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Parentalité

Cette autobiographie sur le poids de l’héritage familial quand on devient mère va vous faire hurler de rire (sisi)

Quel héritage familial transmet-on à un enfant quand il nait ? Comment gérer les différences de croyances et d’éducation au sein d’un couple ? Autant de questions passionnantes auxquelles répond à sa manière l’ovni de la rentrée littéraire : « Sainte Marguerite-Marie et moi ».

Clémentine Beauvais, l’autrice du roman primé Les petites reines, vient de publier Sainte Marguerite-Marie et moi. Dans cet essai historique autobiographique à mourir de rire, l’autrice part à la rencontre de la Sainte Marguerite-Marie, une religieuse exaltée du XVIIe siècle dont la légende familiale affirme qu’il s’agit d’une aïeule.

Clémentine profite de ce sujet un poil étrange pour nous parler de famille, de transmission et de maternité, puisqu’elle s’apprête à devenir mère au moment où se déroule son enquête.

« Sainte Marguerite-Marie et moi », un essai historique et autobiographique

En ma qualité de chroniqueuse qui écrit sur des sujets parentalité… BON D’ACCORD et aussi en ma qualité d’ancienne camarade de classe de l’autrice, j’ai eu la chance d’avoir accès à l’ouvrage en avant-première. Prenant ma mission très au sérieux, j’ai dégainé le surligneur et le crayon à papier pour prendre des notes au fur et à mesure, mais ces fournitures se sont rapidement avérées inutiles puisque j’ai été bien trop happée par le récit pour noter quoi que ce soit.

Moi-même mère depuis pas si longtemps et encore chamboulée par tous les changements identitaires que l’expérience implique, cette quête à la fois historique et intime m’a semblé universelle.

Alors qu’elle est enceinte d’un homme qu’elle aime et qui se définit comme très catholique, l’autrice féministe et athée Clémentine Beauvais décide d’explorer son arbre généalogique et de partir à la découverte d’une aïeule illustre : la sainte Marguerite Marie Alacoque, inspiratrice du culte du sacré cœur.

Ce récit se partage donc entre passé et présent. Le passé nous entraine sur les pas d’une sainte exaltée (personnellement j’aurais dit zinzin) du XVIIe siècle et nous relate un florilège d’anecdotes historiques pour le moins troublantes (personnellement j’aurais dit zinzins).

Le présent suit l’autrice, alors qu’elle effectue ses recherches, s’interroge sur le bienfondé de sa démarche (n’est-ce pas trahir ses convictions féministes que de s’intéresser de si près à une sainte très TRÈS pieuse ?) et affronte des bouleversements familiaux profonds puisqu’elle s’apprête à dire au revoir à sa grand-mère adorée et à accueillir son premier enfant.

Cet essai, véritable hommage familial, parle d’héritage, de transmission, mais aussi de différences au sein du couple, des sujets majeurs qui s’invitent bien souvent dans nos existences lorsque l’on devient mère.

Le poids de l’héritage familial lorsqu’on devient mère

Si le sujet de ce livre drôlissime concerne officiellement la vie d’une sainte aïeule complètement barrée malmenée par un Jésus Christ inspiré, l’entrée dans la maternité et la question de l’héritage familial s’explore en filigrane tout au long du récit. 

Chaque famille possède sa propre légende et ses membres émérites dont on se transmet les faits d’armes de génération en génération. Si je raconte souvent à ma fille et à mon mari les déclarations légendaires de mon arrière arrière-grand-mère (que je n’ai par ailleurs jamais connue, mais qui n’avait visiblement pas sa langue dans sa poche), l’arbre généalogique de Clémentine peut — lui — s’enorgueillir de posséder une véritable célébrité. Enfin, probablement, puisque Clémentine n’est pas totalement, complètement, absolument, certaine que cette sainte est VRAIMENT une ancêtre.

