Debout, je patiente dans la salle d’attente. Je suis soulagée car il n’y a personne d’autre dans la pièce. Pas même moi, à vrai dire : mon corps est présent mais ma tête est ailleurs car j’appréhende terriblement ce qui va suivre. Ça fait 5 ans que je porte un DIU (stérilet) et je souhaite faire une pause. J’ai donc pris rendez-vous pour qu’on me le retire.
Je ne sais pas pourquoi je suis revenue voir cette gynécologue. Elle est antipathique et froide. Lorsque je suis venue la voir la première fois, il y a plusieurs années, elle n’avait pas compris ma demande de DIU. « Quand on fait votre poids, s’était-elle exclamée, on a peu de chances de tomber enceinte ! Puis, sincèrement, vous avez encore des rapports avec votre compagnon ? »
Grossophobie et humiliation psychologique
Ce mépris dans la voix… J’ai dû lourdement insister pour qu’elle accepte de me poser le stérilet. J’avais déjà deux enfants et j’étais tombée enceinte très facilement malgré mon surpoids. Ses arguments n’avaient pour moi aucun sens.
Pourquoi suis-je revenue la voir ? Peut-être parce qu’elle me connaissait, et que je lui avais déjà raconté mon histoire, les agressions sexuelles que j’ai subies adolescente, et mon aversion des examens gynécologiques qui me poussait presque systématiquement à quitter le cabinet de ses confrères et consœurs en pleurs.
« Vous avez encore grossi, non ? »
La porte s’ouvre enfin. Elle est là, menue et anguleuse. Je reconnais ses lunettes, son odeur, son regard désapprobateur. Même le bruit de ses chaussures sur la moquette m’est familier. « Vous avez encore grossi, non ?
», me lance-t-elle, avant de me demander de me déshabiller entièrement, chose que je déteste. Mais elle ne me laisse pas le choix. « Croyez bien que ça ne me réjouit pas ! Ce n’est pas pour mon bon plaisir ! Je m’en passerais bien … ».
Et soudain, la douleur. Elle me fait mal, je lui dis, elle proteste. « Vous ne pouvez pas avoir mal et puis vous êtes trop tendue aussi ! » Elle insiste, force, tire. Je panique, me mets à pleurer. Je lui demande d’arrêter. « C’est de votre faute aussi, avec tout ce gras ! Avec vous, j’ai l’impression d’être un véto ! ».
Une souffrance moins vive que celle infligée par ses mots me fait mettre ma main sur mon sexe. Je saigne.. Je ne me souviens plus de ce qu’il s’est passé ensuite. Sans savoir comment, je me suis retrouvée dans la salle d’attente, habillée à la hâte, le goût de mes larmes sur les lèvres. Comme hébétée. Comme bête. Comme une bête chez le véto ?
Je savais que je n’aurais pas dû y aller
J’aurais dû m’écouter et ne pas prendre rendez-vous avec elle. Après cette expérience, j’ai mis des années à retourner voir un·e gynécologue tellement j’avais peur. Aujourd’hui, grâce à mon médecin généraliste, je suis suivie par un sage-femme et j’ai demandé à le rencontrer plusieurs fois avant d’envisager un examen plus intime. Je commence à avoir une solide équipe de soignants autour de moi et je reprends tout doucement espoir dans le corps médical.
Alors aujourd’hui, j’ai envie de vous encourager à écouter votre petite voix intérieure, surtout quand elle vous dit de ne pas y aller. Même si parfois, vous manquez d’estime de vous, cela ne donne pas le droit à quiconque de ne pas vous respecter. S’il vous plaît, ne retournez pas voir les personnes qui vous ont fait souffrir, même par facilité.
Et toi, comme Sibel, as-tu déjà subi ce type d’humiliation en te rendant chez un ou une professionnel·le de santé ?
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