En décembre 2003, j’ai rencontré l’homme de ma vie. Il était brun, charmant, avait une voix de crooner… et une passion dérangeante !
Un ami d’amis m’est apparu un jour sous un nouveau jour. Je le trouvai soudainement charmant, et il semble que lui aussi me trouva soudain charmante en retour. Il était drôle, plutôt mignon bien que totalement métrosexuel, et connaissait tout sur le rock’n roll américain. Sur une piste de danse, la veille de mon départ, sur le fameux slow « It’s now or never » (chanson tout à fait appropriée), nous nous sommes rapprochés et embrassés. Le lendemain, je n’ai pu que l’apercevoir avant de devoir repartir rejoindre mes pénates à l’autre bout du pays.
Je ne sais comment, il a retrouvé mon mail, et on a commencé à chatter. Nos discussions étaient plutôt amusantes, et j’adorais lorsqu’il me disait des choses du style : « When we are close, my heart says surrender, I’m almost in love tonight » ou « Love me tender, love me dear, tell me you are mine » … c’était romantique à souhait … Cul-cul la praline aussi à souhait, désormais je l’admets, mais sur le coup, comme toute nana qui se respecte, je rêvais de romantisme … et il fallait avouer que cela changeait du trop habituel : « t’es bonne, tu sais, tu fais quoi ce soir ? »
Là n’était que le début pourtant. Il prépara alors une petite virée de par chez moi. Je le vis arriver un beau matin, et je me suis dit « tiens c’est bizarre, quelque chose a changé chez lui ». Je ne tardai pas à découvrir ce que c’était. Il se regardait souvent dans la glace, j’en riais, et il me lança alors « tu ne trouves pas que je ressemble à Elvis avec ma nouvelle coupe de cheveux » … « ah ouais, maintenant que tu le dis, c’est ça qui a changé chez toi ! » … Bon, la coupe d’Elvis c’était certes has been, mais ça ne lui allait pas encore trop mal.
Le pire fut la soirée qui suivit. Pêle-mêle voici tout ce que j’ai dû subir : trois heures de rock and roll et de twist épuisant et ridicule dans un bar douteux, l’explication de la naissance, de la vie, de la mort du King, des réflexions du style « t’as un style à la Priscilla » (ouais, elle est vieille et a joué dans Dallas, je ne sais pas trop comment je dois le prendre), un commentaire détaillé sur le thème « comment trouver sur Ebay des objets qu’Elvis aurait peut-être frôles, et comment les payer moins de 2000 dollars », et le mieux du mieux, la théorie du complot de la CIA dans la mort d’Elvis, voire son éventuelle survie dans un condominium floridien.
Ma libido pour le beau gosse avait en trois petites heures totalement fondu. Elvis, c’est mignon, mais on est au XXIème siècle, et là ça commencait à devenir franchement lassant.
Le pire, c’est que le jeune homme devait passer la nuit chez moi, avant de repartir au petit matin en voyage pour une destination plus lointaine. M’imaginer passer la nuit dans les draps de ce maniaco-toqué qui allait encore me raconter les merveilles de Memphis où il n’était même jamais allé, me rendait dingue rien que d’y penser. Je m’imaginais déjà devant jouer Priscilla au lit pendant que lui me chanterait une mélodie ringarde. J’ai donc profité des avantages d’une grande colocation, en m’affalant sur le canapé du salon avec mon colocataire, le suppliant de s’endormir avec moi et de prendre le maximum de place pour que l’autre quidam ne puisse pas venir se taper l’incruste.
Au petit matin, après avoir passé seul la nuit dans mon grand lit tout vide, il s’en est allé, me laissant ces simples mots sur un papier chiffonné sur la table:
“Maybe I didn’t treat you
Quite as good as I should have
You will always be on my mind”
S’il avait su que c’était les derniers mots que je voulais entendre de sa part …
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Les Commentaires
Bon j'exagère un peu, lui il aime bien Elvis, quand il voit un calendrier de lui (et oui on en trouve) il cri... Ou des Cd de lui il chante et me dit "ouah t'as vu ça c'est "nianianiania" (le titre de la chanson) et il se met à chanter. Voilà, après faut adopter l'art et la manière d'éviter de rencontrer un objet quelqonque qui aborde Elvis...