Comme dans de nombreuses familles, on finit par ne plus bien discerner ce qui est d’origine et ce qui a été revisité au fil du temps, mais cela n’a pas la moindre importance car une légende familiale n’a jamais eu besoin d’être 100% authentique pour se transmettre allègrement décennie après décennie. 

Dans cet essai autobiographique et historique, la célébration de cette sainte et potentielle aïeule sert avant tout à rendre hommage à une grand-mère qui s’en va doucement et à accueillir un enfant qui arrive.

Devenir mère, c’est se repositionner sur l’échiquier générationnel et investir très soudainement un rôle qui implique bien plus que seulement changer des couches et se lever (beaucoup trop souvent) la nuit. La maternité provoque bien souvent un chamboulement identitaire qui nous pousse à revisiter notre passé et notre héritage afin de choisir — consciemment ou non — ce que nous allons transmettre à nos enfants. 

La difficulté à composer avec les valeurs de son conjoint ou de sa conjointe

Dans le livre, Clémentine Beauvais évoque son compagnon très très catholique alors qu’elle est « au mieux » agnostique (et féministe). Le sujet du livre ne concerne pas cette différence ni les potentielles difficultés qui pourraient subvenir au sein du couple amoureux, puis parental. Cet homme très aimé aide factuellement sa compagne à avancer dans ses recherches théologiques en bon connaisseur et partage avec elle ses contacts et ses réflexions « de croyant » avec bienveillance, sans jamais s’imposer dans le récit. 

Pourtant, si la différence au sein du couple est souvent considérée comme enrichissante, elle n’est pas toujours facile à gérer. Moi-même vivant à l’étranger, avec un homme qui ne partage ni ma langue, ni ma culture, je suis parfois confrontée à des façons de faire qui me semblent compliquées à accepter. Si elles ne remettent pas forcément le couple en question, les différences idéologiques (sans tomber dans les extrêmes) secouent et peuvent s’avérer difficiles à gérer, notamment lorsque le couple décide d’avoir des enfants ou de s’engager autour d’un projet commun.

Il n’est pas aisé de faire le deuil de certains pans de son héritage, d’accepter que des valeurs qui nous semblaient pourtant primordiales ne seront pas transmises telles quelles et qu’il faudra trouver des compromis. Cet exercice d’équilibriste peut s’avérer aussi frustrant qu’enrichissant et provoquer des sentiments très ambivalents. Par exemple, je suis personnellement ravie que mes enfants aient deux cultures et je suis soulagée de ne pas voir se perpétrer certains traits familiaux moins reluisants, mais je ne peux pas m’empêcher d’être envieuse lorsque je vois des enfants adopter mes codes culturels, quand les miens préfèrent ceux de leur pays de résidence (et c’est normal).

« Saint Marguerite-Marie et moi » : un livre comme un cadeau de naissance

Saint Marguerite-Marie et moi voit naitre un enfant et sa mère, qui s’autorise peu à peu à sortir des cases imposées par son milieu. En ça, la maternité l’affranchit du jugement (réel ou supposé) de ses pairs. Spoiler alert, Clémentine ne devient pas catholique, ni même croyante, en cours de route. Contrairement à sa sainte aïeule, Jésus ne s’adresse pas personnellement à elle pour lui confier de grands projets exaltants mais douloureux et préfère la laisser se débrouiller toute seule. 

Pourtant, en explorant le monde de l’homme qu’elle aime et en y apposant un regard distant mais bienveillant, elle autorise son fils à y appartenir s’il le souhaite, et de la façon dont il le souhaite. Elle lui fait aussi une place de choix au sein de sa propre famille. Ce livre est donc un sublime cadeau de naissance et de bienvenue qu’elle fait à son bébé, mais aussi à elle-même. À lire absolument !

Se procurer Sainte Marguerite-Marie de Clémentine Beauvais

À lire aussi : 5 livres féministes à glisser dans sa valise cet été

Crédit photo : Amina Filkins / Pexels


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