Cela fait partie des informations qui selon moi devraient faire le tour de la Toile, devenir virales… Et malgré cela, cette nouvelle est loin de faire la Une.
Carole Thibaut, féministe dans le monde du théâtre
Carole Thibaut est autrice, comédienne et metteuse en scène.
Son talent et sont travail sont reconnus, puisqu’elle a à son actif de nombreux prix et octrois de bourses : Prix Jeune Talent SACD, Prix de Guérande, Prix des Journées de Lyon, bourses du Centre National du Théâtre, Beaumarchais, Centre National du Livre…
En plus de cela, elle est une artiste engagée qui milite pour l’égalité entre les femmes et les hommes (entre autres, car une qualité vient rarement seule).
Ah oui, et elle est chevalière des arts et des lettres. Voilà. Une personne badass, somme toute.
Carole Thibaut refuse un Molière au Festival d’Avignon
Lors du Festival d’Avignon, ce 13 juillet 2018, Carole Thibaut parmi d’autres personnalités du monde du théâtre a été récompensée d’un Molière, prix prestigieux qui salue les grands artistes du théâtre français.
Du moins, c’est ce que laisse croire la mise en scène de David Bobbé, qui l’a invitée, puisque ces remises de prix étaient en réalité factices, ce que détaille Carole Thibaut dans un post Facebook.
Au cours de cette mise en scène, Carole Thibaut a refusé le « prix » qui lui était remis, et donné un discours électrisant sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’univers du spectacle, et le microcosme du Festival d’Avignon.
Le discours de Carole Thibaut au Festival d’Avignon, un coup de poing dans le bide
Le discours de Carole Thibaut a été relayé en vidéo, alors je te laisse le découvrir à ton tour. Honnêtement, il m’a foutu des frissons.
Avec assurance et entrecoupée par quelques applaudissements, Carole Thibaut manie une énergie et une émotion incroyables, qui me font penser à la deuxième partie du seule-en-scène Nanette.
J’ai pris ce discours comme une véritable coup de poing dans le bide, parce que la comédienne interprète magistralement son texte. Les faits sur lesquels elle s’appuie m’ont tordu les tripes, et je me suis rappelé que l’égalité entre les femmes et les hommes était loin d’être atteinte.
« Mets-toi bien ça dans le crâne, petite bonne femme créatrice : la Cour d’honneur et les Molière ne sont pas pour toi.
Ou alors tente le jeune public. Le jeune public ici c’est un endroit réservé aux bonnes femmes créatrices. »
Carole Thibaut dénonce les inégalités, chiffres à l’appui. Elle se désole de ne plus y croire, puisqu’elle explique avoir donné un autre discours, toujours pour le Festival, deux ans auparavant. Un discours rempli d’espoirs qui se sont transformés en désillusions.
« Cette année, deux ans après donc, la programmation du Festival In, hors jeune public, présente 9% d’autrices femmes pour 91% d’auteurs hommes. Pour les deux spectacles jeune public elles représentent 75%. »
La « copine sympa » ne veut plus voir sa lutte écrasée
L’autrice explique aussi en avoir sa claque du rôle de « copine sympa », de nana marrante, de « bouffonne du Roi », surtout quand le roi est la domination masculine.
Elle s’indigne d’autant plus que le thème de cette 72ème édition du Festival In est le genre. L’idée est de questionner le genre, sous tous ses aspects, à travers le spectacle.
Mais lorsque « la programmation « théâtre » représente 89,4% d’artistes créateurs hommes (auteurs et metteurs en scène) pour 10,6% d’artistes créatrices femmes », tout comme Carole Thibaut je m’interroge sur le sens de cette volonté.
Elle exprime d’ailleurs une idée qui me semble primordiale, concernant l’intersectionnalité des luttes et comment les unes peuvent être favorisées… Au détriment des autres.
« D’accord pour l’intersectionnalité des luttes.
D’accord pour lutter contre toutes les injustices, contre toutes les discriminations, contre la binarité si stupide et pathétique qui gouverne notre monde contemporain si moderne, comme il gouvernait l’ancien.
Mais comment se fait-il que toute lutte semble écraser et annihiler la lutte pour l’égalité des hommes et des femmes ? Comment se fait-il que cette lutte-là soit systématiquement écartée, remplacée par une autre lutte ?
Les femmes se sont fait niquer à la révolution française. Elles se sont fait niquer durant la Commune. Elles se sont fait niquer durant le Front Populaire. Elles se sont fait niquer en 68.
Et elles se font encore niquer au festival d’Avignon 2018, ce grand festival dont le thème revendiqué cette année est… le genre, et dont une des seules rencontres thématiques programmées qui aborde le sujet s’intitule « les femmes dans le spectacle vivant, doit-on craindre le grand remplacement ? » […]
Et c’est comme ça qu’on se fait niquer, depuis de siècles, des décennies, des années, des mois. »
Ce n’est là qu’une des nombreuses idées qu’exprime Carole Thibaut dans son discours d’une grande importance.
Je l’admire pour ses talents d’oratrice et pour les idées qu’elle exprime, dans la cour habituellement tranquille de la médiathèque Ceccano, à Avignon.
D’ailleurs, ce n’est pas parce que la mise en scène est factice que les mots, eux, le sont. J’ai pu ressentir dans l’élocution de la comédienne toute leur véracité et leur profondeur.
Le monde a bien besoin de role models comme elle !
Merci à Lenehän d’avoir signalé l’information dans le sujet Veille Permanente Sexisme du forum madmoiZelle !
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Les Commentaires
C'est pour cela que j'ai tenu aussi à commencer l'article en rappelant l'ensemble des rôles qu'endosse Carole Thibaut