— Article publié le 30 avril 2013
Lors de ma 26ème année, j’ai décidé de tout plaquer pour aller vivre à l’étranger. Armée d’une valise et de mon chat, je suis donc partie sans trop savoir ce qui allait m’arriver. La Finlande fut presque un hasard puisqu’au départ je voulais plutôt la Suède ou l’Allemagne. Finalement j’y suis restée trois ans et demi, trois années pendant lesquelles j’ai beaucoup galéré et pleuré, mais aussi étudié, travaillé, parfois détesté le pays… Avant d’apprendre à le découvrir, et à apprécier ce qu’il pouvait offrir, avec sa culture pas si éloignée de la nôtre mais pourtant souvent assez déroutante, et qui sait dévoiler ses richesses à qui prend la peine de les chercher. Petite présentation.
Sauna…
Il y a une grande histoire d’amour entre le sauna et les Finlandais-es. Ces petites cabanes en bois qui autrefois étaient également utilisées pour accueillir les accouchements ont encore une part très importante dans la vie quotidienne, à tel point qu’il n’est pas rare d’en trouver dans les appartements et les lotissements. On s’y inscrit et moyennant quelques euros on en profite à peu près n’importe quand.
Le sauna est indissociable des grandes fêtes familiales et entre amis (avec la bière qu’on amène à l’intérieur). Bien entendu on y va sans maillot et la mixité n’est pas franchement taboue : j’ai eu un mal fou à faire comprendre à certains que le fait que je ne veuille pas me retrouver en tenue d’Ève avec des gens que je ne connaissais que depuis trois heures n’était pas lié à un complexe par rapport à mon corps, mais à une notion nommée « pudeur », presque inexistante là-bas.? C’est vrai que les Finlandais-es sont généralement sans complexe et n’ont pas honte de leur apparence, quelle qu’elle soit. Que ça pendouille, que ça soit flasque ou plein de cellulite, ils semblent s’en moquer comme de leur première chemise.
On prête au sauna de nombreuses vertus parmi lesquelles une action apaisante sur l’asthme, les rhumatismes, le stress, un renforcement du système immunitaire et une action purifiante sur les maladies de peau. Vrai, faux ? Je ne sais pas : les Finlandais-es tombent tout aussi souvent malades que nous mais les bougres-ses ont en général une peau bien plus jolie que la nôtre (mais il faut aussi ajouter le facteur pollution et climat dans la balance).
…et sisu
Les hommes abandonnent toujours, moi je n’abandonne jamais !
Quant au sisu, c’est un mythe hérité des anciennes générations qui perdure encore plus ou moins dans la société actuelle. Il est assez difficile de le traduire, c’est quelque chose du genre persévérance, stoïcisme, courage (chez les hispaniques on dirait cojones pour résumer vulgairement, même si je ne peux cautionner l’utilisation des attributs masculins pour imager le courage).
Le sisu est généralement illustré par la guerre d’hiver de 39-40, lors de laquelle les soldats finlandais firent preuve d’une résistance héroïque, exploitant au maximum un terrain favorable à la défense et le manque d’entraînement de l’armée russe. La bataille était un peu perdue d’avance étant donné la supériorité numérique de la Russie mais avant de signer l’armistice, les soldats finlandais tuèrent plus de 126 000 ennemis et en blessèrent plus de 188 000 (contre 26 000 morts et 43 000 blessés de leur côté).
Dans la pratique un bon Finlandais ne se plaint jamais, est dur à la tâche, aime l’hiver et la nuit, est entêté, robuste et ne se laisse pas détourner du chemin qu’il a choisi par qui/quoi que se soit.
De nos jours, une bonne partie de la jeune génération a détourné le sisu en un échange de coups de poings entre garçons avinés car l’un aura offensé la virilité de l’autre en le qualifiant d’homosexuel (ou de Suédois, apparemment un parfait synonyme dans la Finlande de l’Est).
La Finlande et la nourriture
Attention sujet sensible ! Je suis une aventurière culinaire mais je suis bien vite revenue des mets finlandais… Car il faut l’admettre, c’est loin d’être toujours la panacée. Je ne vous explique pas les grands moments de solitude lorsqu’un Finlandais bien intentionné demandait un avis sur le mets que je venais de goûter et que ma diplomatie légendaire (ou mon hypocrisie, au choix) m’obligeait à répondre « Ihanaaaaaa » (mot très pratique à ressortir à tout va avec un seul -a, voulant dire fantastique, merveilleux, charmant, etc. ) alors que j’avais envie de tout recracher par terre.
