Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu de nombreux amis masculins. Je m’entends bien avec les garçons, c’est comme ça. Parfois je suis tombée amoureuse de l’un d’entre eux, parfois non. Et puis parfois je n’ai pas trop su.
Une évidence
Quand j’ai rencontré A., j’étais relativement bien dans ma peau. Je venais juste d’arriver à la fac, dans un milieu nouveau, prête à affronter une nouvelle vie. La solidarité étant importante dans la filière ou j’étais, on est rapidement entrés en contact, bien qu’il fut à ce moment-là en Erasmus à l’étranger. Un clic d’acceptation sur Skype, et voilà : la machine était lancée.
En quelques heures à peine, je lui ai tout raconté.
Je crois me souvenir qu’il m’a appelée tout de suite, et que nous avons passé quasiment toute la nuit à nous parler. Je venais de trouver un véritable miroir. Nous étions fascinés de nous ressembler autant, de fonctionner à ce point de la même façon malgré notre complexité. Il a tout de suite deviné qu’il s’était passé quelque chose de grave dans ma vie, quelque chose qui m’empêchait de m’épanouir autant que je l’aurais pu. En quelques heures à peine, alors que je n’en avais jamais, jamais parlé à qui que ce soit, j’ai tout raconté. Le verre, l’engourdissement, lui sur moi, mes forces qui m’abandonnaient, le lendemain, la honte, le dégoût, le silence.
Je ne lui ai pas non plus épargné les années qui ont suivi, les larmes, la boule au ventre, l’impossibilité totale de jouir de mon corps. Et il a dit le mot. Il a dit ce que je n’ai jamais formulé, que je ne pouvais même pas imaginer. Non, un viol ça n’est pas qu’une histoire d’inconnu qui te saute dessus dans une ruelle sombre. Un viol ça peut être aussi une histoire d’amour dont on profite, d’une jeunesse trop naïve que l’on abuse et d’un cachet qu’on met dans un verre alors que l’on se croit en parfaite sécurité.
J’ai mis cinq ans à comprendre tout cela toute seule, et lui avait tout compris en cinq minutes. Vous pensez bien que j’ai su à ce moment-là que je tomberais bientôt très amoureuse de lui, et que j’allais avoir très mal. Parce que mon miroir n’était pas non plus sans rayures.
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Un équilibre ambigu
Nous nous sommes vus, beaucoup. Pendant plus d’un an nous avons tout partagé : moments de doute, déprimes, films, vacances. Nous dormions dans le même lit, mais pour autant nous ne nous sommes jamais touchés, jamais embrassés, même si je crois que nous en mourions d’envie. Encore aujourd’hui j’ai du mal à mettre un mot sur ce qui nous liait : amour platonique, amitié fusionnelle ? Nous étions dans une bulle dans laquelle personne d’autre n’avait le droit de rentrer.
Nous nous voyions toujours seul à seule, la nuit ou pendant les vacances, et nous nous avions très peu de contacts la journée. Notre entourage se posait des questions sur notre relation, mais cela nous importait peu. A. était, il me semble, amoureux de quelqu’un qui lui semblait inaccessible, mais ça n’a jamais été un tabou entre nous : je l’ai toujours encouragé à aller vers elle, tout en sachant que cela signifiait disparaître de sa vie si cela fonctionnait. Je voulais tellement qu’il soit heureux, il le méritait — c’était mon miroir après tout.
Pour être honnête, tout le monde me prenait pour une folle. Combien de fois j’ai entendu mes amis me dire : « Mais enfin, tu es amoureuse de lui, pourquoi tu le pousses dans les bras d’une autre alors que vous êtes faits pour être ensemble ? ». Ils ne pouvaient pas comprendre.
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Je savais que tout ça ne pouvait pas durer, bien sûr. Mais je n’imaginais pas que cela finirait comme ça. Au fil du temps, je m’y suis faite, j’ai fini par accepter le fait que, oui d’accord j’ai compris que bon, j’étais amoureuse de lui. Mais je n’ai rien dit, je ne voulais pas ébranler l’équilibre qu’il y avait entre nous et dans lequel je m’épanouissais tant. Et puis c’est arrivé. Pas comme je l’imaginais. Il m’a dit :
« Je crois que j’ai rencontré quelqu’un qui me plaît. »
Le monde s’est écroulé autour de moi, et mon cerveau hurlait « Je te l’avais dit ! » mais j’ai encaissé sagement. Et puis plus rien. Il a simplement disparu de ma vie.
