Tout a commencé en mai 2009. Je suis allée voir avec ma bande d’amis un artiste que j’aime beaucoup, Etienne de Crécy, en concert dans le cadre d’une manifestation curieusement nommée « Constellations-en attendant l’ouverture du Centre Pompidou ».Le nom de ce festival culturel démontre à lui-même l’impatience et l’attente, depuis 2003, de ce fameux centre Pompidou dans notre région Lorraine, quelque peu en mal de reconnaissance et d’attraction, depuis la fin de sa belle période sidérurgique.
A cette époque, je savais que quelque chose se tramait sous le nom de « Centre Pompidou » mais n’habitant pas à Metz même, je dois admettre que je n’étais pas très bien renseignée. Ce que nous avons vu du futur centre ce soir-là se résume à des engins de chantier et autres gravats, non loin de là où mixait le grand Etienne pour une foule déjà bien imbibée.
Quelques mois plus tard, ce sont des affiches dans toute la région qui nous indiquaient que le Centre Pompidou de Metz, « c’est pour bientôt » avec une typographie si jaune et gigantesque qu’il fallait être de très mauvaise foi pour prétendre ne pas le savoir.
Vinrent ensuite des affiches qui m’ont interpellées, avec Picasso ou Dali déclarant « Je m’installe à Metz », faisant référence à la première exposition d’inauguration du centre, intitulée « Chefs d’œuvres ?».
Le 12 mai 2010, enfin, la tant-attendue inauguration. Des kilomètres de bouchons sur l’Autoroute, une facilité à se garer décourageant les plus téméraires et une foule à faire paniquer n’importe quelle personne un tant soit peu sensée. Je me rappelle avoir dit à une amie « Si on se perd de vue, c’est fini» puis avoir passé le restant de la soirée au téléphone sur fond de « T’es où ? Près du poteau, sous le truc en verre avec des machins en polystyrène dedans ! Je te vois pas ! Punaise, vous pouvez pas dire pardon quand vous poussez ?! » Une artiste espagnole, Maider Lopez, a ponctué la soirée d’une performance artistique assez impressionnante : une distribution de parapluies lumineux que tout le monde a ensuite ouvert sur le parvis du centre… Une belle performance visuellement, mais quelques déçus dont je fais partie (cf groupe facebook). Le soir là, la file d’attente pour visiter l’exposition était de 4 heures environ.
Photo d'Elise (https://flickr.com/zounita)
J’ai donc attendu un mois pour y retourner, une fois l’agitation un peu retombée. Grâce au tarif -26 ans, nous avons pu visiter le centre entièrement gratuitement.Tout d’abord, on entre dans un grand hall, nommé « forum ». La hauteur sous plafond est incroyable et il y a toutes les alvéoles du toit, on se croirait dans une grande ruche lumineuse.
Le hall, en plongée.
Notre centre messin (oui, les habitants de Metz se nomment « messins » et Metz se prononce « Messe », non pas « Met’z », petite leçon de prononciation pittoresque) est en quelque sorte un hexagone, ressemble à un chapiteau de cirques pour les uns, à une maison de Schtroumpfs pour les autres. L’édifice est très lumineux, et de nuit, lorsqu’il est éclairé de l’intérieur, on distingue très bien la charpente alvéolée, en ombres chinoises. D’un côté du centre, un immense parvis, et de l’autre, un jardin dont la terre est creusée en forme de vagues. Le chapiteau de l’édifice possède une longue flèche qui culmine à 77mètres, en hommage à la date de création du projet « Pompidou », 1977.
La toiture en bois blond reprend la forme d’un chapeau chinois, et enveloppe de son maillage sophistiqué tout l’édifice, dont les trois galeries rectangulaires superposées les unes sur les autres. Le maillage est protégé par une membrane blanche à base de fibre de verre et de teflon.
La toiture, vue du dessous.
Les trois galeries ressemblent à des boîtes rectangulaires qui se superposent, à des angles différents. Les extrémités de ces boîtes sont en réalité d’immenses baies vitrées dépassant du toit, pointant vers d’intéressants panoramas de la ville, comme sa gare, sa cathédrale, ou encore le parc de la Seille.
