Censurée sur Instagram, sexualisée, stigmatisée pendant l’allaitement… la poitrine nue des corps perçus comme féminins n’a rien d’anodin dans le monde occidental.
Avec la démocratisation du monokini dans la seconde moitié du XXe siècle, la plage est devenue un des rares espaces où celles qui le souhaitent se sentaient libres de bronzer seins nus, sans craindre de conséquences politiques et sociales. Pourtant, la pratique est aujourd’hui en baisse historique : pratiqué par 43% des Françaises dans les années 80, le topless en 2021 ne concerne plus que 19% des femmes.
Des risques sanitaires, mais pas seulement
Pour la majorité des interrogées (53%), la première des raisons de ce recul est un risque d’ordre sanitaire : celui que le soleil fait courir à leur peau. Mais ce n’est pas tout… une part bien trop importante des répondantes affirment ne pas bronzer seins nus par peur des réactions extérieures.
Ainsi, les moins de 25 ans sont 50% à expliquer qu’elles gardent le haut de leur maillot de bain par crainte d’être l’objet d’agression physique ou sexuelle. Une peur qui correspond à une réalité accablante : 49% des Françaises, soit près d’une sur deux, affirment avoir déjà été victime d’une forme de harcèlement ou d’atteinte sexuelle sur la plage, ou dans un lieu dédié aux bains.
L’étude précise :
« Ces atteintes […] peuvent prendre des formes très graves comme de l’exhibition forcée (19%), des menaces à caractère sexuel (9%), voire même des attouchements (13%). C’est au total une Française sur quatre (25%) qui a été victime d’atteintes et d’agressions sexuelles dans un lieu dédié aux bains. »
Elles sont par ailleurs 48% chez les moins de 25 ans à déclarer couvrir leur poitrine parce qu’elles redoutent de subir le regard concupiscent des hommes, et 46% à avoir peur qu’une photo d’elles soit prise et circule sur les réseaux sociaux.
Des chiffres qui démontrent ce qui n’était déjà plus à prouver : sur la plage comme ailleurs, nombreuses sont celles qui choisissent leur tenue en prévention de comportements sexistes et violents.
Une femme sur deux redoute le body shaming à la plage
En plus de ces considérations sécuritaires, l’étude révèle que l’image de son corps joue un rôle non négligeable dans la pratique du topless. Ainsi, près de la moitié des répondantes affirme avoir déjà craint des remarques désobligeantes sur au moins une des parties de leurs corps dans des lieux dédiés aux bains de mer ou de soleil.
Une tendance qui se révèle aussi parmi les femmes qui déclarent avoir pratiqué le topless ces trois dernières années : parmi celles déclarant se trouver « très jolies », elles sont 36% à pratiquer le monokini, contre 4% des femmes qui « ne se trouvent pas jolies ».
Une constatation qui corrèle la manière dont on découvre son corps à la manière dont on juge son esthétique, et que l’institut analyse ainsi :
« La crainte de ne pas répondre aux canons de beauté en vogue constitue un frein indéniable pour toutes celles qui ont intériorisé l’idée qu’il fallait un corps « irréprochable » pour se permettre de le montrer en public.
Les caractéristiques des adeptes du topless – jeunesse, niveau social élevé, corps et poitrines correspondant aux normes esthétiques – convergent toutes autour du même profil : il s’agit avant tout de femmes qui, pour des raisons objectives ou subjectives, portent un regard suffisamment positif sur elles-mêmes pour prendre le risque de découvrir tout ou partie de leur corps en public. »
Preuve de plus que les lieux de baignade ne sont pas différents du reste de la société. Tant à l’échelle sociale qu’individuelle, les corps féminins restent soumis à des pressions multiples ; et on est fatiguées de le répéter, mais on va le faire quand même : en burkini ou en topless, il est grand temps que le monde lâche nos maillots de bain et laisse nos corps exister en paix.
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*Étude Ifop pour Xcams Media réalisée par questionnaire autoadministré en ligne du 7 au 8 juillet 2021 auprès d’un échantillon de 1500 femmes, représentatif de la population féminine française âgée de 18 ans et plus.
Crédit photo : Ben Mack / Pexels
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