêtez-la elle devient dingue elle aime la bagatelle ». En ce sens, Overprotected arrivait à point nommé puisqu’elle y dit :
« J’ai besoin de faire des erreurs pour apprendre qui je suis, Et je ne veux pas être protégée.
[…]
Je n’ai pas besoin que quiconque vienne me dire ce que je veux, Ce que je vais faire avec mon destin. »
Et alors ça peut s’appliquer à tout le monde, dans n’importe quelle situation. Que tu annonces ton homosexualité à tes parents ou que tu essaies de faire comprendre à ta famille que, non, tu ne seras pas comptable comme elle l’espérait mais que tu feras ce que tu veux de ta vie, bim, ça colle.
Overprotected prône l’indépendance, le fait d’accepter l’idée qu’il vaut mieux faire ce qu’on a envie de faire plutôt que de se laisser dicter ses faits et gestes sous prétexte que c’est « pour ton bien tu sais ». Si ça c’est pas un message inspirant et mature, je sais pas ce qu’il vous faut.
Ceci dit, heureusement que je comprenais pas les paroles à l’époque de la sortie de la chanson : j’aurais annoncé à mes parents que j’arrêtais l’école pour me consacrer à la chanson, et ç’eut été la preuve d’un certain manque de recul sur mon talent.
Bring it all back to you — S Club 7
J’ai beau les avoir aimé très fort, petite déjà, je ne voyais les S Club 7 comme sept individus au regard franchement pas malin qui dansaient comme des fanfarons. Au moins, ils avaient le mérite de ne pas se prendre totalement au sérieux, même s’ils semblent toujours me narguer à étaler leur souplesse comme ça, au fil des clips. Passons.
En tout cas, ils ont bien choisi leurs paroliers. Enfin, connaissant le libre-arbitre des groupes musicaux de tous poils de l’époque, disons qu’on leur a bien choisi leurs paroliers.
Prenons par exemple Bring it all back, leur plus grand succès avec Don’t stop movin’ (qui, pour le coup, n’a aucun message à faire passer autre que « bouge ton boule sur le dancefloor tu verras c’est bien »). Eh bien contre toute attente, Bring it all back, c’est pas si con que ça en a l’air.
[dailymotion]https://www.dailymotion.com/video/xjij9q_s-club-7-bring-it-all-back-720p-hd_music[/dailymotion]
Parce que ça chante les louanges de l’individualisme positif et de la persévérance, oui madame, rien que ça. Ça parle non seulement d’étaler ses capacités et ses talents à la face du monde (tiens, j’en profite : JE SAIS TRÈS BIEN FAIRE LES TARTINES DE FROMAGE), mais aussi de ne pas trop s’en faire parce que des fois le monde c’est relou, et tu culpabilises de penser qu’à ta tronche, mais faut profiter des choses à son avantage.
Sk8er Boi — Avril Lavigne
Certes, Avril Lavigne est devenue un véritable running gag dans le paysage musical et culturel d’aujourd’hui. Elle n’a pas fait que du bien au rock, notamment quand elle a repris Knockin’ on heaven’s door, mais d’autres groupes ont massacré des chansons tout aussi mythiques sans qu’on ne leur soit tombé dessus (ça, c’était pour le passage mauvaise foi de l’article, prends, c’est cadeau).
Mais je ne renierai pas Avril Lavigne, non : je l’ai aimée le temps d’un album dont je n’écoutais que trois chansons, c’est vrai, mais je les écoutais de manière féroce en les bouffant par les deux bouts. Et parmi ces trois chansons, il y avait Sk8er Boi.
Une petite comptine sur un mec qui voulait très fort sortir avec une fille pendant son adolescence ; elle se refusait à lui parce qu’il n’était pas de la haute comme elle et que ses amis à elle trouvaient ses baggys à lui totalement nazes, alors qu’elle en avait très envie aussi.
Et il se trouve que le mec devient connu, et qu’il sort avec Avril Lavigne. Bon, pour le coup, elle est un peu agaçante parce qu’elle nargue la fille qui a mis un râteau à son mec sur le mode de « eh t’as vu, t’en as pas voulu, maintenant c’est moi qui profite de lui vu qu’il est considéré comme soiin et tout », et c’est pas malin parce que narguer c’est nul.
Mais c’est une chanson sur l’ouverture d’esprit, de un, du genre « l’habit ne fait pas le moine », sur la revanche sur la vie mais surtout sur le fait qu’il faut jamais écouter ses potes quand on est ado parce qu’on les choisit pas forcément bien et qu’ils peuvent donner des conseils nazes.
Parce que cette fille, elle l’aimait bien, en fait, ce mec, et que si elle avait su faire preuve d’un peu de jugeotte elle aurait vu qu’il n’était pas qu’un type faussement punk mais aussi quelqu’un avec du talent dedans. C’est triste.
Ça avait l’air d’être un bon investissement.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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