En Finlande, le rapport à la nourriture est différent du nôtre : sans aller jusqu’à dire qu’on y mange uniquement pour survivre, le plaisir du palais n’est pas aussi valorisé qu’en France. La haute gastronomie y est presque inexistante et on y mange énormément de junk food, bonbons, crèmes glacées et plats copieusement arrosés de ketchup… (j’ai failli tuer mon conjoint de l’époque qui parsemait chacune de mes tentatives culinaires de cette sauce démoniaque).
Une karjalanpiirakka (tarte carélienne)
La cuisine y est un peu décevante donc, mais on trouve quand même des spécialités locales assez goûteuses comme les
pulla, sortes de pains au lait à la cardamome généralement de forme ronde, ou encore des sortes de brioches à la cannelle qui se consomment traditionnellement avec du café léger. On trouve également en hiver un délicieux petit gâteau aux amandes et à la confiture de framboise nommé le runebergintorttu, vendu afin de célébrer l’anniversaire du poète suédophone Runeberg qui en était très friand d’après la légende.
Du côté salé on trouvera les karjalanpiirakka, des petites tartes au riz qui se mangent tartinées de « beurre d’oeuf » (des oeufs durs écrasés dans du beurre, tout bêtement) et une soupe de pois cassés au lard (ou non), consommée avec de la moutarde un peu sucrée, notre moutarde de Dijon étant considérée comme immangeable (et je suis bien d’accord). Personnellement je suis loin d’être fan mais si vous allez là-bas c’est un peu incontournable. Les Finlandais-es apprécient aussi énormément les boulettes de viande accompagnées de purée ou d’un dérivé de patate quelconque (a priori, c’est une spécialité piquée à leurs voisins suédois). Ils en sont très fiers et tombent toujours des nues lorsqu’on leur apprend qu’on a les mêmes chez nous. Une grande importance est accordée aux baies qui accompagnent régulièrement les plats, de la viande au dessert.
Du côté liquide, on trouve quelques étrangetés comme le salmiakki, liqueur à la réglisse plutôt pas mauvaise, ou des cidres aux arômes surprenants de fraise, framboise ou poire ultra chimiques… Un autre élément typique des pays nordiques : les alcools à base de plaquebière, une baie jaune aux arômes délicats qui ne pousse pas dans nos contrées. Il existe d’ailleurs pas mal de dérivés en tout genre, des pâtisseries, confitures… Les prix sont généralement prohibitifs donc le client moyen ne sera pas trop regardant quant à la qualité et privilégiera la degré d’alcool.
Et enfin je vous ai gardé le meilleur (haha) pour la fin : le mämmi, dessert traditionnel de Pâques confectionné à base de farine et de malt de seigle qui se mange copieusement arrosé de lait ou de crème à la vanille ; il était à l’origine consommé pendant le Carême pour ses propriétés laxatives (glamour, glamour). Et parce que je voudrais vous éviter une description trop triviale je vous laisse juger :
Pas aussi mauvais que ça en a l’air, mais pas très bon non plus.
Alors, ça vous donne envie de venir faire un tour là-haut ?
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Les Commentaires
Je n'aime pas vraiment le principe qu'un pays autre que le nôtre soit inattaquable (surtout un pays du Nord - fort à la mode). Je suis la première à émettre une critiue vis-à-vis de mon pays et la même règle s'applique pour tout et pour tous. Il y a des choses formidables en Finlande, mais aussi des choses insupportables et je en vois pas pourquoi je tairais les secondes pour ne parler que des premières. C'est un pays comme la France et comme tant d'autres il y a du bon, du mauvais et je ne suis pas encore suffisamment hypocrite peut-être pour que 100% de ce que j'y ai vu était exceptionnel.
Et oui évidemment c'est subjectif comme n'importe quel article basé sur l'opinion de l'auteur et cette carte n'a pour d'autre ambition que de partager mon ressenti. En même temps je n'ai aucune raison de "démolir" la Finlande et ce n'est pas ce que j'ai essayé de faire. Voilà.
J'avais pas mal de projets pour les cartes postales de Finlande mais malheureusement tout cela a du être repoussé car j'ai eu une année disons..chargée. Tu y aurais vu des choses gentilles, des choses moins gentilles..mais en tout cas des choses que j'ai honnêtement ressenties.