Une « ouverture de porte ». C’est le nom de la procédure qui consiste à vérifier les lieux d’un particulier qui ne donne plus signe de vie. Lorsqu’on part pour ce genre d’intervention, ça ne sent généralement pas bon (au propre comme au figuré). Surtout que parfois, ce n’est pas l’absence de réponse qui alerte les proches de la victime, mais l’odeur de mort qui règne dans l’immeuble qui fait réagir les voisins… Je vous laisse imaginer.
Cette nuit-là, c’est l’appel de la famille qui nous vaut de frapper à la porte d’une vieille dame. Après plusieurs minutes d’attente sans réponse, nous prenons la décision de passer par la fenêtre. L’appartement donne sur la rue, l’accès au premier étage est aisé. Et puis lorsque nous pouvons éviter de fracturer une porte d’entrée, nous le faisons pour ne pas occasionner de trop lourdes charges au propriétaire des lieux.
Direction la rue donc. Le sergent est sur le trottoir avec la famille, il leur explique calmement notre procédure pour qu’ils ne soient pas trop impressionnés. Je monte à l’échelle, et je brise le carreau de la fenêtre d’un coup sec.
Lorsque je pénètre dans les lieux, la pestilence envahit mes narines : pourriture, excréments, urine… Le cocktail habituel.
Sans réponse à mes appels, j’allume ma petite torche et je pars en quête d’un interrupteur… Nous sommes en pleine nuit, la lumière de la rue ne transperce pas les rideaux tirés, il fait noir comme dans une tombe ici.
Mais la batterie de ma lampe est faible, la puanteur est insoutenable et dans la précipitation je ne parviens pas à trouver la lumière…
Mes recherches doivent sembler interminables pour la famille. Je décide donc rapidement de retourner à la fenêtre pour faire signe à mon supérieur que l’odeur à l’intérieur ne laisse pas de doute sur l’état de la mamie. Il peut ainsi préparer les proches de la victime à la suite, et moi je peux effectuer mes recherches plus calmement.
Toujours à l’aveuglette, j’évolue lentement lorsque j’entends des éclats de voix qui me parviennent de l’autre côté du mur. Ce sont mes collègues restés sur le palier. Je décide donc d’ouvrir la porte d’entrée, ça fera déjà un peu de lumière :
– Les mecs, je suis à l’intérieur, ça sent la mort. Je vous ouvre ! – Qu’est ce que tu branles, on se gèle les couilles à t’attendre ! – Y’a pas de lumière crétin, je galère ! J’arriiiiiiiiiiiiiiiiaaaaaaaark !
Mon glapissement de pucelle effarouchée transperce les ténèbres, alors qu’une main inconnue m’agrippe violemment la cheville gauche.
Ma Ranger droite se prépare à exécuter un magnifique coup de pied retombant en direction du zombie qui m’attaque la jambe, lorsque son râle me fait suspendre mon geste : « Merde ! La vieille ! »
Je me jette sur la poignée de la porte que j’ouvre à la volée : « Les mecs elle est vivante ! ». Je dévale les escaliers pour prévenir mon sergent, mais à sa tête je comprends vite qu’il a déjà prévenu la famille du « décès »… Oups.
Épilogue
Après avoir frôlé la syncope et l’incident diplomatique, je suis parti m’asseoir dans l’ambulance histoire de respirer un peu… Lorsque je fais des ouvertures de porte d’habitude, les victimes sont soit mortes, soit absentes. Pas en mode zombie à la REC.
Enfin, si je me suis vite remis de cette petite frayeur, on ne peut pas en dire autant de mon supérieur. Lui il a ramé comme un dingue pour expliquer à la famille que finalement leur mamie était vivante… Depuis on est un peu en froid.
Ah oui, et je ne vous ai pas dit, le meilleur dans cette histoire, c’est que ça s’est passé le 31 octobre… Happy Halloween !
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On a hâte de vous lire !
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