Prospérer parmi les géants de la fast-fashion a un coût — financier, mais aussi humain. Si le groupe H&M a annoncé avoir triplé ses bénéfices l’an passé, atteignant les 459 millions d’euros), et qu’il a bénéficié des aides de l’État pour le chômage partiel durant le gros de la pandémie, il s’apprêterait pourtant à licencier plus de 150 personnes qui travaillent dans son entrepôt logistique français.
H&M veut fermer son entrepôt du Bourget, ce qui licencierait 153 personnes
Au Bourget, dans le département de la Seine-Saint-Denis en région Île-de-France, un entrepôt logistique du géant suédois existe depuis 1998 (après avoir été basé un temps à la Courneuve). Mais le groupe H&M a annoncé en juin 2021 vouloir le fermer, ce qui menace les emplois de 153 personnes en CDI, et d’une cinquantaine d’intérimaires.
Les syndicats CGT, CFE-CFG, Unsa, CFDT, CFTC, FO, Sud dénoncent « un massacre social » en devenir. Depuis le 7 octobre 2021, plusieurs employés se sont mis en grève illimitée pour protester contre cette fermeture justifiée par « raisons financières ».
Le groupe n’a pas encore pris la peine d’annoncer de date effective. En revanche, il a bien communiqué sur les 200 millions d’euros de bénéfices déjà enregistrés sur l’année 2021…
D’après la CGT, 67% des employés de cet entrepôt H&M Logistics GBC France sont des femmes — dont certaines là depuis l’ouverture, soit 23 ans. Autant de petites mains qui stockent et préparent les vêtements, accessoires, et autres produits du géant suédois de la fast-fashion.
Optimiser toujours mieux les coûts, qu’importe l’humain ?
Si les volontés de faire des efforts en matière d’écoresponsabilité s’affichent en boutiques et sur les réseaux sociaux, le groupe H&M pourrait bien préférer acheminer sa marchandise à destination des boutiques hexagonales depuis des entrepôts d’Espagne et de Belgique, où la main-d’œuvre s’avère moins chère qu’en France.
Une façon d’optimiser toujours mieux les coûts, au détriment de l’humain.
Le Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) ne satisfait pas les syndicats, rapporte France Bleu.
En cas de licenciement pour motif économique, ce genre de programme vise à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre, à travers des offres de formation ou des reclassements ailleurs dans l’entreprise. Or, pour la plupart de ces femmes préparatrices de commande, qui ont dépassé la cinquantaine, redébarquer sur le marché du travail à cet âge-là s’annonce plus que difficile. D’autant que la pandémie n’est même pas terminée.
Un employé de l’entrepôt H&M du Bourget a voulu s’immoler par le feu
Cette situation désespère donc les employées en grève depuis le 7 octobre 2021 de cet entrepôt jugé, du jour au lendemain, dispensable par le groupe avide de profits. Leur détresse vient notamment de conduire l’un d’entre eux à s’immoler par le feu à l’issue d’une réunion avec la direction, le 26 octobre 2021, illustre le média Brut.
Alors que le groupe a enregistré plus de 200 millions d’euros depuis le début de l’année, cette fermeture du seul entrepôt français pour « raisons financières » donne donc une autre dimension aux petits prix qui s’affichent en boutiques.
En fait, la pandémie a accéléré l’intérêt du grand public pour l’e-commerce, si bien qu’H&M veut mieux y concentrer ses efforts, au détriment du physique et ses employés. En avril 2021, le groupe avait annoncé fermer 350 de ses 5000 magasins dans le monde.
Et le 27 octobre 2021, l’AFP a appris que la boutique H&M des Champs-Elysées à Paris en fait partie. Soit 105 salariés à recaser ailleurs dans le groupe, vient d’expliquer le média Fashion United.
Si le budget des ménages alloué à la consommation de vêtements a reculé de dix points ces vingt dernières années, la part du e-commerce a quasiment doublé dans l’habillement rien qu’en 2020. Comprendre : on achète moins de vêtements, mais quand on le fait, c’est de plus en plus souvent en ligne. Sauf qu’au royaume du e-shopping, mieux vaut être un géant bien référencé qu’un petit commerçant de quartier. Forcément, cela a aussi des répercussions humaines.
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Crédit photo de Une : capture d’écran du média Brut.
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Les Commentaires
J'assume à fond le fait d'être pro-capitalisme, mais j'estime en même temps que les entreprises (grandes ou petites) ont une responsabilité humaine et sociale envers les gens qui travaillent pour et un licenciement (surtout une vague pareille) ne devrait pas intervenir alors que l'entreprise fait du bénéfice (surtout autant, quoi).
J'espère que toutes ces femmes et hommes auront gain de cause.