Mais si, tu dois déjà en avoir vues en vente, dans un tabac presse ou une librairie. Regarde, je te donne un exemple :
Un mouvement féministe contre les cartes postales beaufs et sexistes
Dans un communiqué diffusé le 1er août 2018, Femmes Solidaires explique :
« Ces cartes postales traditionnelles sont disponibles à toutes et tous quel que soit l’âge des client·es.
Elles concourent à la culture du viol qui impose une image dégradante des femmes et participent à légitimer et banaliser les violences faites aux femmes. »
Et d’ajouter :
« Ces cartes renforcent le stéréotype de la femme objet, « consommable et jetable » sous prétexte de loisir et de divertissement. »
Femmes Solidaires interpelle la Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les Femmes et les Hommes
Ce communiqué met en avant certaines maisons d’édition et leur demande « l’arrêt de l’impression et de la vente de ces cartes ».
Le collectif a invité des personnes de la France entière à lui envoyer des exemplaires de ces cartes postales, afin de les diffuser chaque jour sur son compte Twitter, où il interpelle notamment la secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, et la ministre de la Culture, Françoise Nyssen.
Terrafemina a interviewé le Collectif Femmes Solidaires, et c’est par leur article que j’ai eu connaissance de cette mobilisation.
Elles partent en guerre contre les cartes postales beaufs — Chez Terrafemina —
Ces cartes postales qui adoptent l’univers visuel des années 80-90 mettent en avant des images beaufs et parfois même à caractère pornographique, sous couvert de blague.
Drôle ou non, la question n’est pas si simple, puisque loin de se vouloir moralisateur, le collectif pointe du doigt la responsabilité sociétale et l’impact global de ces images.
Quel problème posent ces cartes postales ?
La notion de « marrant » ou non n’est pas universelle, et — heureusement ! — rien n’empêche qui que ce soit d’envoyer des blagues sexistes à ses potes si ça les fait rire.
D’ailleurs, ce serait mentir que de dire que les blagues politiquement incorrectes ou de mauvais goût ne me font pas rire. Je ne compte plus les soirées entre amis passées à faire des concours de blagues qui, dans un autre contexte, auraient été totalement inadmissibles.
Mais c’est selon moi justement cette notion de « entre amis » et de « contexte » qui change tout à fait la donne.
Il y a une différence entre un cadre privé et des émissions de télévisions diffusées à des heures de forte audience, ou comme ici une vente de grande ampleur dans un nombre important de magasins.
Le sexisme est un problème global, de société, et c’est à nous collectivement de faire en sorte qu’il disparaisse de nos quotidiens.
L’article de Terrafemina propose une analogie intéressante avec le racisme.
Si aujourd’hui il n’y a plus de cartes postales racistes en vente, ce n’est pas parce qu’elles ont cessé d’être drôles du jour au lendemain. Non, la raison est qu’auparavant le racisme n’était pas un sujet de société, et qu’il l’est devenu avec le temps, jusqu’à ce qu’il ne soit plus acceptable de vendre de images racistes, même sous couvert de blague.
Ce qui n’empêche pas de faire des blagues « entre-soi », ou que l’humour noir s’en saisisse.
Pour moi, il en va de même avec le sexisme.
Questionner l’image et son sens
En tant que féministe, j’espère que l’action de Femmes Solidaires va porter ses fruits, car ces cartes postales me choquent énormément.
Leur volonté de questionner le sens de ces images plus que de juger l’humour en décidant qu’elles ne seraient « pas drôle » est à mon sens louable.
Ces cartes postales font tellement partie du paysage de nos présentoirs que j’ai l’impression que nous ne les voyons même plus ; Femmes Solidaires permet de faire un focus dessus, et de demander pourquoi ces vestiges du passé sont encore présents, et s’il est pertinent qu’ils le soient toujours.
C’est selon moi la véritable différence entre la lutte contre le sexisme et la censure, entre l’engagement et le « on ne peut plus rien dire ».
Car ces images sont les traces d’une société dans laquelle les femmes étaient opprimées, et où les injustices qu’elles subissaient étaient ignorées.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et c’est ce qui fait qu’à présent elles dérangent, tout comme le « Y’a bon Banania » choque eut égard à la prise de conscience collective de l’oppression raciste.
Et peut-être qu’un jour, il ne sera plus concevable de transformer les femmes en objets, même pour rire : cette simple idée sera devenue absurde.
À lire aussi : Le sexisme dans la publicité, à nous de l’éradiquer !
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Les Commentaires
J'ai un souvenir assez marquant de cartes en Ecosse, avec des mecs ultra sec musclés nus du torse et en kilt. Pour le coup ça ressemblait plus à des photos de pro style shooting o/