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Quand tout s’arrête
Je le croisais encore tous les jours, mais j’avais compris qu’il ne fallait plus que j’existe. Pendant presque un an, je m’arrêtais de respirer quand j’entendais ne serait-ce que son prénom, ou que j’apercevais sa silhouette. Je lui ai écrit une lettre, qui ressemblait presque à un hommage funéraire tellement elle était sinistre et évoquait le point de conclusion de notre relation.
Et puis j’ai commencé à recevoir des lettres anonymes avec des citations qui évoquaient la difficile frontière entre amour et amitié. Nous aimions tous les deux écrire, et je n’avais pas trop de doutes sur l’auteur de ces lettres. J’ai mis presque deux ans à comprendre que l’autre lui avait sans doute dit « C’est elle ou moi » étant donné l’ambiguïté de notre relation. Et il l’avait choisie, bien sûr.
Il m’a aidée à savoir qui j’étais
Je voulais intituler ce texte « Celui qui a tout reconstruit… et tout détruit », mais ça ne serait pas juste pour lui. Il ne m’a pas brisé le cœur, il a juste repris sa vie en main. Il m’a beaucoup apporté, il m’a aidée à savoir qui j’étais et ce que je voulais, et à sortir de ma coquille. Je lui en veux d’avoir disparu sans rien dire, mais en même temps il m’y avait préparée.
Aujourd’hui je suis loin d’être aussi en colère qu’au début, et je le regarde évoluer de loin, à travers les réseaux sociaux, tout en me disant qu’il serait peut-être devenu une toute autre personne avec moi. Il aurait peut-être été moins ambitieux, moins acharné… Je n’arrive pourtant pas à savoir si j’ai pu avoir sur lui une influence aussi forte que celle qu’il a eu sur moi, ou même si notre bulle aurait encore pu tenir longtemps sans exploser.
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Les Commentaires
Parce que mon histoire est presque pareille sauf qu'elle finit bien.
Depuis quelque jours, je ne suis plus avec mon amoureux, je me suis séparée de lui en tant que petit amies. (ça fait deux ans qu'on était ensemble)
Peut importe les raisons, c'est juste qu'on ne s'aimait pas comme s'aiment les amoureux. C'est un amour de grand frère/grande soeur, je prends soin de lui comme il prend soin de moi. Le bonheur de l'autre étant extrêmement important. (comme dans ce témoignage en fait)
Le quitter aurait été pour nous le drame de notre vie parce qu'on a développé des choses si précieuses entre nous, qu'on ne voulait pas les perdre. On préfère juste faire muer notre relation vers quelque chose de plus épanouissant, puisque la case petits amis n'était pas la bonne.
Alors, on a trouvé une alternative. Nous ne sommes plus amoureux mais nous sommes comme des meilleurs amis. Un amour platonique, si vous voulez de la précision. En vrai, lui et moi, on a la sensation d'avoir trouvé un truc unique en chacun et on ne voulait pas que sous prétexte, que l'amour "eros" est parti, qu'on ne pouvait pas continuer de développer l'amour "phillia".
Aujourd'hui, j'ai la sensation d'avoir trouvé ma perle, quelqu'un qui sera toujours près de moi. On a dans le projet d'être comme des "collocs permanents". L'expression est amusante mais on veut simplement être près l'un de l'autre et être heureux quand l'autre est heureux (même si c'est avec une autre personne qui est le petit ami attitré)
Aujourd'hui, je me sens libéré d'un poids, parce que je me sens mieux car il n'y a rien de pire que de se dire qu'avec ton amoureux, ça va mais qu'un truc cloche et que du coup, si tu te sépares de lui, et bien tu perds tout.
Lui et moi on a fait le choix de braver les normes de l'amour et l'amitié, pour créer une relation unique. Et ça c'est beau.
Malheureusement, j'arrive après la bataille pour cette madz parce qu'à mon avis, il y'avait moyen de continuer de partager quelque chose avec ce garçon.