J’aime bien l’automne. Je trouve ça cool, comme saison. Le soleil pique moins les yeux qu’en été, la pluie est moins triste qu’en hiver, et il suffit encore de mettre ses mains dans ses poches pour avoir moins froid (je fais partie de la Congrégation de la haine anti-gants). Et puis, bon, les feuilles mortes, c’est joli. Faut faire gaffe à pas glisser dessus comme sur une peau de banane ou une capote vide, mais c’est joli. Alors comme je passe mon temps libre des écouteurs dans les oreilles, j’aime bien avoir une bande-son qui va bien avec ce que je vois et ce que je renifle.
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En fait, chaque saison nous met dans une ambiance émotionnelle particulière. Certaines chansons, pour une raison que j’ignore, me font soupirer à la fois de contentement et de nostalgie (tout pareil que l’odeur des feuilles mortes, de la pluie et du thé orange/cannelle). Parfois, elles sont calibrées pour coller à la saison (on le devine aisément parce qu’il y a « automne » dans le titre), mais pour d’autres c’est totalement subjectif. M’en veux pas, donc, si tu ne te retrouves pas partout.
October, de Broken Bells
October est une chanson que j’aime bien écouter à toutes les saisons et dans toutes les situations, depuis 2010. J’aime tout le premier album des Broken Bells, mais ce morceau est un peu plus saisonnier selon une expertise menée par mes propres tympans. Déjà, parce qu’il s’appelle October, et qu’octobre, c’est le plus cool des mois de l’automne d’après moi (en même temps, ce n’est qu’une petite victoire parce que bon, y en a que trois, quoi). Mais pas seulement.
Cette chanson du groupe formé par Brian Burton et James Mercer (le leader de The Shins) est à la fois douce et éveillée, et elle accompagne à la perfection le retour à pied après les cours ou le boulot, quand il commence à faire nuit tôt. Ça fait un décalage pas désagréable entre les gens qui marchent très vite et qui sont pressés alors que toi, tu peux pas vraiment être stressée, si t’écoutes cette musique-là, aérienne comme une feuille morte soufflée par le truc pour souffler les feuilles mortes.
Alternative : ça fait le même effet de contraste avec Sand River de Beth Gibbons et Rustin Man, et c’est tout aussi raccord à la saison (mais en vachement plus tristement nostalgique).
California Dreamin, de The Mamas & the Papas
Parce que les matins ne chantent pas toujours, qu’il arrive qu’on ouvre les volets pour découvrir un ciel tout gris et qu’on ait des envies d’ailleurs, de pieds dans le sable et de soleil qui lèche l’épiderme (comme s’il avait très faim et qu’on était une glace), s’agirait aussi de se trouver quelques chansons un peu plus motivantes.
Parce que oui, autant l’admettre : parfois, comme chantent The Mamas & the Papas, tu marches sur des feuilles marrons avec un ciel gris au-dessus de toi pendant ta balade hivernale et t’aurais bien envie d’être en débardeur à Los Angeles. J’veux dire, profiter du bonheur de chaque saison, ok, aimer la ville dans laquelle on habite, d’accord, mais il arrive qu’on ait des envies d’ailleurs. C’est humain.
Et ça fait plaisir de se balancer California Dreamin au réveil, parce que même si on reste ronchon, on se sent au moins un peu compris.
Perfect Day, de Lou Reed
Perfect Day ne parle pas de l’automne. Ça parle même de boire de la sangria dans un parc, et j’imagine qu’il n’y a rien de moins automnal que ça (mis à part une cueillette des cerises en sous-vêtements en écoutant les Beach Boys, éventuellement).
Mais depuis l’année dernière, elle m’évoquera pour toujours l’automne. Parce qu’il y a un an (tout pile, tiens, je viens de tilter), Lou Reed trépassait. C’était un automne particulier pour moi parce que j’étais en train de tomber amoureuse de mon mec de l’époque, et pile le jour où toutes les radios de toute la Terre passaient Perfect Day
en boucle pour rendre hommage à l’artiste, je réalisais ça. Ça foutait autant de bonheur que d’angoisse dans mon cerveau.
De bonheur parce que c’est toujours fort appréciable de tomber amoureux de quelqu’un qui vit la même chose, et d’angoisse parce que ça rend vachement vulnérable de savoir qu’on pourrait perdre un truc comme ça. Plus le présent est terriblement cool, plus la perspective de ce qu’il se passera à l’avenir est flippante. J’avais l’impression d’entendre ça aussi dans la chanson de Lou Reed, parce qu’il insiste trop sur le fait qu’il a passé une journée parfaite pour ne pas sous-entendre qu’il a les boules à l’idée que les autres journées soient moins bien. En fait, je suis sûre que j’ai tort, mais eh, c’est ça qui est bien, dans la musique : t’interprètes ça à ta sauce, tu y entends ce que t’as envie d’entendre.
L’automne, je trouve que c’est un peu pareil : c’est agréable sur le moment, même si on est quelques humains à savoir que ça signifie aussi que la déprime saisonnière déboule à grands pas (j’aimerai autant faire des bisous à novembre que lui mettre des glaçons dans le slip).
Pancake, de Tori Amos
Tori Amos, c’est un peu mon plaisir coupable. Je sais pas pourquoi, il m’arrive d’avoir honte de dire que j’aime beaucoup certains de ses albums. Ça doit être parce que ça parle de religion et de fion (de relifion, OH, BIM, j’t’invente des mots ni vu ni connu), ou parce que ça passe sur des radios que je n’ai pas envie qu’on pense que j’écoute. En tout cas je l’ai aimée très fort toute mon adolescence, et chaque fois que j’écoute à nouveau un de ses albums, j’ai mille souvenirs et émotions qui me reviennent. J’ai l’impression de faire une sorte de coming out.
Scarlet’s Walk n’est certainement pas sa plus belle réussite musicale, alors je ne l’écoute pas souvent. Il faut plusieurs critères pour que j’ai envie de me le balancer :
- il faut qu’il fasse un grand soleil et un ciel bleu
- il faut que je sois en voiture
- il faut que les feuilles sur les arbres soient jaunes et rouge.
Et booya : ça me fait un mini-road trip plus ou moins cher selon le prix du gazole. Je sais pas pourquoi, mais cet album entier, Pancake en tête, me donne des envies de simili été indien.
Dead Leaves and The Dirty Ground, des White Stripes
Parce que l’automne, ça rend pas forcément mélancolique, faut bien que je propose d’autres possibilités. Ça tombe bien : selon l’humeur du jour, un petit White Stripes des familles s’impose et Dead Leaves and The Dirty Ground est parfaite pour la période. Parce que ça parle de feuilles mortes et de sol sale quand l’objet de son affection n’est pas là, et que j’y vois un mélange d’enthousiasme hystérique et de frustration anxieuse.
Comme quoi ?
COMME L’AUTOMNE, PILE POIL ! Eh bah voilà, la boucle est bouclée, le monde me donne raison, et j’aime bien avoir raison.
Et toi, c’est quoi tes chansons-totem de l’automne ?
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