Dans la galerie ouverte vers le paysage de la cathédrale, un habile calcul de perspectives permet une illusion d’optique incroyable: plus on est loin dans la galerie, plus la cathédrale paraît proche. Plus on s’en approche, plus elle s’éloigne : « C’est un peu l’allégorie de l’exposition, plus vous allez vers l’oeuvre, plus elle vous échappe » (Laurent Le Bon, directeur du centre Pompidou de Metz).
Ladite baie vitrée
L’architecte de cet édifice est un japonais de renom, Shigeru Ban, à qui l’on doit la célèbre Curtain Wall House, ou encore de nombreux édifices réalisés en tubes de carton, comme le Paper Dome ou la Paper House.
Lorsque l’on arrive dans le forum (Hall d’entrée), se trouve face à nous un très grand espace d’exposition: la grande nef. C’est un espace entièrement modulable par des petites alcôves, dont la hauteur sous plafond varie de 5,70m à 18m. Impressionnant. Cet espace est dédié aux oeuvres exceptionnelles de grand format.
Lorsqu’on lève la tête, les petites alcôves, délimitant des espaces pour les oeuvres, se reflètent dans des miroirs suspendus au plafond. Les miroirs n’étant pas apposés de façon tout à fait plane, il en résulte une drôle d’impression de déformation type « lendemain de soirée ». Ces miroirs feraient partie de l’exposition « Chefs d’oeuvre ? » et en constitueraient une réponse : le visiteur fait partie de l’exposition.
Rien ne va plus lorsqu'on lève la tête.
Reflet de la délimitation des espaces d'exposition par des modules.
L’exposition du moment est intitulée « Chefs d’Oeuvre ? » et s’intérroge sur la notion de chef d’oeuvre à l’heure actuelle : ce terme existe-t-il encore ? Qui en décide ? Un chef d’oeuvre est-il éternel ? L’exposition laissera place aux futures à partir d’octobre 2010, par vagues successives en fonction des galeries.
780 chefs d’oeuvres sont exposés, afin de faire rêver le visiteur, et de le questionner: Braque, Malevitch, Chagall, Léger, Brancusi, Bellmer, Kandinsky, Picasso, Max Ernst, Pollock, Giacometti, Dubuffet… Du beau monde ! Et une mention spéciale à Emile Friant, un peintre de la région, du début de siècle dernier, qui mériterait une renommée internationale tant ses tableaux sont à couper le souffle, ou encore à Séraphine de Senlis.
La hauteur sous plafond et les 5 000m2 d’exposition permettent de présenter des oeuvres immenses que l’on voit rarement.
L’exposition est décortiquée en 4 chapitres (dans les 4 espaces, la grande nef et les 3 galeries) : « Chefs d’oeuvre dans l’histoire » (moments clés de la constitution du Musée national d’art moderne), « Histoires de chefs d’oeuvre » (plongée dans l’histoire des oeuvres), « Les rêves de chefs d’oeuvre » (proposition d’un musée rêvé) et « Chefs d’oeuvre à l’infini » (persistance de la notion de chef d’oeuvre au fil du temps).
Le centre Pompidou n’est pas un véritable « musée » dans le sens où il ne possède pas de collection permanente, mais il n’est pas non plus dédié aux expositions temporaires. Il s’agit d’un lieu hybride de conversation entre expositions et performances vivantes, ateliers et cinéma, conférences et spectacles jeune public. Un véritable bouillon culturel plein de surprises, pour une région parfois trop méprisée.
La minute Guide du routard :
Si l’envie vous vient de venir visiter le centre Pompidou de Metz, profitez-en pour visiter le centre-ville de Metz aux puissants accents allemands, la ville de Nancy pour sa forte tendance art-nouveau et sa magnifique place Stanislas, le Luxembourg, proche et surprenant, entre culture (visitez le Mudam!), nature, histoire et luxe. Faites un détour par le parc d’attractions Walygator, le chateau de Malbrouck ou encore la ligne Maginot.
Les Commentaires
Je me demande si Metz était connue avant qu'il y ait cette histoire de centre Pompidou... En y habitant jai pu assister à toute la construction !
Il y a eu aussi un concert celtique juste à côté fin août, c'était bien sympa.
Je pense que les animations dans ce coin là de la ville n'ont pas finies de se présenter !